La GPL3 est sortie hier après un long processus de publication de drafts (brouillon, ébauche, version de travail) et de débats..
La licence :
http://www.gnu.org/licenses/gpl.html
L'annonce:
http://www.fsf.org/news/gplv3_launched
La plupart des logiciels libres vont y migrer quasi automatiquement puisqu'il est écrit dans la plupart que le logiciel est distribué sous licence GPL 2 et supérieure)
Le noyau Linux, sans doute pas, puisque Linus Torvalds avait choisi en 1992 d'enlever le et supérieur, et il ne semble d'une part pas décidé à demander à tous les contributeurs du noyau si ils sont d'accord pour que le travail dont ils ont les droits d'auteurs soit distribué sous GPL3, et par ailleurs la licence lui plait moyennement, même si elle lui plait plus que dans les premiers drafts.
Comme j'avais fortement l'intention depuis 4 à 5 semaines d'évoquer les manoeuvres malhonnêtes de Microsoft depuis quelques mois concernant les brevets, sans en trouver le temps, cela va me donner l'occasion de lever un coin du rideau sur les méthodes de cette société.
En quelques mots, la méthode employée même si elle est différente revient à la même chose que ce qu'a fait SCO.
SCO estimait (estime encore mais ils sont les seuls, même le juge n'y croit plus) que du code Unix (dont elle estime avoir les droits) avait été introduit par IBM dans le noyau Linux. Mais sans compter que leur affirmation est fausse (même si ils en étaient persuadés), pour eux leur stratégie n'était pas, de faire retirer leur propriété intellectuelle de Linux, mais ...
"On fait un procès à IBM. Et en plus on ne va jamais indiquer quel est le code en faute, comme cela, on fera payer des droits pour utiliser Linux, puisque les gens craindront d'être en illégalité".
En somme une société sur le déclin voulait réaliser un hold up sur un travail altruiste librement redistribuable qui n'est pas le leur, sur des affirmations fausses (mais dont sans doute, certains dirigeants étaient persuadés, sans avoir vérifié la réalité des faits, se disant : "ce n'est pas possible sans vol de code que Linux ait si vite grandi technologiquement" )
On apprendra plus tard d'ailleurs que la société ayant accepté de prêter de l'argent à SCO pour le procès, Baystar Capital (dont 30 millions investi par la Royal Bank of Canada) avait été mise en relation avec SCO qui cherchait un investisseur par ... Microsoft.
Microsoft donc après avoir utilisé SCO comme pantin, refait la même chose cette fois à visage plus découvert et non plus sur une idée de code copié, mais sur les brevets logiciels. Ainsi à plusieurs reprises durant l'année passée, Steve Ballmer ou quelques autres, ont déclaré que les distributions Linux violait X de leur brevets.. (La dernière fois, fin mai, Ballmer a parlé de 235). Chaque fois que le lever de bouclier se faisait jour, Microsoft trouvait une excuse pour affirmer que ce n'était pas une menace. Ainsi il y a un bon moment, Microsoft avait affirmé en tant qu'excuse que Steve Ballmer s'était contenté de citer un rapport de l'OSDL, le laboratoire qui emploie Torvalds, qui justement expliquait l'inverse de ce que Ballmer voulait lui faire dire (démontrant que le risque des brevets était moins important sous les solutions BSD et Linux). Et fin mai, lorsque Ballmer a évoqué le chiffre de 235 brevets, Microsoft les jours suivant a juste dit que c'était sans arrière pensée que Ballmer avait affirmé cela.
Mais il reste que cette société se refuse à indiquer aucun des brevets soit-disant violé (les 9/10 des brevets informatiques sont invalides de toute façon puisqu'ils brevète une solution déjà connue).
Etrange de dire que c'est sans arrière pensée quand ces 4 dernières semaines elle convainc quelques sociétés mineures (et qui n'ont jamais été énormément dans l'esprit du libre, exploitant le libre sans adhérer à sa philosophie réellement, ne respectant l'esprit du libre que pour être en conformité légale avec la GPL ou d'autres licences, et non par conviction) ces derniers mois ) telles que Xandros ou Linspire, ou bien LG Electronics, qui utilise du Linux embarqué dans certains produit (LG n'est pas mineur, mais ce n'est pas un éditeur logiciel) de prendre leur protection juridique auprès de Microsoft affirmant que Microsoft ne les attaquera pas ni leurs clients/utilisateurs.
Si ces petites sociétés font cette bêtises d'acheter cette protection (puisqu'elles laissent entendre que elles-même sont convaincues par les affirmations de Microsoft, et par ailleurs réalisent l'objectif de Microsoft, séparer la communauté du libre en plusieurs parties, les protégés par tel accord, les protégés par tel autre accord, et les non protégés) c'est en fait la faute d'un acteur moins mineur (que je citerais quand je m'étendrai plus sur la GPL ce week-end, je laisse le suspens et que je nomme pour le moment M. Fautif) qui commit l'erreur, sans doute en bonne foi, de signer un accord en novembre dernier avec Microsoft.
Heureusement, par une astuce et un certain talent juridique, la Free Software Foundation a réussi à transformer cet accord en protection générale de la communauté par un article dans la GPL3 qui exploite une faille du contrat entre Microsoft et ce grand acteur, faisant perdre toute crédibilité aux menaces de Ballmer (si encore elles en avaient).
En revanche la GPL3 interdit aux sociétés ayant signé un accord de protection après fin mars 2007 d'utiliser la GPL3 à moins de renoncer à cet accord. (la date de fin mars est faite pour que le premier accord de M. Fautif reste valable, c'est en quelque sorte un pardon accordé par la communauté à M. Fautif, du fait des importantes contributions de M. Fautif au libre, afin que M. Fautif puisse continuer à bénéficier des côtés avantageux financièrement du contrat avec Microsoft)
Cette interdiction est importante. En effet de nombreux logiciels sont passés du fait des libres "GPL2 ou supérieure" à la GPL3. Et sont donc considéré depuis vendredi comme étant distribués sous les deux. Très vite certains projets vont abandonner une des licences, la GPL2, pour leurs nouvelles versions.
Les sociétés ne pouvant utiliser la GPL3, ne pourront donc bénéficier des nouveautés introduites dans les logiciels sous GPL3, puisque l'autorisation de redistribution de l'auteur de ces nouveautés ne concerne que la GPL3. Par conséquent, leurs logiciels n'évolueront plus, à moins qu'ils se mettent à les développer eux même (ou qu'ils convainquent des bénévoles) à partir de la dernière version sous GPL2 (mais sans pouvoir copier, il faudra améliorer les logiciels sans pouvoir copier).
En somme ces sociétés vont développer elles même tous ces logiciels, (ou essayer de faire naitre une communauté de développeur qui choisirait de faire évoluer ces versions sous GPL2 plutôt que les versions utilisés par 99% des gens, celles sous GPL3

, bonne chance à eux

)
En somme en signant cet accord ces dernières semaines, ces sociétés ont pris une impasse, car leurs versions vont stagner, puisqu'abandonnées par 99,999% de la communauté, les obligeant à termes ou à la faillite, ou à renoncer à la protection de Microsoft.
Et pourtant, à part pour M. Fautif (que l'interdiction ne concerne pas), c'était en toute connaissance de cause que il y aurait de tels articles dans la GPL3.
A croire que pour ces sociétés l'engagement dans le libre n'était que du court terme.. (Pour LG qui fait de l'embarqué, ce n'est pas étonnant, leur utilisation de Linux était pragmatique plutôt qu'une question de philosophie. Pour Xandros ou Linspire, cela révèle ce qu'on pouvait soupçonner parfois)
Quant à se demander pourquoi Microsoft fait ça.. C'est simple il suffit de faire un parallèle :
SCO était en perte de vitesse avant d'essayer de se sauver en lançant ces accusations que la justice va prochainement signifier comme infondées (il est même probable qu'un des procès prouve que SCO n'a jamais eu les droits de la version propriétaires d'Unix contrairement à ce qu'ils croyaient

)
Identiquement, pour Microsoft, sur le marché serveur le recul est de plus en plus patent. Ils estiment en interne que d'ici à 15 ans ils vont finir par perdre le marché.
Alors pourquoi ne pas faire comme SCO, ne pas essayer de récupérer de l'argent sur la source de leur recul : ces logiciels offerts en patrimoine de l'humanité que sont les logiciels libres.
En plus l'incertitude que fait planer leurs accusations, peuvent ralentir un peu le grignotage du libre à leur dépend.
C'est la technique du FUD (Fear, Uncertainty, Doubt / Crainte, Incertaineté, Doute).
Alors que si effectivement leurs accusations étaient fondées, il suffirait d'indiquer les brevets violés afin d'une part de réécrire les logiciels ayant violé sans le savoir des brevets, et d'autre part que les entités ayant gagné de l'argent en commercialisant ces logiciels libres contenant ces brevets passent à la caisse.
Mais, tout comme SCO, au lieu d'opter pour la franchise et une situation claire, on préfère entretenir le flou et agiter une épée de Damoclès. Et faire persister la soi-disant violation en gardant le silence...
C'est souvent l'arme des accusations infondées, cette technique.
Hugues