Aujourd'hui au musée Manège de Moscou:
http://kremlin.ru/events/president/news/69781
Vladimir Poutine a écrit:[...]
Vous l'avez probablement vu vous-même, avec les jeunes que j'ai rencontrés cet après-midi lors du dépôt de fleurs devant le monument à Minin et Pozharsky, et j'ai également parcouru cette exposition ["Ukraine. Au tournant d'une époque"]. Tout le contenu de cette exposition confirme l'exactitude et la pertinence de la conclusion de Nikolai Mikhailovich Karamzin selon laquelle le présent est une conséquence du passé, de l'histoire.
Pendant des décennies après l'effondrement de l'Union soviétique, l'Ukraine a subi l'ingérence directe et manifeste des pays occidentaux dans ses affaires intérieures. En fait, ils ont essayé de faire la même chose en Russie, mais, malheureusement, en Ukraine ils ont réussi à implanter dans l'esprit de millions de personnes de telles pseudo-valeurs, ce qui a conduit au fait que sur ce territoire ils ont créé l'anti-Russie, semant la haine, violant la conscience des gens, les privant de leur véritable histoire. Tout a été fait pour remodeler la conscience de millions de personnes, et la mèche a été très habilement amenée à l'effondrement de notre pays.
Maintenant, nous avons regardé : dans l'une des salles de l'exposition, on parle justement du professionnalisme avec lequel ce travail a été abordé dans certains pays occidentaux, ils y ont travaillé pendant des décennies au niveau de centres scientifiques sérieux et bien financés.
L'affrontement avec le régime néo-nazi - l'affrontement de la Russie avec le régime néo-nazi qui a émergé en Ukraine - était inévitable, et si nous n'avions pas agi en février, il en aurait été de même, mais dans une position pire pour nous. La situation en Ukraine a été portée par ses soi-disant amis à un point tel qu'elle est devenue mortelle pour la Russie et suicidaire pour le peuple ukrainien lui-même. Et nous pouvons le constater même par la nature des combats - c'est incroyable ce qui se passe là-bas : c'est comme si les Ukrainiens n'existaient pas, ils sont jetés dans la fournaise et c'est tout.
C'est l'Ukraine, le peuple ukrainien, qui sont les premières et principales victimes d'une fomentation délibérée de la haine envers les Russes, envers la Russie. En Russie, c'est exactement le contraire, vous le savez bien : nous avons toujours traité le peuple ukrainien avec respect et chaleur. Nous l'avons toujours fait, malgré la confrontation tragique d'aujourd'hui.
Je le répète : nous avons pris la responsabilité d'empêcher une situation bien pire. Nous nous souvenons de ce qui s'est passé en 1941, lorsque, malgré les informations fournies par les services de renseignement sur le caractère inévitable d'une attaque contre l'Union soviétique, les mesures de défense nécessaires ont été retardées et quel lourd tribut a été payé alors pour la victoire sur le nazisme.
Oui, maintenant aussi c'est difficile, difficile, amer aussi du fait qu'un peuple se bat contre un autre, en fait, l'affrontement se fait à l'intérieur d'un seul peuple, tout comme après la tourmente de 1917, les gens étaient à nouveau dressés les uns contre les autres.
À l'époque, les puissances étrangères s'emparaient de la tragédie de notre peuple. Ils ne se souciaient pas des Blancs et des Rouges, ils poursuivaient leurs propres intérêts, affaiblissant et déchirant la Russie historique. Et aujourd'hui, fournissant sans cesse des armes à l'Ukraine, y déployant des mercenaires, ils sont absolument sans pitié pour ses citoyens. À leurs dépens, ils favorisent leurs objectifs géopolitiques, qui n'ont rien à voir avec les intérêts du peuple ukrainien.
[...]
Si la plupart des paragraphes sont faux (on va plus s'embêter à lui démontrer que l'Ukraine n'est pas néo-nazi), on va juste s'attarder sur les passages en gras, qui sont les plus aberrants.
Par exemple, en Ukraine occupée, il est interdit de parler Ukrainien, en particulier à l'école (en dépit du fait que la Russie proclame que chacun est libre de parler dans sa langue, sur son territoire..)
D'ailleurs si ici l'Poutine use du mot Ukraine, il en parle en tantque région géographique (on le comprend ensuite quand il parle d'un seul peuple)... mais en tant qu'état, il n'existe pas pour la Fédération de Russie: le terme employé est "régime de Kiev", ce qui permet de ne pas reconnaître l'existence du voisin
(je dois rappeler que si la France s'appelle officiellement la République Française, la Suisse la Confédération Helvétique et l'Allemagne la République Fédérale d'Allemagne, l'Ukraine s'appelle officiellemenet Ukraine (Oukraïna), l'appeler autrement, de façon systématique par une périphrase revient à ne pas reconnaître son existence)
Alors on dira peut-être "oui mais en Ukraine, la langue russe est bannie...", j'ai déjà dit une bonne dizaine de fois que c'était faux... témoigné à quel point le Russe est une langue sociale, celle avec laquelle on fait connaissance avec des inconnus (ou simplement on s'adresse à eux) etc.. bref c'est un liant essentiel de la société ukrainienne.
Alors, oui mais la loi de 2019
La loi de 2019 est la suivante:
- l'enseignement en Ukraine, uniquement en Russe, n'est plus possible.. on peut enseigner en Russe à condition que d'autres cours soient en Ukrainiens (en Ukraine occupée on ne peut enseigner qu'en Russe, d'ailleurs en Russie aussi)
- les sites d'information qui publiaient en russe uniquement, doivent aussi avoir une version ukrainienne
- les éditeurs de livre qui publiaient en russe uniquement, doivent aussi vendre une traduction ukrainienne
- les diplomates qui représentent le pays doivent parler ukrainien et non russe, tout comme les membres du gouvernement
- les éditeurs vidéos qui éditaient (ou mettaient à disposition pour des sites de VOE) des oeuvres parlée ou sous-titrée en russe doivent éditer aussi une version ukrainienne
- les lois sont votées en ukrainien mais sont publiées dans les deux langues (afin que nul ne soit censé l'ignorer, comme on dit sous nos latitudes)
Les trois premiers points obligent simplement à que tout ce qui est publié en russe en Russe soit disponible en Ukrainien. Pour que la langue du pays ne soit nulle part une langue de seconde zone, mais au contraire la langue où laquelle tout est disponible (en pratique c'est encore loin d'être le cas, tout ou presque est disponible en russe, et pas tout en Ukrainien... mais la loi a tendance a faire que ça s'équilibre peu à peu ... même si les problèmes entre les deux pays ont fait aussi que des éditeurs russes ont cessé de vendre en Ukraine ou des grossistes ukrainiens ont cessé d'acheter en Russie, ce qui fait que parfois des trucs en Russe plutôt pointus devenaient aussi introuvables en Russe sauf à commander directement en Russie .. mais ça n'a rien d'une politique gouvernementale).
Et le Russe est implicitement une deuxième langue que par le fait que l'inverse n'existe pas. Il n'y a aucune obligation à publier en russe (ce qui est plutôt logique, on est en Ukraine), mais la plupart le font, soient parce qu'ils le faisaient avant, soit parce qu'ils y voient un intérêt économique.
Mais il n'y a aucune interdiction du russe (sauf au niveau diplomatique) et gouvernemental. (Tout comme en France on ne parle pas Breton, Basque, Corse ou un des multiples dialectes de l'Occitan quand on remplit une fonction de cette nature).
Enfin, pardon mais le "nous avons toujours traité le peuple ukrainien avec respect et chaleur":
outre la circulaire Valuev de 1863 et le décret d'Ems de 1876 dont j'ai déjà parlé en mai (et quoté par la suite)... l'histoire de la Russie est constellée auparavant et après cette circulaire et ce décret d'actes de suppression de l'expression de la langue ukrainienne : de 1627 (où une oukase du Tsar Michel Ier fait brûler toutes les copies des Evangiles didactiques du poète et religieux Kirilo Stavrovetsky, pour le seul crime de leur langue) à 1990 en passant par les décrets de Pierre Ier en 1720 (interdiction et saisie des livres publiés en Ukrainien), de Pierre II en 1729, de Catherine II en 1763 etc.. etc..
Hugues