La séquence du spectateur - TOPIC CINEMA

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Modérateurs: Garion, Silverwitch

Messagede Silverwitch le 25 Déc 2003, 19:02

BARMANOU a écrit:Je me permets de m’ "autoquoter" sur Amélie Poulain. Car c’est vraiment ce que je pense de ce film.


Moi j'étais toute prête déjà à te croire sur parole la première fois.

BARMANOU a écrit: Je suis stupéfaits de lire les interprétations "libres" de certains qu’ils brandissent comme étant LA vérité du film ou tout au moins ce que Jeunet voulait faire passer aux spectateurs. Sauf votre respect, personne à part Jeunet, ne peut se targuer de connaître exactement quelles étaient les intentions réelles de l’auteur, si volonté de faire passer une idée forte (et subversive ? :eek: ) il y avait. Ce que je doute profondément. :roll:


Sauf ton respect Barmanou, tu confonds ici l'intention de l'auteur et le sens du film. Le "voici ce que j'ai voulu faire" d'un cinéaste n'intéresse que les fans ou les biographes. Jeunet aurait-il juré qu'il avait réalisé un western avec Amélie Poulain, cela n'eût rien changé au film lui-même. Une fois envoyée dans l'espace public, littéralement mise au monde, l'oeuvre est un artefact qui encourt l'évaluation pour lui-même. Contrairement donc à l'affirmation indigente de Luc Besson pour qui le film est un "objet gentil", un "bébé conçu par amour". Ce qui est d'ailleurs amusant en parlant du film dont nous discutons ici, parce que ce culte de l'intentio auctoris convient à la logique publicitaire qui veut que les personnes soient ce à quoi elles ressemblent. Serge Daney écrivait à la sortie du Grand Bleu que Luc Besson apparemment, sait une fois pour toutes à quoi ressemble une femme, un Péruvien ou un Italien, s'il avait vécu assez longtemps pour voir Amélie Poulain, il aurait pu dire que Jean-Pierre Jeunet lui aussi sait une fois pour toutes à quoi ressemble une concierge, un épicier et Paris, comme ses personnages savent une fois pour toutes ce qu'ils aiment et ce qu'ils n'aiment pas.

Donc si je suis prête à t'accorder que connaître l'intention de Jeunet n'est pas aisée, le sens du film et sa cohésion interne est plus facile à examiner. J'y reviendrai ensuite pour montrer que ta vision du film Amélie Poulain passe à côté du sens du film pour y substituer ta propre rêverie. Mais par exemple: au cinéma Amélie adore voir ce que les autres spectateurs ne voient pas, ainsi cette mouche qui avance de gauche à droite dans un plan de Jules et Jim. Cependant, le film commence par une mouche écrasée; en outre, il est extrèmement retravaillé (retouche numérique), de manière que des accidents typiques de l'image-trace, comme celui de la mouche dans le film de Truffaut, n'ont que fort peu de chances de s'y produire. Dans l'économie narrative comme dans le processus de fabrication, l'énonciateur se livre donc à une sorte de guerre à la mouche, tandis que l'héroïne, autour de qui le film entend pourtant s'articuler, adore l'imprévisibilité de ces petites bêtes: absence de cohésion. Bon reste alors une interprétation différente qui comprend pourtant également le sens du film: je suis en présence d'un clin d'oeil à Men in Black qui s'ouvre également avec un insecte écrasé.

Quant à l'intention de l'auteur pour sortir un dernier lapin de mon chapeau, tu serais sans doute surpris Barmanou. J'ai rencontré Jeunet en janvier 99 et il préparait ce qui allait devenir Amélie Poulain. Son propos de coauteur (puisqu'il n'est pas scénariste du film, c'est le travail qu'a effectué Guillaume Laurant) était assez différent: il s'agissait d'un film assez sombre parcouru par l'ironie et dont la fin heureuse (en forme de conte de fée) illumine rétrospectivement le chemin parcouru. En gros, l'amour sauve une personne. Depuis le projet avait évolué (il venait de renoncer à engager Emily Watson pour le rôle principal).

BARMANOU a écrit:De la rêverie. De l’humour. De la légèreté et de la tendresse. Et de l’originalité. Voilà pèle mêle tout au plus ce que l’on peut relever objectivement de ce film. Même si certains contesteront ce caractère "objectif", j’ose me l’approprier à mon échelle de subjectivité :-P . Maintenant, chercher obligatoirement une interprétation idéologique dans la trame, cela relève de l’exploit personnel et de la déformation issue d’une société qui a pris l’habitude de nous conditionner dans un moule, un carcan, dont les valeurs matérialistes et les clichés sociaux nous précipitent dans un univers unidimensionnel avec comme centres d’intérêts, toujours les mêmes repères.


Qu'est-ce qui est original dans Amélie Poulain? Qu'est-ce qui est léger et tendre? Je commence à croire que tu n'as pas vu correctement le film de Jeunet dont pourtant la charge n'est justement pas tendre: la révélation d'Amélie qui entend l'accident mortel de Lady Diana à la télévision est un moment particulièrement méchant et surtout le film corrige cette rêverie: le couple que fait se rencontrer Amélie (la buraliste et le client bougon) après une brève idylle se séparent, et surtout Barmanou le film pour faire sens prend bien garde de mettre en garde Amélie et le spectateur. Souviens toi du discours que lui tient le peintre! Pour le reste, si tu parles d'interprétation idéologique, le plus simple serait bien évidemment que tu montres ce qui dans le film contredit telle ou telle vision.

BARMANOU a écrit:Que l’on aime ou pas le film, c’est tout à fait légitime. Une œuvre ne fait jamais l’unanimité. Et c’est tant mieux. Car dans le domaine du sensible, nous sommes tous différents.


C'est un truisme.

BARMANOU a écrit: Et justement, le point fort du film de Jeunet est de nous renvoyer à notre propre sensibilité dissimulée sous notre carapace d’adulte, celle de notre jeunesse depuis trop longtemps cachée. L’altruisme, le plaisir de faire plaisir. Utopiques, certes. Mais c’est ce que j’ai retenu de ce film, à mon échelle de sensibilité. D’autres auront retenu les couleurs, l’ambiance le rythme, les dialogues ou la musique, plus ou moins positivement suivant les critères d’exigences propres à chacun.


C'est je crois une vision assez superficielle du film. Puisque justement des éléments du récit montrent que le personnage d'Amélie n'est pas heureux justement et qu'elle ne fait pas réellement le plaisir des gens autour d'elle (en tout cas pas toujours). Et que pour faire plaisir à certains, elle n'hésite pas à faire souffrir d'autres personnages qui eux sont présentés (avec humour, tendresse et rêverie??) à la moquerie du spectateur comme l'épicier Colignon accusé de tous les maux: il terrorise un pauvre employé un peu benêt! Quel méchant homme. Tu es dans ce cas précis uniquement dans le jugement de goût, c'est ton droit en effet. Mais que tu te serves de ta subjectivité pour imposer que seul un jugement de goût subjectif serait le "bon" jugement, c'est un peu plus délicat.

BARMANOU a écrit:Quant à l’histoire, je maintiens qu’il ne se passe rien de sensationnel. Juste une banale chronique d’un personnage anachronique sans reliefs particuliers, voulant rester enfant dans un monde utopique qu’elle se construit à coups de plaisirs altruistes. C’est peu et à la fois beaucoup. Même pour cinq minutes à la sortie du film, en ce qui me concerne, j’ai été transporté "ailleurs" l’espace d’un instant. Rien que pour cela, j’ai aimé Amélie Poulain. Nous sommes tous des enfants. :o


À l'évidence certains sont plus des enfants que d'autres. Je te retourne ce que tu écris plus haut au sujet de ta dernière phrase ("nous sommes tous des enfants"): "déformation issue d’une société qui a pris l’habitude de nous conditionner dans un moule, un carcan". Si tu maintiens que nous sommes tous des enfants, alors je te ferai souvenir qu'il y a des enfants plus enfants que d'autres, ce que l'on appelle méchamment des "bébés" quand on est soi-même enfant. Nous sommes tous des bébés devant Amélie Poulain, ça marche encore?

Je pense à Nietzsche pour conclure. En 1879, lorsqu'il se rend compte que certaines musiques italiennes faciles et sentimentales lui font de l'effet, Nietzsche met cet effet sur le compte d'une sorte de nostalgie préoedipienne: "Quand nous étions encore enfants, nous avons pour la première fois goûté au miel vierge de bien des choses; jamais plus le miel ne fut aussi bon qu'alors, où il nous conviait aux séductions de la vie."

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Messagede von Rauffenstein le 25 Déc 2003, 19:08

Juste une question Silver. Ce film, il a eu du succès à l'international ?
Le fascisme au fait, c'était pas déjà l'histoire d'un mec en marche qui fascinait les foules avec son culte de la personnalité ?
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Messagede Silverwitch le 25 Déc 2003, 19:16

von Rauffenstein a écrit:Juste une question Silver. Ce film, il a eu du succès à l'international ?


Von Rauffenstein,

Oui. Le film est même certainement l'un des plus gros succès du cinéma en langue française. Le film a rapporté 33 millions de dollars au box-office américain (budget du film environ 12millions de dollars), 5 millions de livres en Grande-Bretagne, 8,5 millions d'euros en Italie, 8 millions d'euros en Espagne, etc...

En termes d'entrées: 8 millions d'entrées en France, 3 millions aux USA, 1 million en Grande-Bretagne, 3 millions en Allemagne, 1,5 millions en Italie, 1,5 millions au Japon, 1,8 millions en Espagne...

C'est vraiment un très très gros succès en salles.

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Messagede von Rauffenstein le 25 Déc 2003, 19:40

silverwitch a écrit:
von Rauffenstein a écrit:Juste une question Silver. Ce film, il a eu du succès à l'international ?


Von Rauffenstein,

Oui. Le film est même certainement l'un des plus gros succès du cinéma en langue française. Le film a rapporté 33 millions de dollars au box-office américain (budget du film environ 12millions de dollars), 5 millions de livres en Grande-Bretagne, 8,5 millions d'euros en Italie, 8 millions d'euros en Espagne, etc...

En termes d'entrées: 8 millions d'entrées en France, 3 millions aux USA, 1 million en Grande-Bretagne, 3 millions en Allemagne, 1,5 millions en Italie, 1,5 millions au Japon, 1,8 millions en Espagne...

C'est vraiment un très très gros succès en salles.

Silverwitch
Merci. Je ne savais pas ce que ça avait donné en dehors de la sphère culturelle francophone. Au delà de l'intérêt cinématographique de l'oeuvre, n'y a t-il pas aussi un intérêt politique et culturel à faire des films à succès mondial en France, même s'il ne sont pas bons (quoiqu'il m'avait semblé que ce film avait le mérite d'être monté au moins correctement, c'est à dire avec une certaine logique, par rapport à des espèces de "trucs" genre compagnie des loups ou Vidocq qui sont des ersatz de films d'action hollywoodien, des produits totalement ratés et bancals par rapport à leurs homologues américains) ?

Je me suis promené sur la téloche ces jours derniers et j'ai été sidéré de voir à quel point la télé française, généraliste et cable (j'ai toutes les chaines en ce moment, offertes par Noos) est envahie par la culture US, films et séries. C'en est même effrayant.

Alors peut-être que c'est pas très bon, Amélie Poulain. Peut-être. Mais ça a le mérite d'exister aussi ailleurs que dans les salles et leur relais français, la télé/vidéo.

Il m semble que c'est important. Important pour faire vivre aussi tout un tas de gens autour de ce genre de succès. Des techniciens, des scénaristes, des acteurs, des réalisateurs et des producteurs. Des indépendants aussi qui peuvent ensuite surfer sur le "made in France" créé par ce genre de succès.

Tu pourras toujours rétorquer que ce genre de succès étouffe les indépendants par exemple... Mais je me demande même s'il y aurait des indépendants s'il n'y avait pas de cinéma français à succès.

Parce qu'en Europe, à part la France, qu'est-ce qui existe comme industrie du cinéma ? Les Italiens, ils en sont où ? Et les Allemands ? et même les Anglais ?

Et puis c'est une question de lutte d'influence culturelle aussi. Il y a peut-être des films d'indépendants très bien en France, mais que peu de personnes iront voir. C'est important d'opposer une Amélie Poulain à un Van Damme, nullissime (j'ai vu un bout de Cyborg, c'est affligeant :eek: ), mais que l'on va distribuer mondialement et qui donc va gagner de l'argent, une notoriété et une crédibilité au niveau financier.
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Messagede Silverwitch le 25 Déc 2003, 20:14

von Rauffenstein a écrit:Merci. Je ne savais pas ce que ça avait donné en dehors de la sphère culturelle francophone. Au delà de l'intérêt cinématographique de l'oeuvre, n'y a t-il pas aussi un intérêt politique et culturel à faire des films à succès mondial en France, même s'il ne sont pas bons (quoiqu'il m'avait semblé que ce film avait le mérite d'être monté au moins correctement, c'est à dire avec une certaine logique, par rapport à des espèces de "trucs" genre compagnie des loups ou Vidocq qui sont des ersatz de films d'action hollywoodien, des produits totalement ratés et bancals par rapport à leurs homologues américains) ?


Oui absolument. Là c'est un autre débat. Si je me situe sur le plan de la critique, je suis sévère concernant le film de Jeunet. Qu'il y ait un intérêt culturel, politique, social et économique a ce que le cinéma français s'exporte et donc rayonne sur une certaine sphère d'influence est essentiel pour le cinéma français. Quoi qu'on pense du film, c'est un projet viable et qui a été murement réfléchi.

von Rauffenstein a écrit:Je me suis promené sur la téloche ces jours derniers et j'ai été sidéré de voir à quel point la télé française, généraliste et cable (j'ai toutes les chaines en ce moment, offertes par Noos) est envahie par la culture US, films et séries. C'en est même effrayant.

Alors peut-être que c'est pas très bon, Amélie Poulain. Peut-être. Mais ça a le mérite d'exister aussi ailleurs que dans les salles et leur relais français, la télé/vidéo.


Oui je comprends. Mais là c'est un autre problème. Peux-tu conclure avec certitude que c'est parce que l'offre française est inadaptée au marché que la télévision diffuse autant de produits américains? Je crois qu'hélas c'est un rapport plus complexe, lié à la fois à un effet de mode et surtout à une compétition économique féroce. Les américains ont bien compris comment cibler les télévisions. Ils offrent des produits (séries, films, concepts d'émissions) déjà archi rentabilisés, donc vendus pour une somme dérisoire.

C'est une stratégie commerciale. La France ne peut se permettre d'entrer dans ce jeu pour une raison simple: il s'agit du marché sur lequel justement les productions espèrent rentabiliser leur produit. Le marché américain étant plus difficile à pénétrer, le cercle est vicieux. Parce que je ne crois pas que l'offre soit inadaptée. Mais la logique économique est très forte. Et aujourd'hui que font les productions télé pour réagir? Ils diminuent les prix de revient. Un exemple simple, prenons une boîte de prod privée qui veut proposer un programme pas cher, ils achètent un concept et un programme aux USA, le font doubler en français, enregistrent un plateau en studio avec une animatrice et ensuite diffusent le tout. Ce n'est pas cher et on importe les méthodes américaines pour mieux rentabiliser le produit vendu: jeu pendant l'émission d'une simplicité frisant tellement la débilité que le seul intérêt est de faire appeler le plus de gens possibles pour gagner de l'argent, faux best-of de l'émission précédente (on rediffuse une partie de l'émission précédente, évidemment aucun public n'a voté pour un programme favori, mais on fait comme si, tout est monté à l'avance).

Pour l'export, je ne crois pas que l'on peut tirer des modèles du succès d'Amélie Poulain à l'étranger. Il s'agit d'une rencontre heureuse, bien dans l'air du temps, et surtout donnant une image particulièrement simple de la France et conforme à une vision prédigérée.

von Rauffenstein a écrit:Il m semble que c'est important. Important pour faire vivre aussi tout un tas de gens autour de ce genre de succès. Des techniciens, des scénaristes, des acteurs, des réalisateurs et des producteurs. Des indépendants aussi qui peuvent ensuite surfer sur le "made in France" créé par ce genre de succès.

Tu pourras toujours rétorquer que ce genre de succès étouffe les indépendants par exemple... Mais je me demande même s'il y aurait des indépendants s'il n'y avait pas de cinéma français à succès.


Là aussi c'est assez complexe. Disons qu'en théorie, le cinéma français a surtout besoin d'un public nombreux dans les salles. Peu importe presque que le public regarde un film français ou américain. Le système du CNC prélève une taxe sur toutes les entrées. Donc un succès comme Titanic rapporte près de 100 millions de francs qui seront réinjectés dans le cinéma français.

Pour faire une parenthèse liée au sujet, je ne comprends pas trop pourquoi on m'assimile à une défense des pauvres indépendants. Je ne suis pas concernée directement par le cinéma français puisque je ne travaille pas sur des projets français mais sur des projets américains (hollywoodiens le plus souvent d'ailleurs). Je ne cherche pas du tout à défendre une parcellisation de films de plus en plus petits, moi je crois à un cinéma de qualité qui attire un public très large. C'est ainsi que le cinéma rayonne culturellement et remplit au mieux pour moi sa mission, c'est d'ailleurs un point de vue personnel et qui n'exclut pas des films plus petits, au contraire.

Mais je crois que le système est allé beaucoup trop loin et se transforme en une machine folle conformiste et uniformisante et c'est ça qui tue les possibilités de création cinématographique à moyen terme. Le cinéma hollywoodien n'a jamais été aussi médiocre et détruit tout sur son passage.

von Rauffenstein a écrit:Parce qu'en Europe, à part la France, qu'est-ce qui existe comme industrie du cinéma ? Les Italiens, ils en sont où ? Et les Allemands ? et même les Anglais ?

Et puis c'est une question de lutte d'influence culturelle aussi. Il y a peut-être des films d'indépendants très bien en France, mais que peu de personnes iront voir. C'est important d'opposer une Amélie Poulain à un Van Damme, nullissime (j'ai vu un bout de Cyborg, c'est affligeant :eek: ), mais que l'on va distribuer mondialement et qui donc va gagner de l'argent, une notoriété et une crédibilité au niveau financier.


À part la France la situation du cinéma national en Europe est assez médiocre, pour ne pas dire catastrophique. Le cinéma allemand est plus que mort, le cinéma italien est moribond (même s'il fait toujours un peu illusion économiquement sur son marché), le cinéma anglais est d'une médiocrité rare, etc...Reste le cinéma espagnol qui adopte une politique assez dynamique depuis dix ans et qui se traduit par un cinéma vivant (bon en terme de qualité c'est assez peu probant).

Le cinéma français reste donc une valeur assez forte, mais la crise est profonde. L'explosion du DVD (qui ne rapporte pas assez au cinéma), des télévisions privées, du vidéo-club, et la crise de canal plus (que ne relayent pas correctement TPS ou d'autres acteurs) mettent en danger la viabilité du modèle économique. Le risque à court terme (en France comme aux USA) c'est justement une augmentation drastique de la faille entre les gros et les petits films. Qui subit la crise? Les films de taille moyenne. On continuera toujours de faire d'énormes films ou de touts petits films (pas chers à produire et rentabilisés vers un public très restreint, regarde les rayons gay et lesbiens de la fnac, c'est dingue!). Et ce sont les films qui prennent des risques mais s'adressent à un public large qui en subissent les conséquences. Alors pour un succès comme Le Pianiste de Roman Polanski, le reste est très difficile. Il suffit de voir les difficultés que rencontrent des cinéastes comme Rappeneau en France ou Forman aux USA, alors qu'ils font un cinéma ouvert, pas particulièrement hermétique. C'est là qu'est le problème et l'enjeu immédiat du cinéma, qu'il soit français ou hollywoodien.

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Messagede BARMANOU le 25 Déc 2003, 22:21

silverwitch a écrit:
BARMANOU a écrit:Je me permets de m’ "autoquoter" sur Amélie Poulain. Car c’est vraiment ce que je pense de ce film.


silverwitch a écrit:Moi j'étais toute prête déjà à te croire sur parole la première fois.


Diable ! je te crois sur parole moi aussi même si je répondais à $hunt. Ce qui pourrait excuser mon absence d’anticipation concernant ton éventuelle approbation. :wink:

BARMANOU a écrit: Je suis stupéfaits de lire les interprétations "libres" de certains qu’ils brandissent comme étant LA vérité du film ou tout au moins ce que Jeunet voulait faire passer aux spectateurs. Sauf votre respect, personne à part Jeunet, ne peut se targuer de connaître exactement quelles étaient les intentions réelles de l’auteur, si volonté de faire passer une idée forte (et subversive ? :eek: ) il y avait. Ce que je doute profondément. :roll:


silverwitch a écrit:Sauf ton respect Barmanou, tu confonds ici l'intention de l'auteur et le sens du film. Le "voici ce que j'ai voulu faire" d'un cinéaste n'intéresse que les fans ou les biographes. Jeunet aurait-il juré qu'il avait réalisé un western avec Amélie Poulain, cela n'eût rien changé au film lui-même. Une fois envoyée dans l'espace public, littéralement mise au monde, l'oeuvre est un artefact qui encourt l'évaluation pour lui-même. Contrairement donc à l'affirmation indigente de Luc Besson pour qui le film est un "objet gentil", un "bébé conçu par amour". Ce qui est d'ailleurs amusant en parlant du film dont nous discutons ici, parce que ce culte de l'intentio auctoris convient à la logique publicitaire qui veut que les personnes soient ce à quoi elles ressemblent. Serge Daney écrivait à la sortie du Grand Bleu que Luc Besson apparemment, sait une fois pour toutes à quoi ressemble une femme, un Péruvien ou un Italien, s'il avait vécu assez longtemps pour voir Amélie Poulain, il aurait pu dire que Jean-Pierre Jeunet lui aussi sait une fois pour toutes à quoi ressemble une concierge, un épicier et Paris, comme ses personnages savent une fois pour toutes ce qu'ils aiment et ce qu'ils n'aiment pas.


C’est amusant. J’aime beaucoup l’affirmation prudente de Daney concernant Besson ou Jeuney. Pour les personnages, c’est une autre histoire. Savons-nous exactement ce qu’ils aiment et ce qu’ils n’aiment pas ? En ce qui me concerne, non. Et ce n’est pas de la fausse modestie. Pour m’en persuader, il me suffit de discuter avec mes homologues spectateurs qui ont vu le même film que moi. A de rares exceptions, il est très difficile de trouver un consensus sur les sentiments ressentis à partir du jeu de scène des personnages. Pour Amélie Poulain, l’intention de l’auteur m’échappe totalement. Et n’est absolument pas une obsession. Tout comme le sens réel présumé du film, tout simplement parce que je ne suis pas certain de l’adéquation entre mon propre ressenti à partir des personnages et ce que l’auteur aurait voulu laisser percevoir de ses prétendues intentions derrière le paravent du jeu d’acteurs. Il est vrai que jouer les devins dans ce cas précis est un exercice de très haute voltige. :eek:

silverwitch a écrit:Donc si je suis prête à t'accorder que connaître l'intention de Jeunet n'est pas aisée, le sens du film et sa cohésion interne est plus facile à examiner. J'y reviendrai ensuite pour montrer que ta vision du film Amélie Poulain passe à côté du sens du film pour y substituer ta propre rêverie. Mais par exemple: au cinéma Amélie adore voir ce que les autres spectateurs ne voient pas, ainsi cette mouche qui avance de gauche à droite dans un plan de Jules et Jim. Cependant, le film commence par une mouche écrasée; en outre, il est extrèmement retravaillé (retouche numérique), de manière que des accidents typiques de l'image-trace, comme celui de la mouche dans le film de Truffaut, n'ont que fort peu de chances de s'y produire. Dans l'économie narrative comme dans le processus de fabrication, l'énonciateur se livre donc à une sorte de guerre à la mouche, tandis que l'héroïne, autour de qui le film entend pourtant s'articuler, adore l'imprévisibilité de ces petites bêtes: absence de cohésion. Bon reste alors une interprétation différente qui comprend pourtant également le sens du film: je suis en présence d'un clin d'oeil à Men in Black qui s'ouvre également avec un insecte écrasé.


Mais bien entendu que je revendique haut et fort que ma vision d’Amélie Poulain soit issue de ma propre rêverie. :-P Si tu n’as pas saisi ce point fondamentale dans ce que j’ai développé un peu plus tôt sur ce film, je comprends aisément que tu puisses passer à coté du concept de la libre interprétation sur un tel film qui n’a rien de transcendant à la base d’un point de vue "profane". Maintenant, tu me parles d’une mouche qui aurait donc une signification hautement symbolique. :eek: Je te le dis clairement que ce clin d’œil m’a totalement échappé. Pire, cet insecte possédant donc un pouvoir présumé imprévisible et attractif pour l’héroïne, m’a laissé de marbre. Ce qui ne m’a pas empêché d’avoir eu mes cinq minutes de totale évasion à la sortie du film. Ce qui ne m’a pas empêché d’apprécier ce film derrière une cohérence qui n’est peut être pas celle que l’auteur a réellement voulu donner à son œuvre. Est-ce vraiment la pierre angulaire d’Amélie Poulain ? Je ne le crois pas. Car combien de spectateurs, dans son succès planétaire, ont perçu dans ce film le clin d’œil de cette Musca domestica ? Je ne crois pas beaucoup me tromper en avançant très peu. Ce qui, de toute évidence, n’a pas constitué un blocage fondamental à l’appréciation d’Amélie Poulain. Par conséquent, la "magie" du film se trouve certainement ailleurs. :roll:

silverwitch a écrit:Quant à l'intention de l'auteur pour sortir un dernier lapin de mon chapeau, tu serais sans doute surpris Barmanou. J'ai rencontré Jeunet en janvier 99 et il préparait ce qui allait devenir Amélie Poulain. Son propos de coauteur (puisqu'il n'est pas scénariste du film, c'est le travail qu'a effectué Guillaume Laurant) était assez différent: il s'agissait d'un film assez sombre parcouru par l'ironie et dont la fin heureuse (en forme de conte de fée) illumine rétrospectivement le chemin parcouru. En gros, l'amour sauve une personne. Depuis le projet avait évolué (il venait de renoncer à engager Emily Watson pour le rôle principal).


Tu as rencontré Jeunet ? Diable. Veinarde ! :D C’est à la fois une grande chance mais cela t’a aussi sans doute couper tes élans lorsque tu as visionné le film, puisque la révélation de ce que devait être le scénario t’avait été faite auparavant. Dommage. L’œil conditionné provoque sans doute des réflexes critiques qui bannissent la forme (conte de fée) au profit d’un fond dont tu aurais été en quelque sorte la victime principale d’un délit d’initié. Adieu la rêverie. Bonjour l’ironie et le relief sombre du film. Tiens, cela me rappel, toute proportions gardées, les nombreux critiques de cinéma qui se plantent lamentablement dans leurs jugements empiriques en ne prenant pas assez de recul par rapport aux profanes qui représente 80% du spectateur "moyen". Combien de films jugés catastrophiques suivant des critères d’initiés ont fait des millions d’entrées? Combien de films jugés fabuleux suivant les mêmes critères ont fait des "bides" monstrueux ? Il y a matière à s’interroger… :o

BARMANOU a écrit:De la rêverie. De l’humour. De la légèreté et de la tendresse. Et de l’originalité. Voilà pèle mêle tout au plus ce que l’on peut relever objectivement de ce film. Même si certains contesteront ce caractère "objectif", j’ose me l’approprier à mon échelle de subjectivité :-P . Maintenant, chercher obligatoirement une interprétation idéologique dans la trame, cela relève de l’exploit personnel et de la déformation issue d’une société qui a pris l’habitude de nous conditionner dans un moule, un carcan, dont les valeurs matérialistes et les clichés sociaux nous précipitent dans un univers unidimensionnel avec comme centres d’intérêts, toujours les mêmes repères.


silverwitch a écrit:Qu'est-ce qui est original dans Amélie Poulain? Qu'est-ce qui est léger et tendre? Je commence à croire que tu n'as pas vu correctement le film de Jeunet dont pourtant la charge n'est justement pas tendre: la révélation d'Amélie qui entend l'accident mortel de Lady Diana à la télévision est un moment particulièrement méchant et surtout le film corrige cette rêverie: le couple que fait se rencontrer Amélie (la buraliste et le client bougon) après une brève idylle se séparent, et surtout Barmanou le film pour faire sens prend bien garde de mettre en garde Amélie et le spectateur. Souviens toi du discours que lui tient le peintre! Pour le reste, si tu parles d'interprétation idéologique, le plus simple serait bien évidemment que tu montres ce qui dans le film contredit telle ou telle vision.


Qu’est-ce voir correctement un film ? Est-ce être privilégié comme Silverwitch et rencontrer un des co-auteurs avant la sortie qui nous explique le synopsis avant tout le monde, ce qui nous conditionne pour regarder le film ? Est-ce cela regarder correctement un film ? Diable… Alors oui, je préfère être un profane et passer totalement à coté de la signification d’une mouche ou de la méchanceté présumée de la révélation de l’accident de Lady Diana. :lol: Rêverie. Humour. Légèreté. Tendresse. Originalité. Ah, que cela sonne bien à mes oreilles et que cela sied bien à mon Amélie Poulain ! :good

BARMANOU a écrit:Que l’on aime ou pas le film, c’est tout à fait légitime. Une œuvre ne fait jamais l’unanimité. Et c’est tant mieux. Car dans le domaine du sensible, nous sommes tous différents.


silverwitch a écrit:C'est un truisme.


Encore faut-il toujours l’avoir à l’esprit.

BARMANOU a écrit: Et justement, le point fort du film de Jeunet est de nous renvoyer à notre propre sensibilité dissimulée sous notre carapace d’adulte, celle de notre jeunesse depuis trop longtemps cachée. L’altruisme, le plaisir de faire plaisir. Utopiques, certes. Mais c’est ce que j’ai retenu de ce film, à mon échelle de sensibilité. D’autres auront retenu les couleurs, l’ambiance le rythme, les dialogues ou la musique, plus ou moins positivement suivant les critères d’exigences propres à chacun.


silverwitch a écrit:C'est je crois une vision assez superficielle du film. Puisque justement des éléments du récit montrent que le personnage d'Amélie n'est pas heureux justement et qu'elle ne fait pas réellement le plaisir des gens autour d'elle (en tout cas pas toujours). Et que pour faire plaisir à certains, elle n'hésite pas à faire souffrir d'autres personnages qui eux sont présentés (avec humour, tendresse et rêverie??) à la moquerie du spectateur comme l'épicier Colignon accusé de tous les maux: il terrorise un pauvre employé un peu benêt! Quel méchant homme. Tu es dans ce cas précis uniquement dans le jugement de goût, c'est ton droit en effet. Mais que tu te serves de ta subjectivité pour imposer que seul un jugement de goût subjectif serait le "bon" jugement, c'est un peu plus délicat.


Tu crois ou tu en es certaine ? Plutôt la deuxième solution hein ? Quel est le bon jugement de ce film ? Celui qui appartient au savoir de l’initié ? Ou celui qui appartient à la sensibilité du spectateur lambda ? Qui est visé dans ce film ? Le privilégié ou l’homo "cinéphillus" (attention pas phallus hein ! :D ) vierge de tout préjugés et qui découvre avec des yeux émerveillés l’univers particulier de ce film ? Le jugement de goût est-il l’esclave du savoir "objectif" concernant une œuvre cinématographique ? Je te pose la question. Combien de personnes ont vu Amélie Poulain avec une interprétation totalement différente de ma modeste personne et située à des années lumières de la tienne, puisque elles n’avaient pas eu la chance insigne d’en connaître les arcanes ? Finalement, ce que l’on peut dire pour Jeunet et dans la mécanique du succès d’Amélie Poulain, jouer sur une gamme infinie d’interprétations superficielles aura été de très bon aloi. 8)

BARMANOU a écrit:Quant à l’histoire, je maintiens qu’il ne se passe rien de sensationnel. Juste une banale chronique d’un personnage anachronique sans reliefs particuliers, voulant rester enfant dans un monde utopique qu’elle se construit à coups de plaisirs altruistes. C’est peu et à la fois beaucoup. Même pour cinq minutes à la sortie du film, en ce qui me concerne, j’ai été transporté "ailleurs" l’espace d’un instant. Rien que pour cela, j’ai aimé Amélie Poulain. Nous sommes tous des enfants. :o


silverwitch a écrit:À l'évidence certains sont plus des enfants que d'autres. Je te retourne ce que tu écris plus haut au sujet de ta dernière phrase ("nous sommes tous des enfants"): "déformation issue d’une société qui a pris l’habitude de nous conditionner dans un moule, un carcan". Si tu maintiens que nous sommes tous des enfants, alors je te ferai souvenir qu'il y a des enfants plus enfants que d'autres, ce que l'on appelle méchamment des "bébés" quand on est soi-même enfant. Nous sommes tous des bébés devant Amélie Poulain, ça marche encore?


Pourquoi pas ? Et il n’y a rien de bien méchant là dedans... :P

silverwitch a écrit:Je pense à Nietzsche pour conclure. En 1879, lorsqu'il se rend compte que certaines musiques italiennes faciles et sentimentales lui font de l'effet, Nietzsche met cet effet sur le compte d'une sorte de nostalgie préoedipienne: "Quand nous étions encore enfants, nous avons pour la première fois goûté au miel vierge de bien des choses; jamais plus le miel ne fut aussi bon qu'alors, où il nous conviait aux séductions de la vie."


Ah, Friedrich ! Tu me gâtes dis ! C’est Noël ! :-P Cela explique tout ou partie de ta vision et donc de ton interprétation déçue de privilégiée du film de Jeunet. Pour ma part, je suis sans doute encore au stade ou je goûte le miel vierge d’Amélie Poulain. :twisted: Attention, je ne suis pas une abeille pour autant . Je devance ici déjà ta prochaine relation bourdonnante avec une mouche envoûtante. :o

Ayrton Senna était un génie, un tyran, généreux, humble ou arrogant sur lequel les opinions ont toujours été partagées. Mais il avait une qualité que nul ne pouvait lui retirer : c'était le pilote de Formule 1 le plus rapide que le monde ait jamais vu.
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Messagede von Rauffenstein le 25 Déc 2003, 23:00

Je voudrais juste revenir sur l'impact du ciné américain sur la télé française. Tu ne crois pas que c'est parce qu'il y a eu progressivement un quasi monopole du ciné américain qu'il y a eu ensuite une synergie avec des produits "dérivés", les séries télés, qui ont ensuite pris pied progressivement dans le paysage audiovisuel des pays "concurents" ? Moi, j'ai l'intuition que oui. et ce n'est pas une question de savoir faire, mais de savoir montrer à la manière de.

Je prends l'exemple du cinéma policier et de son dérivé, la série. Dans les années 50, on avait des séries télés en France genre les 5 dernières minutes qui étaient des séries TV tout à fait dans la lignée culturelle du policier français. Loin du Grand Guignol (c'est à dire du spectacle sanglant, des cadavres et des armes à feu, bien que le Grand Guignol fut un genre populaire apprécié au début du XX° siècle en France), on était dans une toute autre attitude culturelle. Celle de la déduction logique et de la confrontation avec le meurtier mais jamais avec le cadavre ou les forfaits commis. Maigret est aussi dans cette logique culturelle française. C'est le policier violent, à la limite de la loi, du cinéma américain qui a imposé peu à peu sa prédominance culturelle et ensuite a permis à des Starsky et Hutch de concurencer le traditionel Maigret et sa pipe ou les "Brigades du Tigre" à la TV, parce que l'on voulait vivre sur le petit écran ce que l'on voyait sur le grand, ou lui était destiné.

Dans les années 40, le cinéma américain était capable de produire avec succès des films avec de grands acteurs réputés, comme Humphrey Bogart dans le rôle d'un héros qui n'était pas américain (je pense à Passage to Marseille), dans un scénario ne comportant pas un seul américain. C'était le cinéma d'un pays qui était encore tourné vers l'extérieur, était capable d'être séduit par d'autres cultures, d'autres traditions, d'autres histoires.

Aujourd'hui, tout film produit à Hollywood dont le scénario ne comporte pas un héros principal américain, tourne au désastre financier (je pense au fiasco de K19 aux USA). Alors que ces films peuvent recevoir un bon accueil à l'étranger. Les Américains se regardent le nombril. Ce qui compte, c'est d'abord le succès sur le territoire national, pour dire que c'est un "bon film" d'un point de vue industriel. et les séries sont toutes à l'égal de ce point de vue. Elles copient les modes de fonctionnement scénaristioques qui font l'efficacité d'un film. Franchement, c'est vrai que c'est hyper efficace un "Urgences" ou un "NYPD". mais c'est quand même désatreux culturellement pour les pays qui reçoivent ce genre de messages. Comme si d'un seul coup, il n'existait plus rien que les urgences dans les hopitaux de New York ou sa flicaille.

Je crois que, dans des pays comme le notre qui subissent un joug culturel qui peu à peu sépare les nouvelles générations de leur histoire il est important de faire des films qui ont du succès au niveau mondial. Il n'y a qu'à voir les réactions sur le fil du 11 novembre 1918 sur ce salon. Le premier réflexe culturel de beaucoup d'entre nous, a été de se rappeler le 6 juin 1944 et le débarquement "allié", en oubliant les Anglais au passage, en plus tiens ! On a tout simplement oublié ce qu'a été la première guerre mondiale pour un pays comme le notre. Totalement. Sinon des légendes tenaces de sales histoires de méchants officiers et de pauvres poilus entrainés dans un merdier sans nom. Les officiers, jusqu'au grade de Commandant/ Lieutenant colonel, montaient pourtant à l'assaut pistolet au poing et partageaient les mêmes cruautés que leurs soldats. Pour un type comme moi, assez imprégné d'hitoire et de culture française (par culture, j'entends mode de pensée et de fonctionnement), c'est assez sidérant. Parce qu'il y a eu des films comme "Il faut sauver le Soldat Ryan". Et sa suite à la TV, Band of brothers. Mais sur notre histoire, plus rien. Nada. Qui ira voir les "Croix de Bois", "La Grande Illusion" ou lire Genevoix ou Barbusse ?

C'est donc important ce cinéma populaire national à succès, même si c'est de grosses merdes. Pour montrer à soi-même que l'on existe d'abord, avec des spécificités et une culture, un mode de vie et de pensée uniques et ensuite proposer des produist concurents avec leurs qualités et efficacités spécifiques. Redonner envie de vivre à sa façon, à travers son légendaire contemporain. Moi, je crois que c'est le cinoche qui conditionne le comportement culturel d'une population aujourd'hui. Un cinoche avec ses héros que l'on va voir ensuite projetés sur le petit écran via les séries.

Bon voilà quoi.
Le fascisme au fait, c'était pas déjà l'histoire d'un mec en marche qui fascinait les foules avec son culte de la personnalité ?
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Messagede Silverwitch le 26 Déc 2003, 00:16

BARMANOU a écrit:C’est amusant. J’aime beaucoup l’affirmation prudente de Daney concernant Besson ou Jeuney. Pour les personnages, c’est une autre histoire. Savons-nous exactement ce qu’ils aiment et ce qu’ils n’aiment pas ? En ce qui me concerne, non. Et ce n’est pas de la fausse modestie. Pour m’en persuader, il me suffit de discuter avec mes homologues spectateurs qui ont vu le même film que moi. A de rares exceptions, il est très difficile de trouver un consensus sur les sentiments ressentis à partir du jeu de scène des personnages. Pour Amélie Poulain, l’intention de l’auteur m’échappe totalement. Et n’est absolument pas une obsession. Tout comme le sens réel présumé du film, tout simplement parce que je ne suis pas certain de l’adéquation entre mon propre ressenti à partir des personnages et ce que l’auteur aurait voulu laisser percevoir de ses prétendues intentions derrière le paravent du jeu d’acteurs. Il est vrai que jouer les devins dans ce cas précis est un exercice de très haute voltige. :eek:


Je souligne cette phrase de ta réponse Barmanou, car elle illustre assez bien à mes yeux la ligne de partage qui nous sépare. Devant le film tu es plus dans la réflexion ou la comparaison sociologique (et ce n'est pas péjoratif) que dans la critique esthétique. Je crois à la critique, et cela aussi parce que je crois qu'on peut chercher à comprendre ce qu'a voulu dire le film (et non l'auteur). On peut aimer ou ne pas aimer Amélie Poulain pour de nombreuses raisons, cela je te l'accorde, mais l'évaluation du film de Jeunet qui se fonderait sur une mésinterprétation (un contresens) n'est pas une évaluation d'Amélie Poulain, mais d'une autre oeuvre, l'Amélie rêvée par Barmanou.

Il y a deux places de spectateur critique et nous n'occupons à l'évidence pas le même fauteuil. Le premier qui est ému par la signification que le film a pour lui, et le second qui est curieux du sens de ce film et éventuellement de ce que l'auteur a voulu exprimer en faisant oeuvre de création. D'où la dichotomie entre sens et signification. Tu es clairement du côté de la signification quand je me place du côté du sens. C'est un point d'importance. Il n'y a pas de règle de comportement du spectateur, qui est libre de voir un film comme il l'entend ou comme il le ressent. Cependant, au moment de formuler un avis critique, qui s'offre au dialogue et à la controverse, il importe au moins de dialoguer du même film. Si tu m'entretiens d'une Amélie qui n'existe que dans ton imagination, nous ne nous comprendrons pas. Ce constat est aussi lié à la définition que fait Eco du lecteur et que je transpose à la place du spectateur, ici le spectateur modèle et le spectateur empirique. Rien n'empêche le spectateur empirique de voir le film de mille manières, et souvent ce spectateur utilise le film comme projection ou réceptacle de ses propres passions, qui proviennent de l'extérieur du film ou que le film suscite fortuitement en lui. Cette relation esthétique singulière qui se crée entre le spectateur et le film peut être passionnante, elle est en tout cas unique, intime et difficilement communicable. Le critique (professionnel ou non peu importe puisqu'il s'agit avant tout d'activité critique) se doit d'être un spectateur modèle, parce qu'il existe des règles du jeu et qu'il faut les respecter. C'est la promenade dans les bois dans la fiction. Nos bois sont des forêts de films. Le film construit un monde narratif cohérent à l'intérieur duquel nous pouvons évoluer plus ou moins librement; le bois étant un jardin dont les sentiers bifurquent. Quand spectatrice, je me promène dans ce bois, chaque découverte, chaque expérience peut être un enrichissement sur la vie, sur le monde, sur le passé. Il est louable de s'enrichir ainsi. Mais comme le bois n'a pas été crée n'importe comment et pour tout le monde, je ne dois pas y chercher des faits ou des sentiments qui me sont propres et d'ailleurs ne regardent que moi. Sinon en effet ce n'est plus interpréter un film, mais l'utiliser. Il n'est pas interdit d'utiliser un film pour rêver les "yeux grand ouverts". Mais ce n'est pas une activité publique, cela revient à confondre le bois avec notre jardin privé.


BARMANOU a écrit:Mais bien entendu que je revendique haut et fort que ma vision d’Amélie Poulain soit issue de ma propre rêverie. :-P Si tu n’as pas saisi ce point fondamentale dans ce que j’ai développé un peu plus tôt sur ce film, je comprends aisément que tu puisses passer à coté du concept de la libre interprétation sur un tel film qui n’a rien de transcendant à la base d’un point de vue "profane". Maintenant, tu me parles d’une mouche qui aurait donc une signification hautement symbolique. :eek: Je te le dis clairement que ce clin d’œil m’a totalement échappé. Pire, cet insecte possédant donc un pouvoir présumé imprévisible et attractif pour l’héroïne, m’a laissé de marbre. Ce qui ne m’a pas empêché d’avoir eu mes cinq minutes de totale évasion à la sortie du film. Ce qui ne m’a pas empêché d’apprécier ce film derrière une cohérence qui n’est peut être pas celle que l’auteur a réellement voulu donner à son œuvre. Est-ce vraiment la pierre angulaire d’Amélie Poulain ? Je ne le crois pas. Car combien de spectateurs, dans son succès planétaire, ont perçu dans ce film le clin d’œil de cette Musca domestica ? Je ne crois pas beaucoup me tromper en avançant très peu. Ce qui, de toute évidence, n’a pas constitué un blocage fondamental à l’appréciation d’Amélie Poulain. Par conséquent, la "magie" du film se trouve certainement ailleurs. :roll:


C'était un exemple. Je ne te refuse évidemment pas une libre interprétation du film de Jean-Pierre Jeunet, ce que je conteste à la rigueur c'est que ton appréciation du film soit juste. Pour moi critiquer un film c'est ne pas écrire une phrase comme: "Pour moi Amélie Poulain est un bon film, parce que...". Les plus extravagantes raisons d'aimer, à l'abri derrière cette précaution "pour moi" que les linguistes nomment un "embrayeur" seront entendues. Le cinéma d'ailleurs est devenu un médium si répandu, un art si populaire que bien peu rechignent à exposer leurs préférences en la matière, comme le dit la phrase de François Truffaut: "Les français ont deux métiers, le leur et critique de cinéma". Utiliser un embrayeur ("pour moi") revient moins à expertiser un film qu'à parler de soi, à rendre public le plaisir que l'on ressent, bref à raconter sa vie. Hors la précaution de l'embrayeur, les rangs s'éclaircissent; donner son avis ne va plus de soi. L'inconfort social menace: écrire d'un film sur F1-Express qu'il est "mauvais" ou le qualifier de "chef d'oeuvre", c'est afficher une prétention, une volonté de dominer. D'où tire-t-il demanderont les participants, ce pouvoir de dire la vérité?


BARMANOU a écrit:Tu as rencontré Jeunet ? Diable. Veinarde ! :D C’est à la fois une grande chance mais cela t’a aussi sans doute couper tes élans lorsque tu as visionné le film, puisque la révélation de ce que devait être le scénario t’avait été faite auparavant. Dommage. L’œil conditionné provoque sans doute des réflexes critiques qui bannissent la forme (conte de fée) au profit d’un fond dont tu aurais été en quelque sorte la victime principale d’un délit d’initié. Adieu la rêverie. Bonjour l’ironie et le relief sombre du film. Tiens, cela me rappel, toute proportions gardées, les nombreux critiques de cinéma qui se plantent lamentablement dans leurs jugements empiriques en ne prenant pas assez de recul par rapport aux profanes qui représente 80% du spectateur "moyen". Combien de films jugés catastrophiques suivant des critères d’initiés ont fait des millions d’entrées? Combien de films jugés fabuleux suivant les mêmes critères ont fait des "bides" monstrueux ? Il y a matière à s’interroger… :o


Il ne s'agit pas de chance ou de conditionnement. C'est simplement mon travail puisque je vis du cinéma. Comme il est aussi de mon travail de savoir appréhender la forme et le fond, en tant qu'éléments indissociables. Tu poses ensuite l'écart entre une certaine critique de cinéma et les goûts du public. Mais tu ne réponds pas à la question de savoir ce qu'un succès ou un insuccès public nous apprendrait sur le film en question. Pourquoi serait-ce le critique qui se plante plus que le public? À cause du nombre? Il y a souvent un point commun me diras-tu, pas plus la critique que le public n'exposent les critères dont il se servent pour juger un film. Mais succès ou l'insuccès public n'est en rien un critère. Il est certain qu'un film érotique comme Emmanuelle a attiré plus de spectateurs sur Paris que 2001 de Stanley Kubrick. Un spectateur critique n'en aura évidemment pas cure: on ne va pas forcément voir un film avec le dessein de le critiquer ni avec celui de l'officialiser, par le sacrement du ticket, une valeur qu'on lui prête à priori sur la foi du bouche à oreille, de la campagne publicitaire et marketing et des précédents films de son auteur. On peut y aller pour la plastique d'un acteur, pour se changer les idées, tuer le temps, se réchauffer, rester assis sans bouger à côté de quelqu'un qu'on aime ou pour pouvoir en parler samedi soir puisque tout le monde l'aura vu. C'est ce qui se passe la plupart du temps et toutes ces raisons sont d'ailleurs légitimes. Il ne faut donc pas oublier Barmanou que le spectateur qui achète son ticket, le fait généralement sans avoir vu le film. Une entrée ne donne donc pas un avis, ni même une addition d'avis.

BARMANOU a écrit:
silverwitch a écrit:Qu'est-ce qui est original dans Amélie Poulain? Qu'est-ce qui est léger et tendre? Je commence à croire que tu n'as pas vu correctement le film de Jeunet dont pourtant la charge n'est justement pas tendre: la révélation d'Amélie qui entend l'accident mortel de Lady Diana à la télévision est un moment particulièrement méchant et surtout le film corrige cette rêverie: le couple que fait se rencontrer Amélie (la buraliste et le client bougon) après une brève idylle se séparent, et surtout Barmanou le film pour faire sens prend bien garde de mettre en garde Amélie et le spectateur. Souviens toi du discours que lui tient le peintre! Pour le reste, si tu parles d'interprétation idéologique, le plus simple serait bien évidemment que tu montres ce qui dans le film contredit telle ou telle vision.


Qu’est-ce voir correctement un film ? Est-ce être privilégié comme Silverwitch et rencontrer un des co-auteurs avant la sortie qui nous explique le synopsis avant tout le monde, ce qui nous conditionne pour regarder le film ? Est-ce cela regarder correctement un film ? Diable… Alors oui, je préfère être un profane et passer totalement à coté de la signification d’une mouche ou de la méchanceté présumée de la révélation de l’accident de Lady Diana. :lol: Rêverie. Humour. Légèreté. Tendresse. Originalité. Ah, que cela sonne bien à mes oreilles et que cela sied bien à mon Amélie Poulain ! :good


Que sais-tu d'un éventuel conditionnement? D'une conversation deux ans et demi avant la sortie du film? Ce serait plus une forme de discrédit jeté non pas sur mon discours mais sur la personne qui l'émet. Alors évidemment chaque spectateur occidental de In the Mood for Love peut trouver furieusement poétique de descendre acheter une soupe de nouilles à la gargote la plus proche dans un pot de camp, l'image aidant évidemment, quasi onirisme, le ralenti et la jolie valse...Alors qu'il s'agit du geste le plus ordinaire qui soit dans le contexte spatio-temporel du récit. On voit ici le tue-l'amour cinéphilique s'il se fût agi d'aller chercher un jambon-beurre au zinc du coin. La force du film de Jeunet ici c'est l'enrobage poético-romantique de la banalité la plus consternante. Nul poésie, nul rêve, nulle originalité mais un bel emballage.

Je laisse également ma précédente réponse qui pose des questions directes sur le film ou plus exactement sur ton appréciation du film et qui appellent une réponse.



BARMANOU a écrit:Tu crois ou tu en es certaine ? Plutôt la deuxième solution hein ? Quel est le bon jugement de ce film ? Celui qui appartient au savoir de l’initié ? Ou celui qui appartient à la sensibilité du spectateur lambda ? Qui est visé dans ce film ? Le privilégié ou l’homo "cinéphillus" (attention pas phallus hein ! :D ) vierge de tout préjugés et qui découvre avec des yeux émerveillés l’univers particulier de ce film ? Le jugement de goût est-il l’esclave du savoir "objectif" concernant une œuvre cinématographique ? Je te pose la question. Combien de personnes ont vu Amélie Poulain avec une interprétation totalement différente de ma modeste personne et située à des années lumières de la tienne, puisque elles n’avaient pas eu la chance insigne d’en connaître les arcanes ? Finalement, ce que l’on peut dire pour Jeunet et dans la mécanique du succès d’Amélie Poulain, jouer sur une gamme infinie d’interprétations superficielles aura été de très bon aloi. 8)


Non Barmanou, je n'en suis pas certaine. Je ne vais pas commencer un long discours sur ce qu'est la critique et le jugement esthétique. Attention aux confusions, un film ne se critique pas uniquement s'il touche une éventuelle cible visée. Le jugement critique tend vers l'objectivité, la seule question qui vaut la peine d'être posée est: "comment prouver qu'un film est bon".

BARMANOU a écrit:
silverwitch a écrit:Je pense à Nietzsche pour conclure. En 1879, lorsqu'il se rend compte que certaines musiques italiennes faciles et sentimentales lui font de l'effet, Nietzsche met cet effet sur le compte d'une sorte de nostalgie préoedipienne: "Quand nous étions encore enfants, nous avons pour la première fois goûté au miel vierge de bien des choses; jamais plus le miel ne fut aussi bon qu'alors, où il nous conviait aux séductions de la vie."


Ah, Friedrich ! Tu me gâtes dis ! C’est Noël ! :-P Cela explique tout ou partie de ta vision et donc de ton interprétation déçue de privilégiée du film de Jeunet. Pour ma part, je suis sans doute encore au stade ou je goûte le miel vierge d’Amélie Poulain. :twisted: Attention, je ne suis pas une abeille pour autant . Je devance ici déjà ta prochaine relation bourdonnante avec une mouche envoûtante. :o


:D

Je ne considère pas être privilégiée, sinon dans le sens que je connais le médium cinéma puisqu'il s'agit de mon domaine d'activité professionnel. J'apprécie beaucoup l'élégance avec laquelle tu réponds à la citation de Nietzsche (qui était bien un petit cadeau que je te faisais), mais conserve là tout de même à l'esprit. Je ne crois pas que tu sois un enfant devant Amélie Poulain. Que tu en aies la nostalgie me paraît déjà plus probable. Mais je n'imposerai pas cette hypothèse, puisque je ne te connais pas. Tu as peut-être réellement douze ans!

Joyeux Noël,

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Messagede Silverwitch le 26 Déc 2003, 00:33

von Rauffenstein a écrit:Je voudrais juste revenir sur l'impact du ciné américain sur la télé française. Tu ne crois pas que c'est parce qu'il y a eu progressivement un quasi monopole du ciné américain qu'il y a eu ensuite une synergie avec des produits "dérivés", les séries télés, qui ont ensuite pris pied progressivement dans le paysage audiovisuel des pays "concurents" ? Moi, j'ai l'intuition que oui. et ce n'est pas une question de savoir faire, mais de savoir montrer à la manière de.


Oui absolument. Le cinéma fait partie de la culture et la culture a aussi le sens du lien social entre les individus, une culture commune. La France signifie quelque chose parce que les français ont une culture commune. Alors évidemment qu'on le veuille ou non, un film ou une série impose clairement ou insidieusement un autre point de vue et même une idéologie de la fiction comme tu le montres après avec un exemple très bien vu de la typologie du film policier. Je suis d'ailleurs bien contente de ton propos parce qu'il rejoint finalement ce que j'exprime depuis longtemps. Les mauvais films ne sont pas anodins et ils contribuent à lier ou délier l'individu et le corps social. Ce-faisant ils ont une certaine responsabilité.


von Rauffenstein a écrit:Aujourd'hui, tout film produit à Hollywood dont le scénario ne comporte pas un héros principal américain, tourne au désastre financier (je pense au fiasco de K19 aux USA). Alors que ces films peuvent recevoir un bon accueil à l'étranger. Les Américains se regardent le nombril. Ce qui compte, c'est d'abord le succès sur le territoire national, pour dire que c'est un "bon film" d'un point de vue industriel. et les séries sont toutes à l'égal de ce point de vue. Elles copient les modes de fonctionnement scénaristioques qui font l'efficacité d'un film. Franchement, c'est vrai que c'est hyper efficace un "Urgences" ou un "NYPD". mais c'est quand même désatreux culturellement pour les pays qui reçoivent ce genre de messages. Comme si d'un seul coup, il n'existait plus rien que les urgences dans les hopitaux de New York ou sa flicaille.


Je suis largement avec toi sur le plan sociologique et politique. Ton analyse me paraît évidemment juste. Simplement je regrette que tu ne mettes pas l'accent sur la valeur de ce qui est montré. Je crois que ce n'est pas une simple question d'efficacité ou d'uniformité nationale qui pose problème, c'est une uniformisation esthétique et culturelle, qui prive le monde de l'enrichissement culturel de la diversité des regards. C'est parce qu'on impose petit à petit un regard unique et médiocre.


von Rauffenstein a écrit:C'est donc important ce cinéma populaire national à succès, même si c'est de grosses merdes. Pour montrer à soi-même que l'on existe d'abord, avec des spécificités et une culture, un mode de vie et de pensée uniques et ensuite proposer des produist concurents avec leurs qualités et efficacités spécifiques. Redonner envie de vivre à sa façon, à travers son légendaire contemporain. Moi, je crois que c'est le cinoche qui conditionne le comportement culturel d'une population aujourd'hui. Un cinoche avec ses héros que l'on va voir ensuite projetés sur le petit écran via les séries.

Bon voilà quoi.


D'accord avec toi, sauf que j'y mets un bémol. Le rôle de la culture est double: elle relie les gens mais elle concerne aussi l'être humain à titre individuel et singulier. Un film n'est pas là que pour renforcer notre lien social, il nous apprend à nous individus uniques quelque chose sur le monde, il nous apprend à regarder, à écouter, à vivre, à mieux voir la réalité par le biais d'une histoire projetée sur l'écran. Je ne crois pas que l'on puisse séparer les deux acceptations du mot culture. Parce que les mauvais films à succès français sécrètent finalement une même uniformisation culturelle que les mauvais films hollywoodiens.

Par contre, je t'appuie mille fois pour espérer que la France se penche un peu plus sur son passé, que ce soit la Grande Guerre ou la Révolution Française, ou des épisodes beaucoup plus récents de l'histoire de ce pays. C'est un besoin fondamental. Je ne sais ce que tu en penseras mais Jeunet réalise "Un long dimanche de fiancailles", l'adaptation du roman de Japrisot qui se déroule pendant la guerre de 14/18, justement. J'ai lu le scénario cet été (toujours signé par Guillaume Laurant) et sur le papier c'était assez prometteur. Au vu du budget et des ambitions affichées, peut-être la surprise sera-t-elle bonne? Le film commence notamment par un triple portrait des enfants dans les écoles d'avant la guerre et décrit le discours national, nous entendons donc les chants des petits français à l'école primaire, la même chose pour les enfants allemands, etc...Ensuite dans une seconde séquence nous découvrons nos trois personnages principaux (allemand, français, anglais) et la manière dont ils vivent et apprennent la déclaration de guerre. Je me souviens surtout de l'Allemagne où l'annonce se fait pendant une représentation d'Opéra (la scène est très bien écrite).

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Messagede Neoflo le 26 Déc 2003, 01:12

Absent pour les fetes, je n'ai pas eu le temps de reprendre point par point la suite de cette discussion sur Amélie Poulain, mais heuresement mon avis se rapprochant tres fortement de celui de Barmanou, comme Evelyne, je souhaite le remercier. ;)

Maintenant pour en revenir plus preicsemment au critiques de cinéma, c'est dans la notion meme de critique que le bat blesse, entre un spectateur lambda, comme moi ou d'autres, et une professionnelle comme toi Silverwitch. Pour des raisons que tu as deja longuement, tres longuement ;) , expliqués dans divers topics aussi, tu penses, enfin tu es sure, plutot qu'il existe des criteres definis et précis pour declarer si un film est bon ou pas. C'est ton métier et il est ainsi plutot normal que tu defendes ton beurre. Mais enfin la ou le bat blesse, ou le difference entre critiques et spectateurs apparait flagrante, c'est dans la non-comprehension pour vous professionnels, de l'acceptation pour le spectateur d'autres critères pour definir la qualité d'un film.
Alors bien entendu je vais réentendre des longs paragraphes, sur la notion de beau, d'objectivité ...

Mais la est le probleme, quand certaines catégories de professionnels du cinema comprendront que par exemple, Le seigneur des anneaux, Titanic ... pour reprendre quelques enormes succes recents, sont des bons films car les spectateurs les ont trouvés bons, il y aura une grande avancée.

Personne n'aime s'entendre dire que ce qu'il a apprécié est en réalité de la merde, quand des critiques donnent un avis négatif sur un film hollywoodien ou une grosse production francaise style Michel Vaillant, mais qu'a la sortie du film les spectateurs en sont contents, comment crois-tu que les spectateurs voient ce critique ? Et si ce critique va ensuite encenser un film hongrois ou autre pour caricaturer, que penses-tu que le spectateur lambda va penser sans meme voir ce film ?

Le critique de cinéma professionnel, voit certaines choses techniques qui echappent aux spectateurs, des jeux de lumieres, de placement d'acteurs ... et c'est pour moi la ce qui devrait etre son véritable travail, lorsque celui-ci essaye de transcrire les emotions que le film fait passer, on a la un réel probleme, puisque cela touche a du domaine subjectif, et malgré tous les dires, l'objectivité réelles ne peut exister.
Comment une personne peut-elle dire si un film est réussi ou pas, selon des criteres qu'il croit objectif, mais qu'ils ne le sotn en réalité pas tous.

Tu nous rappelles souvent, que j'ai ici, mais d'autres l'ont, une vision du film simplement a travers mes yeux de spectateur en oubliant l'object film, qui est un object a part entiere. Mais pourtant comme l'a dit je sais plus qui, l'observateur modifie l'objet qu'il observe, et ici, chose qui est pour moi fondamentale dans le cinéma, et dans l'approche qu'ont la tres grande majortié des spectateurs de cinema, c'est que l'objet observé, ici le film, ne peut exister sans l'observateur, le film sans spectateurs n'existe pas, un film ne devrait etre jugé qu'a travers le prisme des yeux d'un spectateur et de rien d'autre car sans lui il n'existerait pas.

Alors avec tout ca, je remets presque en question l'existence meme du métier de critique de cinéma, et bien oui, du moins dans sa forme actuelle, qui vise a mettre sur un plan d'objectivité la notion de bon ou mauvais, la detention d'une vérité unique, le métier de critique me parait inutile.
Et la santé moribonde de certaines types de cinémas pourtant tant appréciés par les "critiques" ou professionnels, en est surement pour moi une des conséquences.
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Messagede Shunt le 26 Déc 2003, 01:24

T'as oublié aussi la question des règlements de compte et des inimitiés (et amitiés) personnelles dans les critiques ciné... mais c'est comme pour tout, il faut savoir être critique avec un film mais aussi critique avec la critique d'un film, qui s'apparente au choc des égos... je ne sais pas si vous lisez Bayon dans Libé, mais c'est de l'onanisme journalistique, ce mec doit se carresser en se regardant écrire... il m'est arrivé parfois d'arriver au bout de ses papiers sans savoir s'il avait aimé ou non le film. Je dois surement être trop con... ils ont un sympathique viviers de barges histéros à Libé (Louis Skorecki relevant quasiment du cas clinique).
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Messagede Silverwitch le 26 Déc 2003, 01:52

Neoflo a écrit:
Maintenant pour en revenir plus preicsemment au critiques de cinéma, c'est dans la notion meme de critique que le bat blesse, entre un spectateur lambda, comme moi ou d'autres, et une professionnelle comme toi Silverwitch. Pour des raisons que tu as deja longuement, tres longuement ;) , expliqués dans divers topics aussi, tu penses, enfin tu es sure, plutot qu'il existe des criteres definis et précis pour declarer si un film est bon ou pas. C'est ton métier et il est ainsi plutot normal que tu defendes ton beurre. Mais enfin la ou le bat blesse, ou le difference entre critiques et spectateurs apparait flagrante, c'est dans la non-comprehension pour vous professionnels, de l'acceptation pour le spectateur d'autres critères pour definir la qualité d'un film.
Alors bien entendu je vais réentendre des longs paragraphes, sur la notion de beau, d'objectivité ...


Je ne sais pas Neoflo. Oui je crois que les critères pour évaluer les films (ou les autres productions artistiques) existent, je ne prétends pas à leur infaillibilité. Ce qui m'importe ce n'est pas que l'on soit certain ou persuadé d'avoir saisi avec objectivité la valeur d'un film, mais de faire l'effort d'aller à la rencontre du film. De vraiment comprendre de quoi il est question avant de se regarder le nombril. Si tu reprends mes précédents messages, je développe un peu certains arguments. Libre à toi de les considérer ou non. Par contre je veux corriger une éventuelle incompréhension: quand je parle de "critique", je ne parle pas de la profession de critique cinématographique, mais de l'activité critique, à laquelle n'importe quel spectateur est libre ou non de s'adonner.

Neoflo a écrit:Mais la est le probleme, quand certaines catégories de professionnels du cinema comprendront que par exemple, Le seigneur des anneaux, Titanic ... pour reprendre quelques enormes succes recents, sont des bons films car les spectateurs les ont trouvés bons, il y aura une grande avancée.


C'est un truisme. Tu écris: un film est bon parce qu'on le trouve bon. Tu conviendras que c'est un peu léger comme argument. Alors je prends note de la précision de la formule: un film est bon parce que "un certain nombre de gens" le trouvent bon. Alors tous les films sont également bons, et le succès public est le seul critère de jugement.

Je vais substituer un autre truisme: un film est bon seulement s'il est bon. Peu importe donc qu'il ait fait un million ou seulement cinquante spectateurs. Je trouve assez insuffisant de ne pas prendre en compte tous les critères qui font qu'un film peut avoir du succès ou non: les critères économiques, marketing, d'influence, etc...Le simple critère de la langue quand nous vivons dans un monde dominé par l'anglais me laisse rêveuse. L'anglais étant quasiment la langue universelle aujourd'hui, les films tournés en anglais présentent toujours un avantage énorme sur les autres simplement du fait de leur nationalité. À moins donc que tu ne m'expliques que c'est parfaitement logique et que les américains font toujours le meilleur cinéma, en oubliant par la même les moyens de promotion et pire encore la ségrégation faite avant même la sortie du film! Parce que c'est là où tu pêches sans doute par naïveté: les films ne bénéficient pas de chances égales. Quand tu sors un film sur mille copies en France, tu es mathématiquement plus sûr (grâce à ton argent) d'avoir plus de spectateurs qu'un film qui bénéficie de cinquante copies. On a jamais vu le contraire se produire. Alors je peux multiplier les exemples en ce domaine.

Sinon je rappelle quand même une chose: une entrée au cinéma ne veut rien dire quant à une éventuelle appréciation. Simplement qu'une personne a acheté un ticket AVANT de voir le film. Je ne vois pas ce qui te permet de dire que si vingt millions de gens ont vu Titanic en France, autant ou nombreux l'ont aimé. Sauf ton respect, tu n'en sais rien du tout.

Neoflo a écrit:Personne n'aime s'entendre dire que ce qu'il a apprécié est en réalité de la merde, quand des critiques donnent un avis négatif sur un film hollywoodien ou une grosse production francaise style Michel Vaillant, mais qu'a la sortie du film les spectateurs en sont contents, comment crois-tu que les spectateurs voient ce critique ? Et si ce critique va ensuite encenser un film hongrois ou autre pour caricaturer, que penses-tu que le spectateur lambda va penser sans meme voir ce film ?


En fait, je m'en fous. Si certains n'aiment pas pour des raisons d'égo qu'on critique ce qu'ils aiment, tant pis pour eux. Quant à l'exemple que tu prends de Michel Vaillant, je ne crois pas qu'il soit très heureux au vu des scores du film. Pour une fois le public et la critique professionnelle sont en gros tombés d'accord.

Neoflo a écrit:Le critique de cinéma professionnel, voit certaines choses techniques qui echappent aux spectateurs, des jeux de lumieres, de placement d'acteurs ... et c'est pour moi la ce qui devrait etre son véritable travail, lorsque celui-ci essaye de transcrire les emotions que le film fait passer, on a la un réel probleme, puisque cela touche a du domaine subjectif, et malgré tous les dires, l'objectivité réelles ne peut exister.
Comment une personne peut-elle dire si un film est réussi ou pas, selon des criteres qu'il croit objectif, mais qu'ils ne le sotn en réalité pas tous.


Non. L'émotion n'est pas vraiment un critère de jugement pour examiner un film ou une oeuvre. Donc je ne peux recevoir l'argument. Ensuite la force du critique ce n'est pas d'être un technicien, c'est d'abord de faire preuve de distance critique. Ce qui sous entend également une capacité à connaître ce dont il parle. À ne pas prendre un cliché pour une nouveauté par exemple.

Neoflo a écrit:Alors avec tout ca, je remets presque en question l'existence meme du métier de critique de cinéma, et bien oui, du moins dans sa forme actuelle, qui vise a mettre sur un plan d'objectivité la notion de bon ou mauvais, la detention d'une vérité unique, le métier de critique me parait inutile.
Et la santé moribonde de certaines types de cinémas pourtant tant appréciés par les "critiques" ou professionnels, en est surement pour moi une des conséquences.


As-tu lu suffisamment de critiques, de différents pays, sur différents supports pour connaître ton sujet? La seule différence entre une critique professionnelle et un autre avis c'est qu'elle est publique. Ensuite il y a des avis qui sont des caprices (chez les critiques professionnelles et le "public") et d'autres qui sont des jugements argumentés. La critique pourra dire j'aime ce film parce que...L'intérêt de la critique, c'est de proposer un terrain commun. Je ne vais pas parler de mes émotions pour dialoguer, je vais parler du film, parce que c'est le seul objet sur lequel nous pouvons échanger quelque chose: c'est l'objet commun.

La critique n'est pas une condamnation, c'est théoriquement une possibilité de confronter son regard à celui d'un autre. Quant à ta conclusion et au lien que tu tisses entre désaffection publique et gout critique, qu'est-ce qui la motive?

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Messagede Silverwitch le 26 Déc 2003, 01:55

Shunt a écrit:T'as oublié aussi la question des règlements de compte et des inimitiés (et amitiés) personnelles dans les critiques ciné... mais c'est comme pour tout, il faut savoir être critique avec un film mais aussi critique avec la critique d'un film, qui s'apparente au choc des égos... je ne sais pas si vous lisez Bayon dans Libé, mais c'est de l'onanisme journalistique, ce mec doit se carresser en se regardant écrire... il m'est arrivé parfois d'arriver au bout de ses papiers sans savoir s'il avait aimé ou non le film. Je dois surement être trop con... ils ont un sympathique viviers de barges histéros à Libé (Louis Skorecki relevant quasiment du cas clinique).


Shunt,

C'est exactement ça. Prendre la même distance vis à vis d'une critique que vis à vis d'un film, c'est le fondement de l'activité critique. Avec cette différence que la critique n'est pas une oeuvre, mais de la glose.

Pour le reste, la critique de cinéma française est dans un bel état de délabrement, et Libération qui se spécialise dans les coups médiatiques n'échappe pas à la règle (je me souviens d'un papier assassin sur Eyes Wide Shut pendant le festival de Venise d'une médiocrité incroyable).

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Messagede Neoflo le 26 Déc 2003, 02:01

Silverwitch avant meme que je ne répondes a ton post précédent, je souhaite juste te demander pourquoi tu as quoté tous les paragraphes de mon texte sauf un, qui est pourtant pour moi le plus important.
Et comme bien entendu ce choix, n'etait pas du hasard ;), meme si je t'avoue que sa place dans mon texte n'etait pas la meilleure.
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Messagede Silverwitch le 26 Déc 2003, 02:20

Neoflo a écrit:Silverwitch avant meme que je ne répondes a ton post précédent, je souhaite juste te demander pourquoi tu as quoté tous les paragraphes de mon texte sauf un, qui est pourtant pour moi le plus important.
Et comme bien entendu ce choix, n'etait pas du hasard ;), meme si je t'avoue que sa place dans mon texte n'etait pas la meilleure.


Neoflo,

Le paragraphe qui dit que l'art est dans l'oeil du spectateur? Une réponse serait ou trop lapidaire ou trop longue. Il faudrait expliquer le contexte historique qui conduit l'avant-garde en art plastique, dans la continuité du mouvement dadaïste à adopter massivement l'aphorisme ironique de Marcel Duchamp. D'ailleurs voilà la citation replacée dans son contexte:

"L'artiste aime bien croire qu'il est complètement conscient de ce qu'il fait, de pourquoi il le fait, de comment il le fait, et de la valeur intrinsèque de son oeuvre. A ça je ne crois pas du tout. Je crois sincèrement que le tableau est autant fait par le regardeur que par l'artiste".

Comment d'un tel commentaire en est-on arrivé à dire que l'art était dans l'oeil du spectateur? Mystère. Simplement il faut comprendre la chose suivante Neoflo: considérer que celui qui regarde le film est essentiel à l'apparition de l'oeuvre au monde, je te l'accorde évidemment. L'art est destiné au monde et n'existe pas dans un vase clos virtuel. Pour autant l'objet regardé ne varie pas contrairement à ce que tu affirmes au gré des spectateurs, cette invariance de l'objet me conduit à estimer que c'est l'objet qu'il faut tenter de cerner plutôt que l'émotion ressentie par un spectateur ou par chaque spectateur.

De plus, le regardeur fait allusion à un spectateur, à chaque spectateur. Il n'y a donc aucune allusion au grand public. C'est l'épreuve du regard qui compte. En ce sens il n'y a pas de regard moyen sur l'oeuvre qui compte. Voilà ce que je peux te dire rapidement. Sinon il faudra de plus longs paragraphes qui expliqueraient notamment comme la posture la plus avant-gardiste (et la plus éloignée du public donc: l'art au musée) est devenue avec le temps la plus égalitaire et la plus démocratique. C'est une bien étrange abérration que de soutenir la vision qui justifiait justement la désaffection du public devant les oeuvres contemporaines les plus abstraites (un carré blanc sur fond blanc pour n'en citer qu'un).

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Messagede cétérouge le 26 Déc 2003, 02:49

silverwitch a écrit:ils ont un sympathique viviers de barges histéros à Libé (Louis Skorecki relevant quasiment du cas clinique).


Skorecki je le trouve amusant, je crois que son propos est plus de provoquer, et de jouer sarcastiquement avec les réputations des réalisateurs (comme Kubrick, un peu sa tête de turc), que d'établir si le film il est bien ou pas...
Dernière édition par cétérouge le 26 Déc 2003, 02:51, édité 1 fois.
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Messagede Neoflo le 26 Déc 2003, 02:50

silverwitch a écrit:
Neoflo a écrit:Silverwitch avant meme que je ne répondes a ton post précédent, je souhaite juste te demander pourquoi tu as quoté tous les paragraphes de mon texte sauf un, qui est pourtant pour moi le plus important.
Et comme bien entendu ce choix, n'etait pas du hasard ;), meme si je t'avoue que sa place dans mon texte n'etait pas la meilleure.


Neoflo,

Le paragraphe qui dit que l'art est dans l'oeil du spectateur? Une réponse serait ou trop lapidaire ou trop longue. Il faudrait expliquer le contexte historique qui conduit l'avant-garde en art plastique, dans la continuité du mouvement dadaïste à adopter massivement l'aphorisme ironique de Marcel Duchamp. D'ailleurs voilà la citation replacée dans son contexte:

"L'artiste aime bien croire qu'il est complètement conscient de ce qu'il fait, de pourquoi il le fait, de comment il le fait, et de la valeur intrinsèque de son oeuvre. A ça je ne crois pas du tout. Je crois sincèrement que le tableau est autant fait par le regardeur que par l'artiste".

Comment d'un tel commentaire en est-on arrivé à dire que l'art était dans l'oeil du spectateur? Mystère. Simplement il faut comprendre la chose suivante Neoflo: considérer que celui qui regarde le film est essentiel à l'apparition de l'oeuvre au monde, je te l'accorde évidemment. L'art est destiné au monde et n'existe pas dans un vase clos virtuel. Pour autant l'objet regardé ne varie pas contrairement à ce que tu affirmes au gré des spectateurs, cette invariance de l'objet me conduit à estimer que c'est l'objet qu'il faut tenter de cerner plutôt que l'émotion ressentie par un spectateur ou par chaque spectateur.

De plus, le regardeur fait allusion à un spectateur, à chaque spectateur. Il n'y a donc aucune allusion au grand public. C'est l'épreuve du regard qui compte. En ce sens il n'y a pas de regard moyen sur l'oeuvre qui compte. Voilà ce que je peux te dire rapidement. Sinon il faudra de plus longs paragraphes qui expliqueraient notamment comme la posture la plus avant-gardiste (et la plus éloignée du public donc: l'art au musée) est devenue avec le temps la plus égalitaire et la plus démocratique. C'est une bien étrange abérration que de soutenir la vision qui justifiait justement la désaffection du public devant les oeuvres contemporaines les plus abstraites (un carré blanc sur fond blanc pour n'en citer qu'un).

Silverwitch


En réalité ma citation ne convenait pas seulement a l'art, mais de maniere bien plus generale.

Maintenant je ne vois pas dans ton post de véritable réponse a mes questions, car c'est dans le principe meme d'objectivité que nos 2 visions sont totalement différentes.
Heuresement tu admets que sans le spectateur, le film ne peut exister, mais pourtant tu continues a souhaiter voir l'objet au dela du regard de spectateur, c'est pour moi une totale ineptie.

Car le critique regarde lui aussi le film, a travers des yeux qui sont avant tout des yeux de spectateurs. On peut meme dire qu'on tend vers l'objectivité, oui peut etre, pourtant toi-meme tu dis qu'il faut faire abstraction des sentiments pour rendre une jugement critique, mais quel etre humain, peut se prétendre dénué de sentiments meme si cela n'est que le court instant d'un jugement critique. Comment ou alors tu es une sur-femme silverwitch, peux-tu prétendre faire abstraction de tes sentiments personnels dans la critique d"un film, hormis sur l'aspect technique que j'evoqué plus haut. C'est aujourd'hui pour moi impossible pour un etre humain, de se prétendre dénoué de sentiments quels qu'ils soient, et ce qui me gene dans le jugement critique c'est bien cela, cette croyance en une vérité unique qui ne peut exister a travers le regard d'un humain, spectateur avant tout, critique ensuite, et qui meme si il souhaite faire disparaitre, cette trace du spectateur, ne peut le faire totalement.
En ce sens la, je me demande comment on peut prétendre dire qu'un film est bon ou mauvais, oui un critique peut dire qu'IL a trouvé que le film etait bon ou mauvais, mais non pas que LE film est bon ou mauvais.

Alors que l'on ait ici un abus de language visant a supprimer ce "avoir trouver" dans la bouche ou les ecrits de spectateurs, ca peut se comprendre, dans les ecrits d'un critique je trouve ca aberrant.

Maintenant je ne vois franchement pas comment on peut continuer cette conversation, tu pourras essayer de me convaincre que "vous" essayez de tendre vers l'objectivité, oui je te crois, que vous y arrivez pour définir un jugement, non.
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Messagede cétérouge le 26 Déc 2003, 03:02

Heu, si je peux intervenir Neoflo, là tu parles de problèmes qui ceoncernent pas strictement du statut de la critique esthétique, mais plutôt du statut de la faculté de juger ou de la conscience en générale, qui est à la fois subjective, profondément personnelle et sentimentale, mais qui en même temps suppose une certaine distance à soi-même. Les arguments que tu appliques sur l'impossibilité de juger si un film est bon ou non ne sont pas absurdes, mais tu pourrais les appliquer sur toute forme de pensée consciente ou de jugement que formule un individu...(ils me font penser à ceux qu'a utilisé un philosophe, Vladimir Jankélévitch, pour parler de la conscience morale, en essayant de les réfuter, ou plutôt de montrer qu'ils ne sont pas contradictoires). En fait tu arles pas du cinéma ce dont tu parles c'est d'une position d'innocence foncière du sujet par rapport au monde qui neutralise toute possibilité de jugement conscient lorsqu'elle est défendue comme défintive (mais d'un certain côté la défense inconditionnelle de l'innocence du sujet impliqué comme spectateur dans la réalité, c'est un peu le thème existentiel d'Amélie Poulain, donc on reste en plein dans le sujet) ...
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Messagede Neoflo le 26 Déc 2003, 03:27

silverwitch a écrit:
Neoflo a écrit:
Maintenant pour en revenir plus preicsemment au critiques de cinéma, c'est dans la notion meme de critique que le bat blesse, entre un spectateur lambda, comme moi ou d'autres, et une professionnelle comme toi Silverwitch. Pour des raisons que tu as deja longuement, tres longuement ;) , expliqués dans divers topics aussi, tu penses, enfin tu es sure, plutot qu'il existe des criteres definis et précis pour declarer si un film est bon ou pas. C'est ton métier et il est ainsi plutot normal que tu defendes ton beurre. Mais enfin la ou le bat blesse, ou le difference entre critiques et spectateurs apparait flagrante, c'est dans la non-comprehension pour vous professionnels, de l'acceptation pour le spectateur d'autres critères pour definir la qualité d'un film.
Alors bien entendu je vais réentendre des longs paragraphes, sur la notion de beau, d'objectivité ...


Je ne sais pas Neoflo. Oui je crois que les critères pour évaluer les films (ou les autres productions artistiques) existent, je ne prétends pas à leur infaillibilité. Ce qui m'importe ce n'est pas que l'on soit certain ou persuadé d'avoir saisi avec objectivité la valeur d'un film, mais de faire l'effort d'aller à la rencontre du film. De vraiment comprendre de quoi il est question avant de se regarder le nombril. Si tu reprends mes précédents messages, je développe un peu certains arguments. Libre à toi de les considérer ou non. Par contre je veux corriger une éventuelle incompréhension: quand je parle de "critique", je ne parle pas de la profession de critique cinématographique, mais de l'activité critique, à laquelle n'importe quel spectateur est libre ou non de s'adonner.


Soit pour le moment que dire, a part que je suis d'accord, principalement dans le fait de pretendre aller a la rencontre du film, les post precedants montrant que ce qui me dérange, c'est le fait de prétendre y arriver.

Neoflo a écrit:Mais la est le probleme, quand certaines catégories de professionnels du cinema comprendront que par exemple, Le seigneur des anneaux, Titanic ... pour reprendre quelques enormes succes recents, sont des bons films car les spectateurs les ont trouvés bons, il y aura une grande avancée.


C'est un truisme. Tu écris: un film est bon parce qu'on le trouve bon. Tu conviendras que c'est un peu léger comme argument. Alors je prends note de la précision de la formule: un film est bon parce que "un certain nombre de gens" le trouvent bon. Alors tous les films sont également bons, et le succès public est le seul critère de jugement.

Je vais substituer un autre truisme: un film est bon seulement s'il est bon. Peu importe donc qu'il ait fait un million ou seulement cinquante spectateurs. Je trouve assez insuffisant de ne pas prendre en compte tous les critères qui font qu'un film peut avoir du succès ou non: les critères économiques, marketing, d'influence, etc...Le simple critère de la langue quand nous vivons dans un monde dominé par l'anglais me laisse rêveuse. L'anglais étant quasiment la langue universelle aujourd'hui, les films tournés en anglais présentent toujours un avantage énorme sur les autres simplement du fait de leur nationalité. À moins donc que tu ne m'expliques que c'est parfaitement logique et que les américains font toujours le meilleur cinéma, en oubliant par la même les moyens de promotion et pire encore la ségrégation faite avant même la sortie du film! Parce que c'est là où tu pêches sans doute par naïveté: les films ne bénéficient pas de chances égales. Quand tu sors un film sur mille copies en France, tu es mathématiquement plus sûr (grâce à ton argent) d'avoir plus de spectateurs qu'un film qui bénéficie de cinquante copies. On a jamais vu le contraire se produire. Alors je peux multiplier les exemples en ce domaine.

Sinon je rappelle quand même une chose: une entrée au cinéma ne veut rien dire quant à une éventuelle appréciation. Simplement qu'une personne a acheté un ticket AVANT de voir le film. Je ne vois pas ce qui te permet de dire que si vingt millions de gens ont vu Titanic en France, autant ou nombreux l'ont aimé. Sauf ton respect, tu n'en sais rien du tout.


Inutile de revenir sur ton premier petit paragraphe, mais les arguments commerciaux qui suivent sont plus interessants. Tout ce que tu racontes est vrai, de nombreux films sont bien plus mis en valeur que d'autres ...
Pourtant crois-tu que si un enieme policier hollywoodien etait reelement mauvais, il ferait autant d'entrée, si un film d'action ne tenait plus en haleine, si une comédie populaire ne faisait plus rire, crois-tu qu'elle continuerait a faire des entrées sur son seul nom, "propagande" ... des entrées oui, mais en baisse, de moins en moins ...
A moins de prendre le spectateur lambda, dont je considère que je fais partie, c'est a dire le spectateur qui se sait absolument pas technicien, incapable ou presque de juger un jeu de lumieres ou autres ... mais qui va au cinéma pour ressentir des emotions, pour un parfait abruti, comment peux-t-on dire qu'un film qui fait enormement d'entrée est mauvais. Que le jeu des acteurs ne soit pas bon, dans titanic, que le jeu des lumieres ou quoi que soit de technique dans ce film ne soit pas au point, soit c'est ton boulot de le dire, mais que ce film soit mauvais par exemple, non c'est impossible car ce film réussit a faire voir, ressentir au spectateur, ce que celui-ci attendait, de la tristesse, de la joie ...
Quand je vais voir une comédie et que j'en sors en mettant marrer tout le long, je me dis que je ne peux pas dire que ce film est mauvais, que techniquement il soit pauvre ... pourquoi pas oui, mais laors la critique devrait simplement parler de l'aspect technique d'un film.
Maintenant concernant le nombre d'entrées qui ne définirait pas la "popularité" d'un film, s'il te plait silverwitch, ne me prends pas pour un con, je vais ou pousse mes amis a aller voir des films, selon mon ou leurs avis, car je sais que le mien/le leur et proche du leur/du mien, Si titanic fait 10 millions d'entrees ou plus, c'est qu'une bonne partie des spectateurs l'ont aimé, ont poussé d'autres, ou meme se sont poussés a voir ou revoir ce film. N'ignore pas ce phenomene s'il te plait.


Neoflo a écrit:Personne n'aime s'entendre dire que ce qu'il a apprécié est en réalité de la merde, quand des critiques donnent un avis négatif sur un film hollywoodien ou une grosse production francaise style Michel Vaillant, mais qu'a la sortie du film les spectateurs en sont contents, comment crois-tu que les spectateurs voient ce critique ? Et si ce critique va ensuite encenser un film hongrois ou autre pour caricaturer, que penses-tu que le spectateur lambda va penser sans meme voir ce film ?


En fait, je m'en fous. Si certains n'aiment pas pour des raisons d'égo qu'on critique ce qu'ils aiment, tant pis pour eux. Quant à l'exemple que tu prends de Michel Vaillant, je ne crois pas qu'il soit très heureux au vu des scores du film. Pour une fois le public et la critique professionnelle sont en gros tombés d'accord.

Et mince, il a fallu que je fasse la mariol sans regarder, les chiffres, alors prenons l'exemple de Taxi par exemple, qui lui a fait des entrées.

Neoflo a écrit:Le critique de cinéma professionnel, voit certaines choses techniques qui echappent aux spectateurs, des jeux de lumieres, de placement d'acteurs ... et c'est pour moi la ce qui devrait etre son véritable travail, lorsque celui-ci essaye de transcrire les emotions que le film fait passer, on a la un réel probleme, puisque cela touche a du domaine subjectif, et malgré tous les dires, l'objectivité réelles ne peut exister.
Comment une personne peut-elle dire si un film est réussi ou pas, selon des criteres qu'il croit objectif, mais qu'ils ne le sotn en réalité pas tous.


Non. L'émotion n'est pas vraiment un critère de jugement pour examiner un film ou une oeuvre. Donc je ne peux recevoir l'argument. Ensuite la force du critique ce n'est pas d'être un technicien, c'est d'abord de faire preuve de distance critique. Ce qui sous entend également une capacité à connaître ce dont il parle. À ne pas prendre un cliché pour une nouveauté par exemple.


Cf post précédent.

Neoflo a écrit:Alors avec tout ca, je remets presque en question l'existence meme du métier de critique de cinéma, et bien oui, du moins dans sa forme actuelle, qui vise a mettre sur un plan d'objectivité la notion de bon ou mauvais, la detention d'une vérité unique, le métier de critique me parait inutile.
Et la santé moribonde de certaines types de cinémas pourtant tant appréciés par les "critiques" ou professionnels, en est surement pour moi une des conséquences.


As-tu lu suffisamment de critiques, de différents pays, sur différents supports pour connaître ton sujet? La seule différence entre une critique professionnelle et un autre avis c'est qu'elle est publique. Ensuite il y a des avis qui sont des caprices (chez les critiques professionnelles et le "public") et d'autres qui sont des jugements argumentés. La critique pourra dire j'aime ce film parce que...L'intérêt de la critique, c'est de proposer un terrain commun. Je ne vais pas parler de mes émotions pour dialoguer, je vais parler du film, parce que c'est le seul objet sur lequel nous pouvons échanger quelque chose: c'est l'objet commun.

La critique n'est pas une condamnation, c'est théoriquement une possibilité de confronter son regard à celui d'un autre. Quant à ta conclusion et au lien que tu tisses entre désaffection publique et gout critique, qu'est-ce qui la motive?

Silverwitch


Effectivement, j'ai peut etre ete un peu trop rapide, en etant ici général, puisque mon oeil de spectateur francais, ne voit que la critique francaise, et ce depuis depuis finalement un nombre restreint d'années.

Mais enfin le probleme reste le meme, pourquoi une telle difference entre jugement de critiques et jugements de spectateurs, car meme des films plutot bien diffusés, dans des multiplexes, avre du cinéma que tu n'apprécies pas, appréciés par la critique, ne font-ils pas autant d'entrée. Pourquoi un Woody Allen, fait-il si seulement 400 000 copies avec son dernier film, alors qu'il est presque autant diffuser qu'un rire et chatiments, qui en fait le double, et qui lui a été acceuili beaucoup plus froidement par la critique.
Et de nombreux exemples comme ca existe.

Alors a part les arguments commerciaux, ici peut etre la comédie bien franchouillarde, contre l'américaine, quoi que pour certains autres films, l'argument se retourne aussi, qu'est ce qui peut expliquer cela ? La crétinerie du spectateur lambda peut etre ?
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Messagede Neoflo le 26 Déc 2003, 03:37

cétérouge a écrit:Heu, si je peux intervenir Neoflo, là tu parles de problèmes qui ceoncernent pas strictement du statut de la critique esthétique, mais plutôt du statut de la faculté de juger ou de la conscience en générale, qui est à la fois subjective, profondément personnelle et sentimentale, mais qui en même temps suppose une certaine distance à soi-même. Les arguments que tu appliques sur l'impossibilité de juger si un film est bon ou non ne sont pas absurdes, mais tu pourrais les appliquer sur toute forme de pensée consciente ou de jugement que formule un individu...(ils me font penser à ceux qu'a utilisé un philosophe, Vladimir Jankélévitch, pour parler de la conscience morale, en essayant de les réfuter, ou plutôt de montrer qu'ils ne sont pas contradictoires). En fait tu arles pas du cinéma ce dont tu parles c'est d'une position d'innocence foncière du sujet par rapport au monde qui neutralise toute possibilité de jugement conscient lorsqu'elle est défendue comme défintive (mais d'un certain côté la défense inconditionnelle de l'innocence du sujet impliqué comme spectateur dans la réalité, c'est un peu le thème existentiel d'Amélie Poulain, donc on reste en plein dans le sujet) ...


C'est effectivement ce que je me suis dit aussi, que ce sentiment dépassait le seul fait de la critique cinématographique pour arriver en des termes bien plus generaux. Finalement c'ets peut etre simplment le fait de dire qu'on detient la vérité qui me pose probleme, d'ou peut etre mon aversion pour toute forme de religion. Maintenant certains vont revenir probablement, comme dans le sujet religion, pour dire que l'absence de croyance en une religion est une croyance elle aussi. Comme ici, le fait d dire que l'on ne peut detenir la vérité, est une vérité elle aussi, d'ou le serpent qui se mord la queue , et si je me souviens bien de mes cours de philosophie du paradoxe d'Epidimède. Enfin bon tout ca, m'eloigne du sujet principal.

Amélie Poulain, m'a fait sourire 1h30 durant, et m'a transporté dans un monde imaginaire, peut etre oublié depuis longtemps, sans avoir rit, ou pleurer, j'etais bien, et rien que pour ca, ce film est selon moi BON. :P :P
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Messagede cétérouge le 26 Déc 2003, 03:54

Je n'ai pas aimé le film, eet je me retrouve dans les critiques qui lui sont faites par d'autre, mais c'est vrai que tout en étant d'accord avec eux j'ai remarqué que le propos des anti-Amélie Poulain avait une forme plus religieuse que celui des pour-Amélie (ou de ceux qui ne comprenennt pas ceux qui sont contre tout en s'en foutant, ce qui est le principal groupe je crois). En fait c'est un vrai problème que pose Amélie (qui se retrouve aussi dans l'historie de la cinéphilie), comment défendre un discours de critique minoritaire qui ne soit pas formellement religieux (ou plutôt édifiant)? Heu...
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Messagede Shunt le 26 Déc 2003, 09:45

cétérouge a écrit:
silverwitch a écrit:ils ont un sympathique viviers de barges histéros à Libé (Louis Skorecki relevant quasiment du cas clinique).


Skorecki je le trouve amusant, je crois que son propos est plus de provoquer, et de jouer sarcastiquement avec les réputations des réalisateurs (comme Kubrick, un peu sa tête de turc), que d'établir si le film il est bien ou pas...


Pour connaître quelqu'un qui a bossé au service culture de Libé, je peux te dire que Skorecki, il a vraiment un pet au casque... c'est le cas typique du mec frustré qui se réinvente un personnage d'artiste maudit à travers son rôle de critique...

...mais pour moi, Bayon est surement le plus nauséeux. C'est le mec qui lorsqu'il n'a plus d'argument pour descendre un film, s'en prend souvent au physique des actrices.
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Messagede F1GT le 26 Déc 2003, 10:57

Neoflo a écrit:Maintenant concernant le nombre d'entrées qui ne définirait pas la "popularité" d'un film, s'il te plait silverwitch, ne me prends pas pour un con, je vais ou pousse mes amis a aller voir des films, selon mon ou leurs avis, car je sais que le mien/le leur et proche du leur/du mien, Si titanic fait 10 millions d'entrees ou plus, c'est qu'une bonne partie des spectateurs l'ont aimé, ont poussé d'autres, ou meme se sont poussés a voir ou revoir ce film. N'ignore pas ce phenomene s'il te plait.

De plus combien de gens lisent réellement les critiques. 10/20% maxi. Donc la popularité vient d'ailleurs. Comme tu le dis, le bouche à oreille est la meilleure critique, car faite par des non "critiques" qui eux se targuent de vouloir guider nos goûts, alors qu'ils ne connaissent rien aux notres.

J'adore ce petit monde qui pense pouvoir nous dire ce qui est bien ou mal, beau ou pas beau, et dont la majorité des spectateurs se foutent de l'avis. Ils sont déconnectés de la réalité, car vivant sur leur planète.
Adieu
Patrice B F1GT@aol.com
Adieu à tous. J'ai été très heureux d'oeuvré pour vous avec vous, malgré quelques couacs. Malgré ce coup de pute.
J'espère vous retrouver ailleurs un jour, internet est très petit ;)
F1GT
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Messagede Dr Accel le 26 Déc 2003, 11:45

la popularité veint comme son nom l'indique du peuple donc de la vox populi : le bouche à oreille en grande majorité

et certainement un petit peu des critiques - j'ai travaillé pour Première dans une vie antérieure - car selons leurs réactions il est possible de savoir si un film peut vous plaire ou pas, je me souviens d'un type dans télérama qui descendait systématiquement les fims que j'avais aimé...

n'oublions pas la grande influance par la promo qui conditionne un maximum les consommateurs à titre divers, il faut être de ceux qui l'ont vu les premiers, ils faut pouvoir en parler au bureau le lundi etc etc qui n'ont rien à voir avec le/les goût/s pour le cinéma :?
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Messagede BARMANOU le 26 Déc 2003, 12:59

silverwitch a écrit:
BARMANOU a écrit:C’est amusant. J’aime beaucoup l’affirmation prudente de Daney concernant Besson ou Jeuney. Pour les personnages, c’est une autre histoire. Savons-nous exactement ce qu’ils aiment et ce qu’ils n’aiment pas ? En ce qui me concerne, non. Et ce n’est pas de la fausse modestie. Pour m’en persuader, il me suffit de discuter avec mes homologues spectateurs qui ont vu le même film que moi. A de rares exceptions, il est très difficile de trouver un consensus sur les sentiments ressentis à partir du jeu de scène des personnages. Pour Amélie Poulain, l’intention de l’auteur m’échappe totalement. Et n’est absolument pas une obsession. Tout comme le sens réel présumé du film, tout simplement parce que je ne suis pas certain de l’adéquation entre mon propre ressenti à partir des personnages et ce que l’auteur aurait voulu laisser percevoir de ses prétendues intentions derrière le paravent du jeu d’acteurs. Il est vrai que jouer les devins dans ce cas précis est un exercice de très haute voltige. :eek:


silverwitch a écrit:Je souligne cette phrase de ta réponse Barmanou, car elle illustre assez bien à mes yeux la ligne de partage qui nous sépare. Devant le film tu es plus dans la réflexion ou la comparaison sociologique (et ce n'est pas péjoratif) que dans la critique esthétique. Je crois à la critique, et cela aussi parce que je crois qu'on peut chercher à comprendre ce qu'a voulu dire le film (et non l'auteur). On peut aimer ou ne pas aimer Amélie Poulain pour de nombreuses raisons, cela je te l'accorde, mais l'évaluation du film de Jeunet qui se fonderait sur une mésinterprétation (un contresens) n'est pas une évaluation d'Amélie Poulain, mais d'une autre oeuvre, l'Amélie rêvée par Barmanou.


Diable ! Je ne savais point que mon analyse s’inscrivait dans une comparaison(sic) sociologique du film ! Je me surprends moi-même… :eek: Tu sais flatter lorsque tu le veux hein ? :lol: Mai j’ai suffisamment de recul pour savoir qu’elle n’ est qu’un simulacre… Dans la même lignée de réflexion, que tu revendiques "seulement" une critique esthétique du film m’étonne grandement… C’est effectivement un des points qui nous différencie. Tu as les éléments en mains pour t’accorder une évaluation du film de Jeunet. C’est même un truisme que de le préciser. A partir de là, connaissant par avance les grandes lignes directrices de l’auteur, tu en critiques plus le sens que la forme. A la limite, c’est l’hominidé du Chitral qui se place plus dans l’approche esthétique faute… de plus amples informations en amont. Logique. :o

silverwitch a écrit: Il y a deux places de spectateur critique et nous n'occupons à l'évidence pas le même fauteuil. Le premier qui est ému par la signification que le film a pour lui, et le second qui est curieux du sens de ce film et éventuellement de ce que l'auteur a voulu exprimer en faisant oeuvre de création. D'où la dichotomie entre sens et signification. Tu es clairement du côté de la signification quand je me place du côté du sens. C'est un point d'importance. Il n'y a pas de règle de comportement du spectateur, qui est libre de voir un film comme il l'entend ou comme il le ressent. Cependant, au moment de formuler un avis critique, qui s'offre au dialogue et à la controverse, il importe au moins de dialoguer du même film. Si tu m'entretiens d'une Amélie qui n'existe que dans ton imagination, nous ne nous comprendrons pas. Ce constat est aussi lié à la définition que fait Eco du lecteur et que je transpose à la place du spectateur, ici le spectateur modèle et le spectateur empirique. Rien n'empêche le spectateur empirique de voir le film de mille manières, et souvent ce spectateur utilise le film comme projection ou réceptacle de ses propres passions, qui proviennent de l'extérieur du film ou que le film suscite fortuitement en lui. Cette relation esthétique singulière qui se crée entre le spectateur et le film peut être passionnante, elle est en tout cas unique, intime et difficilement communicable. Le critique (professionnel ou non peu importe puisqu'il s'agit avant tout d'activité critique) se doit d'être un spectateur modèle, parce qu'il existe des règles du jeu et qu'il faut les respecter. C'est la promenade dans les bois dans la fiction. Nos bois sont des forêts de films. Le film construit un monde narratif cohérent à l'intérieur duquel nous pouvons évoluer plus ou moins librement; le bois étant un jardin dont les sentiers bifurquent. Quand spectatrice, je me promène dans ce bois, chaque découverte, chaque expérience peut être un enrichissement sur la vie, sur le monde, sur le passé. Il est louable de s'enrichir ainsi. Mais comme le bois n'a pas été crée n'importe comment et pour tout le monde, je ne dois pas y chercher des faits ou des sentiments qui me sont propres et d'ailleurs ne regardent que moi. Sinon en effet ce n'est plus interpréter un film, mais l'utiliser. Il n'est pas interdit d'utiliser un film pour rêver les "yeux grand ouverts". Mais ce n'est pas une activité publique, cela revient à confondre le bois avec notre jardin privé.


Au risque de me répéter, tu as le privilège de pouvoir te placer, dans l’exemple qui nous occupe, dans le siège de l’initié. Je me contente quant à moi d’être ému par la signification que le film a pour moi. Comme des millions d’individus qui vont au cinéma pour regarder une œuvre de fiction. A partir de là, je ne critique ni l’initié ni le profane. Je suis même content de constater, à ce stade de la discussion, que tu intègres enfin la réalité et l’existence de mon fauteuil… Mieux vaut tard que jamais en effet… :roll: Qui de nous deux est le plus autoriser à formuler un avis critique ? Bah les deux ou personne n’est ce pas ? Tu parles de jardin privé ou de bois dormant. J’aime beaucoup cette référence bucolique. Je l’adore même. :-D Disons qu’en tant qu’initié, tu as eu le loisir de regarder ce film avec des yeux qui avaient déjà explorer le petit potager de l’auteur. En ce qui me concerne, j’ai eu l’avantage de flâner dans les grandes étendues forestières que ce film a créé en moi. Les frontières ne sont plus les mêmes. Les dimensions du film non plus. Ce n’est plus le même loisir. Ni les mêmes envies ou les mêmes attentes. Tu cultives pour te nourrir. Je suis un promeneur appréciant l’ambiance des feuillus et des conifères. Tout simplement. LA vérité est ailleurs. :twisted:

BARMANOU a écrit:Mais bien entendu que je revendique haut et fort que ma vision d’Amélie Poulain soit issue de ma propre rêverie. :-P Si tu n’as pas saisi ce point fondamentale dans ce que j’ai développé un peu plus tôt sur ce film, je comprends aisément que tu puisses passer à coté du concept de la libre interprétation sur un tel film qui n’a rien de transcendant à la base d’un point de vue "profane". Maintenant, tu me parles d’une mouche qui aurait donc une signification hautement symbolique. :eek: Je te le dis clairement que ce clin d’œil m’a totalement échappé. Pire, cet insecte possédant donc un pouvoir présumé imprévisible et attractif pour l’héroïne, m’a laissé de marbre. Ce qui ne m’a pas empêché d’avoir eu mes cinq minutes de totale évasion à la sortie du film. Ce qui ne m’a pas empêché d’apprécier ce film derrière une cohérence qui n’est peut être pas celle que l’auteur a réellement voulu donner à son œuvre. Est-ce vraiment la pierre angulaire d’Amélie Poulain ? Je ne le crois pas. Car combien de spectateurs, dans son succès planétaire, ont perçu dans ce film le clin d’œil de cette Musca domestica ? Je ne crois pas beaucoup me tromper en avançant très peu. Ce qui, de toute évidence, n’a pas constitué un blocage fondamental à l’appréciation d’Amélie Poulain. Par conséquent, la "magie" du film se trouve certainement ailleurs. :roll:


silverwitch a écrit:C'était un exemple. Je ne te refuse évidemment pas une libre interprétation du film de Jean-Pierre Jeunet, ce que je conteste à la rigueur c'est que ton appréciation du film soit juste. Pour moi critiquer un film c'est ne pas écrire une phrase comme: "Pour moi Amélie Poulain est un bon film, parce que...". Les plus extravagantes raisons d'aimer, à l'abri derrière cette précaution "pour moi" que les linguistes nomment un "embrayeur" seront entendues. Le cinéma d'ailleurs est devenu un médium si répandu, un art si populaire que bien peu rechignent à exposer leurs préférences en la matière, comme le dit la phrase de François Truffaut: "Les français ont deux métiers, le leur et critique de cinéma". Utiliser un embrayeur ("pour moi") revient moins à expertiser un film qu'à parler de soi, à rendre public le plaisir que l'on ressent, bref à raconter sa vie. Hors la précaution de l'embrayeur, les rangs s'éclaircissent; donner son avis ne va plus de soi. L'inconfort social menace: écrire d'un film sur F1-Express qu'il est "mauvais" ou le qualifier de "chef d'oeuvre", c'est afficher une prétention, une volonté de dominer. D'où tire-t-il demanderont les participants, ce pouvoir de dire la vérité?


Heureusement que tu ne contestes pas la libre interprétation d’un film chez le sujet Lambda ! :eek: Il ne manquerait plus que cela ! :D Pour la simple raison que tu ne le peux pas. Le contraire reviendrait à affirmer que, sous le prétexte fallacieux de connaître les véritables motivations de l’auteur en amont, tu aurais le pouvoir d’abolir la liberté imaginative du profane devant un spectacle flattant son domaine personnel du sensible. Et donc d’en castrer son interprétation artistique par une négation de ses sentiments. Non seulement ce n’est pas possible, mais en plus, par rapport au plaisir procuré par l’art, c’est antinomique. La pierre angulaire de tout ce qui touche le sensible, c’est l’émotion d’abord et avant tout. Nous sommes tous des êtres de sentiments. Tu devrais le savoir… ou à défaut le ressentir.

BARMANOU a écrit:Tu as rencontré Jeunet ? Diable. Veinarde ! :D C’est à la fois une grande chance mais cela t’a aussi sans doute couper tes élans lorsque tu as visionné le film, puisque la révélation de ce que devait être le scénario t’avait été faite auparavant. Dommage. L’œil conditionné provoque sans doute des réflexes critiques qui bannissent la forme (conte de fée) au profit d’un fond dont tu aurais été en quelque sorte la victime principale d’un délit d’initié. Adieu la rêverie. Bonjour l’ironie et le relief sombre du film. Tiens, cela me rappel, toute proportions gardées, les nombreux critiques de cinéma qui se plantent lamentablement dans leurs jugements empiriques en ne prenant pas assez de recul par rapport aux profanes qui représente 80% du spectateur "moyen". Combien de films jugés catastrophiques suivant des critères d’initiés ont fait des millions d’entrées? Combien de films jugés fabuleux suivant les mêmes critères ont fait des "bides" monstrueux ? Il y a matière à s’interroger… :o


silverwitch a écrit:Il ne s'agit pas de chance ou de conditionnement. C'est simplement mon travail puisque je vis du cinéma. Comme il est aussi de mon travail de savoir appréhender la forme et le fond, en tant qu'éléments indissociables. Tu poses ensuite l'écart entre une certaine critique de cinéma et les goûts du public. Mais tu ne réponds pas à la question de savoir ce qu'un succès ou un insuccès public nous apprendrait sur le film en question. Pourquoi serait-ce le critique qui se plante plus que le public? À cause du nombre? Il y a souvent un point commun me diras-tu, pas plus la critique que le public n'exposent les critères dont il se servent pour juger un film. Mais succès ou l'insuccès public n'est en rien un critère. Il est certain qu'un film érotique comme Emmanuelle a attiré plus de spectateurs sur Paris que 2001 de Stanley Kubrick. Un spectateur critique n'en aura évidemment pas cure: on ne va pas forcément voir un film avec le dessein de le critiquer ni avec celui de l'officialiser, par le sacrement du ticket, une valeur qu'on lui prête à priori sur la foi du bouche à oreille, de la campagne publicitaire et marketing et des précédents films de son auteur. On peut y aller pour la plastique d'un acteur, pour se changer les idées, tuer le temps, se réchauffer, rester assis sans bouger à côté de quelqu'un qu'on aime ou pour pouvoir en parler samedi soir puisque tout le monde l'aura vu. C'est ce qui se passe la plupart du temps et toutes ces raisons sont d'ailleurs légitimes. Il ne faut donc pas oublier Barmanou que le spectateur qui achète son ticket, le fait généralement sans avoir vu le film. Une entrée ne donne donc pas un avis, ni même une addition d'avis.


Tu connais sans doute la formule toute faite de la fameuse "déformation professionnelle". Elle est très exagérée dans certains cas. Mais elle est légitime dans l’ensemble. Si c’est une chance de pouvoir la revendiquer au royaume du chômage galopant, elle peut être aussi un handicap. Le public n’est qu’un critère parmis tant d’autres, certes. Mais de poids. Pour cette tautologie, nous sommes donc d’accord. En revanche, j’ai peur que tu n’ais pas comprise ce que j’ai voulu signifier en abordant le rôle du professionnel du cinéma. Peut être parce que tu t’es senti visée ce qui, je te prie de croire, n’était pas mon objectif premier. 8) Heureusement et bien entendu que le critique, dans le fond et eu égard à la panoplie des critères objectifs( ?) qu’ils peut manipuler, n’est pas toujours celui qui se "plante" le plus lorsqu’il réalise un papier sur un film. Mais il n’est pas rare qu’il soit incapable (défaut de volonté ou véritable impuissance ?) de prendre du recul sur ce qui lui permet d’exercer son métier et de se mettre momentanément à la place du fauteuil du profane. Cela éviterait plus souvent des critiques dithyrambique sur des "bides" commerciaux retentissants. Ce qui rejoint parfaitement ton "on ne va pas forcément voir un film avec le dessein de le critiquer". C’est en gros, mon sentiment de profane. A mon sens, le ticket ne valide rien du tout qualitativement. Je me doute bien que des succès commerciaux ne sont que de médiocres films suivant des critères d’initiés. Pourtant, il faut intégrer que le ticket donne une reconnaissance publique du film. C’est peu, à l’évidence, à tes yeux. Mais c’est énorme dans l’absolu. L’anonymat est la pire chose pour l’art. :o

BARMANOU a écrit:
silverwitch a écrit:Qu'est-ce qui est original dans Amélie Poulain? Qu'est-ce qui est léger et tendre? Je commence à croire que tu n'as pas vu correctement le film de Jeunet dont pourtant la charge n'est justement pas tendre: la révélation d'Amélie qui entend l'accident mortel de Lady Diana à la télévision est un moment particulièrement méchant et surtout le film corrige cette rêverie: le couple que fait se rencontrer Amélie (la buraliste et le client bougon) après une brève idylle se séparent, et surtout Barmanou le film pour faire sens prend bien garde de mettre en garde Amélie et le spectateur. Souviens toi du discours que lui tient le peintre! Pour le reste, si tu parles d'interprétation idéologique, le plus simple serait bien évidemment que tu montres ce qui dans le film contredit telle ou telle vision.


Qu’est-ce voir correctement un film ? Est-ce être privilégié comme Silverwitch et rencontrer un des co-auteurs avant la sortie qui nous explique le synopsis avant tout le monde, ce qui nous conditionne pour regarder le film ? Est-ce cela regarder correctement un film ? Diable… Alors oui, je préfère être un profane et passer totalement à coté de la signification d’une mouche ou de la méchanceté présumée de la révélation de l’accident de Lady Diana. :lol: Rêverie. Humour. Légèreté. Tendresse. Originalité. Ah, que cela sonne bien à mes oreilles et que cela sied bien à mon Amélie Poulain ! :good


silverwitch a écrit:Que sais-tu d'un éventuel conditionnement? D'une conversation deux ans et demi avant la sortie du film? Ce serait plus une forme de discrédit jeté non pas sur mon discours mais sur la personne qui l'émet. Alors évidemment chaque spectateur occidental de In the Mood for Love peut trouver furieusement poétique de descendre acheter une soupe de nouilles à la gargote la plus proche dans un pot de camp, l'image aidant évidemment, quasi onirisme, le ralenti et la jolie valse...Alors qu'il s'agit du geste le plus ordinaire qui soit dans le contexte spatio-temporel du récit. On voit ici le tue-l'amour cinéphilique s'il se fût agi d'aller chercher un jambon-beurre au zinc du coin. La force du film de Jeunet ici c'est l'enrobage poético-romantique de la banalité la plus consternante. Nul poésie, nul rêve, nulle originalité mais un bel emballage. Je laisse également ma précédente réponse qui pose des questions directes sur le film ou plus exactement sur ton appréciation du film et qui appellent une réponse.


Je n’ai pas vu "In the mood for Love". Désolé. :? Par contre, j’ai vu la guerre des étoiles. Heureusement que je l’ai vu avant que de grands "penseurs" cinéphiles n’arrivent à démontrer que Lucas a voulu mettre en relief le triomphe du bien sur le mal dans un affrontement idéologique de l’Empire (représentant le Nazisme triomphant, du moins au début) avec les rebelles (représentants la résistance durant la seconde guerre mondiale). En imaginant une seconde que j’eusse pu rencontrer Lucas en me confirmant cette théorie explosive, je me demande, au pire, si j’aurais été voir la trilogie ou au mieux, si j’aurais pris autant de plaisir à la regarder. Cela vaut pour toutes les critiques moins explosives. Cela vaut pour Amélie Poulain aussi. Dieu que je suis content d’avoir pu en profiter sans avoir eu la malchance de connaître les secrets intimes de Jeunet ! :lol: Mais je respecte celles et ceux qui sont allés voir la guerre des étoiles avec un à priori proche du KKK et qui n’ont donc pas aimé le déroulement pas très avantageux pour l’Empire de la trilogie de Lucas. Rêverie. Humour. Légèreté. Tendresse. Originalité. Je les revendique, ne t’en déplaise, Silverwitch. Tu parles ce bel emballage. Et les réponses, tu les as sous les yeux. A moins que l’inepte « déformation professionnelle » ne te rende partiellement aveugle sous le joug d’un prisme trop exclusif. J’ose espérer que ce n’est pas ton cas. :o

BARMANOU a écrit:Tu crois ou tu en es certaine ? Plutôt la deuxième solution hein ? Quel est le bon jugement de ce film ? Celui qui appartient au savoir de l’initié ? Ou celui qui appartient à la sensibilité du spectateur lambda ? Qui est visé dans ce film ? Le privilégié ou l’homo "cinéphillus" (attention pas phallus hein ! :D ) vierge de tout préjugés et qui découvre avec des yeux émerveillés l’univers particulier de ce film ? Le jugement de goût est-il l’esclave du savoir "objectif" concernant une œuvre cinématographique ? Je te pose la question. Combien de personnes ont vu Amélie Poulain avec une interprétation totalement différente de ma modeste personne et située à des années lumières de la tienne, puisque elles n’avaient pas eu la chance insigne d’en connaître les arcanes ? Finalement, ce que l’on peut dire pour Jeunet et dans la mécanique du succès d’Amélie Poulain, jouer sur une gamme infinie d’interprétations superficielles aura été de très bon aloi. 8)


silverwitch a écrit:Non Barmanou, je n'en suis pas certaine. Je ne vais pas commencer un long discours sur ce qu'est la critique et le jugement esthétique. Attention aux confusions, un film ne se critique pas uniquement s'il touche une éventuelle cible visée. Le jugement critique tend vers l'objectivité, la seule question qui vaut la peine d'être posée est: "comment prouver qu'un film est bon".


Tu n’es pas certaine. C’est bien de le reconnaître. :good A partir de là, la question "Comment prouver qu'un film est bon" garde tout son sens. Pour moi, la réponse n’a aucune importance. Lorsque je vais voir un film, je ne me fixe pas un objectif qui consisterait à pouvoir démontrer qu’il est bon ou mauvais par ce qu’il correspondrait ou pas à une interprétation personnelle qui coïnciderait avec une grille de critères empiriques ou non. Je vais voir un film. Il me plait ou non. Un point c’est tout. "Est beau ce qui me plait " prend ici tout sons sens. Et effectivement, se passe d’un cours magistral sur le jugement esthétique. Dieu Merci pour la liberté de la spontanéité. :eek:

BARMANOU a écrit:
silverwitch a écrit:Je pense à Nietzsche pour conclure. En 1879, lorsqu'il se rend compte que certaines musiques italiennes faciles et sentimentales lui font de l'effet, Nietzsche met cet effet sur le compte d'une sorte de nostalgie préoedipienne: "Quand nous étions encore enfants, nous avons pour la première fois goûté au miel vierge de bien des choses; jamais plus le miel ne fut aussi bon qu'alors, où il nous conviait aux séductions de la vie."


Ah, Friedrich ! Tu me gâtes dis ! C’est Noël ! :-P Cela explique tout ou partie de ta vision et donc de ton interprétation déçue de privilégiée du film de Jeunet. Pour ma part, je suis sans doute encore au stade ou je goûte le miel vierge d’Amélie Poulain. :twisted: Attention, je ne suis pas une abeille pour autant . Je devance ici déjà ta prochaine relation bourdonnante avec une mouche envoûtante. :o


silverwitch a écrit:
:D

Je ne considère pas être privilégiée, sinon dans le sens que je connais le médium cinéma puisqu'il s'agit de mon domaine d'activité professionnel. J'apprécie beaucoup l'élégance avec laquelle tu réponds à la citation de Nietzsche (qui était bien un petit cadeau que je te faisais), mais conserve là tout de même à l'esprit. Je ne crois pas que tu sois un enfant devant Amélie Poulain. Que tu en aies la nostalgie me paraît déjà plus probable. Mais je n'imposerai pas cette hypothèse, puisque je ne te connais pas. Tu as peut-être réellement douze ans!

Joyeux Noël,


Veinarde va ! C’est un beau métier tout de même que le tien. :wink: Et merci pour ta citation, un peu de Friedrich, cela fait du bien. Même pour Noël ! :-P Et oui, j’ai encore les yeux d’un enfant de douze ans. Je crois que c’est un privilège pour beaucoup de choses. A mon tour de te faire un cadeau : Lorsque Copernic était presque seul de son opinion, elle était toujours incomparablement plus vraisemblable que celle de tout le reste du genre humain. Or, je ne sais pas si l’établissement de l’art d’estimer les vérisimilitudes ne serait plus utile qu’une bonne partie de nos sciences démonstratives, et j’y ai pensé plus d’une fois. Leibniz.


Ayrton Senna était un génie, un tyran, généreux, humble ou arrogant sur lequel les opinions ont toujours été partagées. Mais il avait une qualité que nul ne pouvait lui retirer : c'était le pilote de Formule 1 le plus rapide que le monde ait jamais vu.
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Messagede Silverwitch le 26 Déc 2003, 17:40

Neoflo a écrit:
Maintenant concernant le nombre d'entrées qui ne définirait pas la "popularité" d'un film, s'il te plait silverwitch, ne me prends pas pour un con, je vais ou pousse mes amis a aller voir des films, selon mon ou leurs avis, car je sais que le mien/le leur et proche du leur/du mien, Si titanic fait 10 millions d'entrees ou plus, c'est qu'une bonne partie des spectateurs l'ont aimé, ont poussé d'autres, ou meme se sont poussés a voir ou revoir ce film. N'ignore pas ce phenomene s'il te plait.


Je ne l'ignore pas, je le relativise. Parce que tu n'es pas à même d'estimer quelle serait la part d'un bouche à oreille positif pour un film comme Titanic ou Taxi, entre la campagne marketing, l'effet de mode, et simplement l'omniprésence des films dans les salles de cinéma. Forcément si tu donnes mille copies à un film il engrange plus de spectateurs que si tu lui en donnes cent, c'est mathématique.


Neoflo a écrit:Mais enfin le probleme reste le meme, pourquoi une telle difference entre jugement de critiques et jugements de spectateurs, car meme des films plutot bien diffusés, dans des multiplexes, avre du cinéma que tu n'apprécies pas, appréciés par la critique, ne font-ils pas autant d'entrée. Pourquoi un Woody Allen, fait-il si seulement 400 000 copies avec son dernier film, alors qu'il est presque autant diffuser qu'un rire et chatiments, qui en fait le double, et qui lui a été acceuili beaucoup plus froidement par la critique.
Et de nombreux exemples comme ca existe.

Alors a part les arguments commerciaux, ici peut etre la comédie bien franchouillarde, contre l'américaine, quoi que pour certains autres films, l'argument se retourne aussi, qu'est ce qui peut expliquer cela ? La crétinerie du spectateur lambda peut etre ?


Ce sont simplement tes critères qui sont trop limités. En France, le dernier Woody Allen fait 450 mille entrées avec 112 copies. Dans le même temps, Michel Vaillant fait environ 800 mille entrées avec plus de 500 copies. Quel film est un succès? Si tu prends le nombre d'entrées France uniquement, Michel Vaillant. Si tu prends en compte la moyenne des entrées par nombre de copies, alors le score du film de Woody Allen est nettement meilleur. Si tu le relativises encore par le budget publicité et marketing, le nombre d'articles consacrés au film dans les grands médias et le nombre de reportages/entretiens à la télévision, c'est un gouffre qui se creuse!

Et pour reprendre ton exemple, si telle comédie française que tu cites fait plus d'entrées France c'est vrai. Mais pour retourner ton argument du nombre d'entrées contre toi, à la vérité le dernier Woody Allen fait beaucoup beaucoup plus d'entrées que "Rire et chatiments". Tu oublies de compter les spectateurs américains, italiens, espagnols, allemands, japonais, suédois, britanniques, australiens, canadiens...À l'arrivée, sans certitude, le film de Woody Allen fait largement 12 fois plus d'entrées que ton exemple. Alors? Tes critères sont inaptes.

Silverwitch

Je ne réponds pas dans ce message au reste de ton message, je reprendrai ça dans un autre message plus général
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Messagede Silverwitch le 26 Déc 2003, 17:48

F1GT a écrit:De plus combien de gens lisent réellement les critiques. 10/20% maxi. Donc la popularité vient d'ailleurs. Comme tu le dis, le bouche à oreille est la meilleure critique, car faite par des non "critiques" qui eux se targuent de vouloir guider nos goûts, alors qu'ils ne connaissent rien aux notres.

J'adore ce petit monde qui pense pouvoir nous dire ce qui est bien ou mal, beau ou pas beau, et dont la majorité des spectateurs se foutent de l'avis. Ils sont déconnectés de la réalité, car vivant sur leur planète.


F1GT,

J'aime bien la manière dont tu collectivises tes goûts. Mais je t'écoute me donner la recette du bouche à oreille qui expliquera pourquoi des films comme Titanic ou Taxi sont en tête du box-office.

En réalité les films sont programmés pour faire un certain nombre d'entrées avant même leur sortie. Il est facile de parler de bouche à oreille pour un film comme "Le Monde de Nemo" qui sort en France au moment des fêtes de Noël, avec une campagne de pub, marketing, produits dérivés, médiatique, plus qu'intense. Tu es incapable de quantifier le fameux effet bouche à oreille. Par contre pour un film plus petit et peu connu, il est évident que le bouche à oreille joue de manière plus importante, parce que justement le film n'a pas les moyens d'affiche ou de marketing des plus gros, parce qu'il ne se joue que sur 30 copies...Là l'influence des critiques est souvent très importante: un film qui reçoit un article louangeur dans un hebdo comme Télérama voit sa fréquentation augmenter et l'effet en salles est beaucoup mieux mesurable.

Quant à la dernière phrase de ta réponse, elle est à la limite du poujadisme, non? Tu accuses un ennemi invisible qui veut contrôler tes goûts. C'est de l'ordre du fantasme hein.

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Messagede Silverwitch le 26 Déc 2003, 17:50

Dr Accel a écrit:la popularité veint comme son nom l'indique du peuple donc de la vox populi : le bouche à oreille en grande majorité

et certainement un petit peu des critiques - j'ai travaillé pour Première dans une vie antérieure - car selons leurs réactions il est possible de savoir si un film peut vous plaire ou pas, je me souviens d'un type dans télérama qui descendait systématiquement les fims que j'avais aimé...

n'oublions pas la grande influance par la promo qui conditionne un maximum les consommateurs à titre divers, il faut être de ceux qui l'ont vu les premiers, ils faut pouvoir en parler au bureau le lundi etc etc qui n'ont rien à voir avec le/les goût/s pour le cinéma :?


Dr Accel,

Je suis bien contente que tu le fasses remarquer. Les films ne sont pas égaux les uns en face des autres lors de leur sortie. Les plus riches écrasent les plus petits, à de rares exceptions près (heureusement).

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Messagede Shunt le 26 Déc 2003, 17:56

silverwitch a écrit:Dr Accel,

Je suis bien contente que tu le fasses remarquer. Les films ne sont pas égaux les uns en face des autres lors de leur sortie. Les plus riches écrasent les plus petits, à de rares exceptions près (heureusement).

Silverwitch


Michel Vaillant, ça a fait un sacré four malgré un tapage médiatique bien orchestré... 800 000 entrées, c'est faiblard. 1 600 entrées par salle en un peu plus d'un mois...

Par contre, le Retour du Roi en est déjà à 3 millions d'entrées en seulement une semaine d'exploitation (avec 993 copies), soit 3000 entrées par salle... (le double de Michel Vaillant).
Dernière édition par Shunt le 26 Déc 2003, 17:59, édité 1 fois.
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Messagede Silverwitch le 26 Déc 2003, 17:58

Shunt a écrit:
silverwitch a écrit:Dr Accel,

Je suis bien contente que tu le fasses remarquer. Les films ne sont pas égaux les uns en face des autres lors de leur sortie. Les plus riches écrasent les plus petits, à de rares exceptions près (heureusement).

Silverwitch


Michel Vaillant, ça a fait un sacré four malgré un tapage médiatique bien orchestré... 800 000 entrées, c'est faiblard.

Par contre, le Retour du Roi en est déjà à 3 millions d'entrées en seulement une semaine d'exploitation (avec 993 copies).


Shunt,

Tu te rends compte de ce que ça veut dire? Deux films en France mobilisent à eux deux près de deux mille écrans...C'est lamentable. Quant au succès de LSDA, c'est la plus gigantesque entreprise marketing avec Star Wars des vingt dernières années au cinéma (loin devant les Matrix).

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Messagede Shunt le 26 Déc 2003, 18:00

silverwitch a écrit:Shunt,

Tu te rends compte de ce que ça veut dire? Deux films en France mobilisent à eux deux près de deux mille écrans...C'est lamentable. Quant au succès de LSDA, c'est la plus gigantesque entreprise marketing avec Star Wars des vingt dernières années au cinéma (loin devant les Matrix).

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Même sans marketing, le film aurait cartonné, quand tu sais que la trilogie originale de Tolkien a été le livre le plus lu dans le monde au XXe siècle, derrière la Bible.
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Messagede Shunt le 26 Déc 2003, 18:02

silverwitch a écrit:Shunt,

Tu te rends compte de ce que ça veut dire? Deux films en France mobilisent à eux deux près de deux mille écrans...C'est lamentable.


En même, c'est en projetant des films comme le SDA, qu'une salle magique comme le Max Linder n'a pas encore fermé...
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Messagede Silverwitch le 26 Déc 2003, 18:03

Shunt a écrit:Même sans marketing, le film aurait cartonné, quand tu sais que la trilogie originale de Tolkien a été le livre le plus lu dans le monde au XXe siècle, derrière la Bible.


Shunt,

Ouaip. Rappelle-moi le destin de l'adaptation de Bakshi?

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Messagede Shunt le 26 Déc 2003, 18:05

L'un des gros cartons de l'année, c'est "Goodbye Lenin" qui a fait 1.2 million d'entrée avec seulement 190 copies... soit une moyenne de 6300 spectateurs par salle ! Le double du Seigneur des Anneaux :eek:
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Messagede Shunt le 26 Déc 2003, 18:07

silverwitch a écrit:
Shunt a écrit:Même sans marketing, le film aurait cartonné, quand tu sais que la trilogie originale de Tolkien a été le livre le plus lu dans le monde au XXe siècle, derrière la Bible.


Shunt,

Ouaip. Rappelle-moi le destin de l'adaptation de Bakshi?

Silverwitch


Très juste... :o Mais le fait que ce soit un dessin animé y a peut-être contribué...
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Messagede Silverwitch le 26 Déc 2003, 18:08

Shunt a écrit:
silverwitch a écrit:Shunt,

Tu te rends compte de ce que ça veut dire? Deux films en France mobilisent à eux deux près de deux mille écrans...C'est lamentable.


En même, c'est en projetant des films comme le SDA, qu'une salle magique comme le Max Linder n'a pas encore fermé...


Shunt,

Tu prends le problème à l'envers. C'est le même système qui coule les grandes salles et qui coulera le Max Linder plus ou moins prochainement. C'est quand même assez naïf comme affirmation Shunt...

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Messagede Silverwitch le 26 Déc 2003, 18:09

Shunt a écrit:L'un des gros cartons de l'année, c'est "Goodbye Lenin" qui a fait 1.2 million d'entrée avec seulement 190 copies... soit une moyenne de 6300 spectateurs par salle ! Le double du Seigneur des Anneaux :eek:


Shunt,

Oui cela arrive tous les ans environ, un succès important d'un film plus petit. En France je crois que le plus gros succès dans ce genre est celui de "Trois hommes et un couffin".

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Messagede Shunt le 26 Déc 2003, 18:19

silverwitch a écrit:Shunt,

Tu prends le problème à l'envers. C'est le même système qui coule les grandes salles et qui coulera le Max Linder plus ou moins prochainement. C'est quand même assez naïf comme affirmation Shunt...

Silverwitch


Qu'est-ce qu'il faudrait faire ? Limiter le nombre de copies pour un film ? La désertion des salles de ciné, ce n'est pas seulement un problème de distribution... le coût de la place est de plus en plus élevé, le développement du DVD et de films disponibles 4 mois à peine après leur sortie en salle, les chaînes du câble, le piratage Internet... tout ça y contribue.
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Messagede Silverwitch le 26 Déc 2003, 18:26

Shunt a écrit:Qu'est-ce qu'il faudrait faire ? Limiter le nombre de copies pour un film ? La désertion des salles de ciné, ce n'est pas seulement un problème de distribution... le coût de la place est de plus en plus élevé, le développement du DVD et de films disponibles 4 mois à peine après leur sortie en salle, les chaînes du câble, le piratage Internet... tout ça y contribue.


Shunt,

Ce n'est pas le problème. Tu ne peux pas décemment affirmer que c'est LSDA qui sauve le Max Linder! Ce n'est pas sérieux.

Sinon effectivement il faut envisager le problème dans sa globalité: il concerne la distribution, donc le nombre de copies par rapport au nombre d'écrans, le nombre de films qui sortent chaque semaine et la fréquence de renouvellement, la question du DVD, des vidéo-clubs, de la télévision. Certes. Mais il faut prendre le problème d'abord à la source. Si on ne peut le faire la suite logique est la politique de distribution catastropique qui accroit de manière mécanique les injustices. Alors oui que deux films occupent en même temps deux mille écrans (plus d'1/4 des écrans?), c'est indécent.

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Messagede Shunt le 26 Déc 2003, 18:39

silverwitch a écrit:Shunt,

Ce n'est pas le problème. Tu ne peux pas décemment affirmer que c'est LSDA qui sauve le Max Linder! Ce n'est pas sérieux.


Je ne connais pas leur comptabilité, mais j'ai l'impression que la salle attire pas mal de monde en ce moment... ça ne peut que faire du bien à leurs finances, non ?

Mais il faut prendre le problème d'abord à la source. Si on ne peut le faire la suite logique est la politique de distribution catastropique qui accroit de manière mécanique les injustices. Alors oui que deux films occupent en même temps deux mille écrans (plus d'1/4 des écrans?), c'est indécent.

Silverwitch


Dans une logique de pluralité, oui, mais du point de vue des exploitants de salle, serait-ce une bonne chose ? Imagine qu'il n'y ait que 300 copies pour le SDA, où iraient en priorité ces copies si ce n'est vers les grands multiplexes (au détriment des petites cinoches de centre-ville, en Province)...

...je ne suis pas sur que les exploitants de salle seraient particulièrement heureux. Leur but, c'est quand même qu'un maximum de monde fréquente leur salle, non ? Si on les prive des quelques films aimants de l'année, ils vont forcément faire la gueule, sauf à se reconvertir en salle subventionnée d'art et d'essai... je pense qu'au final, en réduisant le nombre de copies d'un film, on garantirait une plus grande diversité, mais on risquerait d'accélérer le mouvement de disparition des salles...

...c'est clairement un arbitrage à faire entre les exploitants et distributeurs d'un côté, et les producteurs indépendants de l'autre. Je ne pense pas que la solution soit si évidente que tu le prétends... je maintiens qu'à l'heure actuelle et dans le contexte actuel, un film comme le SDA est une bouffée d'air frais pour des salles indépendantes comme le Max Linder ou certains cinémas de province.
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Messagede Silverwitch le 26 Déc 2003, 18:46

Shunt a écrit:
Je ne connais pas leur comptabilité, mais j'ai l'impression que la salle attire pas mal de monde en ce moment... ça ne peut que faire du bien à leurs finances, non ?


Oui Shunt. Le problème c'est que tu fais une analyse à ultra-court terme. C'est comme si un type qui vole dans ton sac depuis cinq ans, te donne de temps en temps les moyens d'acheter à manger, tu ne vas pas le remercier en plus!



Shunt a écrit:Dans une logique de pluralité, oui, mais du point de vue des exploitants de salle, serait-ce une bonne chose ? Imagine qu'il n'y ait que 300 copies pour le SDA, où iraient en priorité ces copies si ce n'est vers les grands multiplexes (au détriment des petites cinoches de centre-ville, en Province)...

...je ne suis pas sur que les exploitants de salle seraient particulièrement heureux. Leur but, c'est quand même qu'un maximum de monde fréquente leur salle, non ? Si on les prive des quelques films aimants de l'année, ils vont forcément faire la gueule, sauf à se reconvertir en salle subventionnée d'art et d'essai... je pense qu'au final, en réduisant le nombre de copies d'un film, on garantirait une plus grande diversité, mais on risquerait d'accélérer le mouvement de disparition des salles...

...c'est clairement un arbitrage à faire entre les exploitants et distributeurs d'un côté, et les producteurs indépendants de l'autre. Je ne pense pas que la solution soit si évidente que tu le prétends... je maintiens qu'à l'heure actuelle et dans le contexte actuel, un film comme le SDA est une bouffée d'air frais pour des salles indépendantes comme le Max Linder ou certains cinémas de province.


Oui Shunt, sauf que les petits exploitants sont déjà écrasés par les cinémas des groupes (Gaumont, Pathé, UGC, voire MK2 à Paris). Comment peuvent-ils survivre? C'est la même logique que pour le Max Linder, la politique de distribution combinée (puisque distributeurs et exploitants sont ensemble, ce sont les memes groupes) détruit les petits cinémas. Là aussi il faudrait qu'ils remercient une aumône par an?

Mais surtout cette politique est agressive parce qu'en plus le nombre d'écrans est limité Shunt hein...Mathématiquement si les gens ont moins de choix, ils se concentrent sur moins de films. Alors d'autres sont sacrifiés pour faire de la place. Il est nécessaire de rompre cette logique qui ne laisse pas le temps aux films de trouver un public. Et tu sais très bien comment ça fonctionne. Le destin d'un film est sauf exception scellé en trois jours.

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