Shunt a écrit:silverwitch a écrit:Je ne vois pas pourquoi: soit le "mariage" homosexuel est un simple accompagnement, une modification très mineure et alors il suffisait d'amender marginalement le PACS sur des questions patrimoniales et de mettre en place une circulaire pour simplifier les questions d'adoption dans les très rares cas qui se présentent (décès d'un parent, par exemple).
Non, il ne suffit pas d'amender le PACS. Pour deux raisons :
1. si tu redéfinis le PACS, quid des PACS contractualisés depuis plus d'une décennie ? Rétroactivité or not ?
2. si tu intègres au PACS des dispositions jusqu'ici réservées au mariage, tu affaiblis que tu le veuilles ou non le mariage.
1. De la même manière qu'on a amendé le PACS en 2004 pour l'imposition commune ou en 2006 en transformant la communauté de biens de fait instaurée par ce contrat à une réelle séparation de biens. C'est une modification technique mineure dans une règlementation contractuelle. Une simple déclaration notariée permet aux PACS enregistrés avant l'amendement de s'aligner sur les nouvelles dispositions administratives, c'est ce qu'on appelle une
modification de pacte et ça se fait couramment.
Quant à la question de l'adoption, ce sont avant tout des cas particuliers qui peuvent être traités par une circulaire similaire à la circulaire Taubira sur la GPA, sans créer un "droit à l'adoption", contenu de manière implicite par l'emploi du mot "mariage" et explicite par le projet de loi et son caractère
prescriptif (on y reviendra peut-être plus bas).
2. Le PACS permet déjà une forme de transmission patrimoniale avec le régime d'indivision. Je n'y suis guère favorable, mais c'est un autre sujet. Rien n'empêche son extension à l'héritage, sinon une simple et mineure modification technique du PACS sur des questions successorales. Quand on sait avec quelle libéralité on peut transmettre avec un dispositif fiscal comme l'Assurance-vie...
Shunt a écrit:L'élargissement du mariage aux couples homos ne change rien juridiquement aux mariages déjà contractés.
Ce n'est pas un
élargissement, mais une transformation radicale du sens universel, historique et anthropologique du mariage. Contrairement à ton affirmation hâtive, le projet de loi dit du "mariage pour tous" modifie en profondeur l'institution du mariage, et le Code Civil, puisqu'il est loisible de qualifier ce projet de loi de machine de guerre contre la paternité et la maternité (la présomption d'engendrement et l'enfantement) au profit de l'instauration d'une nouvelle définition, la
parentalité. En termes de philosophie du projet, on peut sans exagération affirmer qu'il s'agit bien de substituer l'orientation sexuelle (ou le "genre") à la
sexuation, c'est à dire la différence des sexes. C'est la pierre angulaire d'une entreprise qui vise à délier la reproduction de son caractère sexué sur le plan moral, et de la filiation traditionnelle sur le plan juridique.
Si tu ne crées pas un droit à l'enfant, comment justifier cette discrimination légale que constitue le "mariage" homosexuel vis à vis des célibataires ?
C'est un argument théorique que tu répètes en boucle mais je ne vois toujours pas ce qui caractérise cette discrimination.
C'est simple: sans l'instauration d'un "droit à l'enfant", comment arguer de l'utilité commune qui justifierait une distinction sociale accordée à une union homosexuelle ? Cela contredit un principe fondateur de notre république depuis la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, dès son article 1er:
Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l'utilité commune.
Une union homosexuelle est stérile, et tu fais comme si on devait considérer qu'elle ne l'est potentiellement pas, tout en affirmant que tu es opposé à la PMA comme à la GPA. Tu comprends le problème ?
Sauf que la PMA et la GPA ne sont pas les seuls moyens pour un couple homo d'avoir des enfants. La PMA et la GPA concernent d'ailleurs aussi les couples hétéros.
Visiblement, tu ne comprends pas le problème... C'est pas bien grave, je peux recommencer. Reprends les deux principes essentiels de la loi (connus depuis Aristote):
la loi est toujours quelque chose de général; à situation différente, traitement différent.
- L'institution du mariage est invariablement, historiquement et universellement liée à la reproduction et à la filiation, c'est-à-dire qu'elle instaure un ordre social juridique symbolique, celui de la famille qui repose sur la
sexuation. On peut ainsi définir le mariage comme l'institution de la différence des sexes, où le foyer de la rencontre entre un ordre naturel et un ordre culturel.
- Une "union" homosexuelle est invariablement stérile, quand une union hétérosexuelle est présumée féconde. Au sens figuré, on peut peut ainsi définir ce qui distingue ces deux formes, comme la distinction entre un "couple" et une "paire".
Le projet de loi confond et trahit les deux principes que je rappelle plus haut:
- Il met sur le même plan deux unions qui n'ont pas la même portée ou au sens propre, la même valeur.
- Il confond dans un même traitement deux situations différentes, la généralité (fertilité vs stérilité) et l'exception (la possibilité d'une adoption)
Cette confusion et cette trahison se produit de manière logique, comme je le démontre: le mariage est lié à la reproduction et à la filiation (ordre naturel et ordre culturel), le projet de loi le confirme en liant explicitement le "mariage" homosexuel à l'adoption par les couples homosexuels. Tu reprends l'argumentaire politique des promoteurs de la loi, en confondant la qualité technique du projet et le caractère de prescription de la loi: la loi ne délivre pas un agrément automatique d'adoption sur le plan technique, mais elle invente une fiction déliée de l'ordre naturel, puisque mettant sur le même plan la stérilité et la présomption de fertilité. Ainsi la loi prescrit. Tu le vois bien quand tu défends la "normalisation" de l'homosexualité comme justification au "mariage" homosexuel, mais tu ne le vois pas quand le texte prescrit un "droit à l'enfant".
Non, ils ne sont pas illégaux. Sinon, qu'attend-on pour poursuivre ces personnes en justice ?
Qu'en sais-tu ?
Pour moi, "droit à l'enfant" induit un automatisme, un systématisme. Qui est marié, doit avoir un enfant s'il le désire. Juridiquement, l'adoption reste la seule procédure par laquelle un homosexuel peut devenir le parent d'un enfant qui n'est pas biologiquement le sien. Et l'adoption est par essence un processus sélectif, validé par un juge, qui n'accorde aucunement la parentalité de façon automatique.
C'est bien le problème. Tu défends une loi qui met sur le même plan deux situations qui n'ont rien à voir (stérilité vs présomption de fertilité), quand la justification théorique repose sur une automatisation. Comment défendre une
utilité commune d'une union homosexuelle qui justifie sa distinction juridique,sociale, culturelle, morale et symbolique, sans instaurer un "droit à l'enfant" ? Ça ne tient pas sur le plan conceptuel, c'est contraire aux principes républicains, et je pense que tu te racontes des histoires, parce que tu t'es entiché de l'idée selon laquelle la loi devrait contribuer à "normaliser" l'homosexualité. Ce que tu ne comprends pas, c'est que d'un même mouvement, la loi normalise également le "droit à l'enfant", puisque c'est la définition même du mariage que la présomption de la fertilité. Il est donc inacceptable de mettre sur le même plan un règlement (celui qui pourrait simplifier les exceptions, comme l'adoption d'un enfant par le conjoint dans un
foyer homoparental) et une institution comme le mariage républicain et de prétendre que fertilité et stérilité sont de même nature, tout en combattant la généralisation de la PMA et la légalisation de la GPA. C'est absurde, mais j'espère que cette fois tu l'auras compris.
Il suffirait donc que la majorité présidentielle et le gouvernement appliquent une promesse de campagne pour que ton argumentaire, un rien cynique, tombe.
Je pense que tu serais très surprise du résultat d'un référendum sur le sujet. Mais comme nos institutions ne permettent pas un tel recours, cette discussion est vaine.
Je ne lis pas dans le marc de café, et je ne crois pas que l'avenir est écrit. Il me semble que c'est une question qui divise les citoyens, qui divise nos représentants élus, ce qui se traduit notamment par des manifestations massives, c'est au Peuple d'exprimer sa volonté, quelle qu'en soit l'issue.
Je remarque enfin qu'il serait plus simple d'écrire un projet de loi et de le faire voter, plutôt que de signer le décret d'application d'une loi qui a déjà été votée ? Je cite le programme du Parti Socialiste (je souligne):
Pour nous, c’est clair : en 2012, il ne faudra pas seulement rétablir
une démocratie institutionnelle équilibrée, mais il faudra
répondre aux aspirations des Français qui veulent une démocratie
plus représentative, plus responsable, plus transparente, plus
participative. Ces orientations seront soumises aux Français lors
d’un référendum organisé avant la fin de l’année 2012.
3.1.3 Rendre la démocratie plus participative
De nombreux citoyens s’organisent hors des cadres traditionnels,
développent de nouvelles formes d’engagement et veulent participer 54
plus directement aux choix publics. Avec la gauche, les leviers
susceptibles d’élargir les modes d’expression démocratique seront
mieux utilisés. Le Conseil économique, social et environnemental, qui
devra être régulièrement consulté dans l’élaboration des lois, pourra
prendre l’initiative d’organiser des forums citoyens participatifs. Ils
aideront à la prise de décision publique et ses membres seront tirés
au sort sur le modèle des tribunaux d’assises.
Le référendum d’initiative partagée, créé par la révision
constitutionnelle de 2008, est trop étroitement encadré. Nous
modifierons la loi pour que le Parlement ne puisse bloquer toute
proposition de loi référendaire soutenue par 1/5e des parlementaires
et 1/10e des électeurs.