How have we lost the eternal?

Le salon francophone est dédié aux sujets n'ayant pas de lien avec la F1 ni autres sports mécaniques. C'est un salon pour se détendre en refaisant le monde.

Modérateurs: Garion, Silverwitch

How have we lost the eternal?

Messagede Hugues le 03 Aoû 2011, 22:45

Neoflo a écrit:
qu'elle nous éloigne de notre prime nature

Tu sous-entends donc que dans la nature de l'homme il y a la notion de nature (sous la forme de terre, d'eau, des arbres)... ce qui n'est pas acquis pour moi.
On retrouve donc bien dans ce film et dans tes propos, cet ancrage très important de la religion, qui transparait pour moi via tous ces éléments.
En quoi l'homme est-il rattaché à la nature ? En quoi le fait de s'emerveiller sur la beauté de la nature doit-il nous renvoyer à une sorte de commencement ?


Par Nature, je ne crois pas que tu doives lire seulement arbre, eau, terre..)
Par Nature, il faut lire, le Monde.

Nous sommes arrachés à la contemplation du Monde, dans le sens où nous vivons toujours dans un ailleurs, toujours dans la poursuite d'une félicité (que nous nous fixons) à venir, sans même voir le Monde tel qu'il est dans l'instant présent. Au lieu de voir la Terre, nous cherchons l'Univers, au lieu de voir le Monde, nous cherchons le moi.
Ce sont ces Indes que poursuit John Smith.
C'est cette réussite professionnelle que poursuit Mr O'Brien.

Avant, cette quête d'ailleurs, que nous assouvissions par les oeuvres, nous ramenait au Monde, nous réconciliait avec l'acceptation de notre finitude.
Mais dans une société où le travail n'est souvent plus qu'avilissant et ne permet plus de se réaliser, pour faire accepter cette vie misérable, les oeuvres sont détournées de leur usage. On contrôle l'ailleurs l'imaginaire, pour mieux faire accepter cette vie mutilée. D'où cette peinture de surhommes, d'où des êtres dénués de limites, d'où

Tu peux ne pas partager le constat du dernier paragraphe. Mais dire le reste, ça n'est pas transmettre un propos forcément religieux. C'est ce qu'écrivait, sous d'autres mots, Heidegger. C'est ce que dit Malick.
Nous sommes des Êtres jetés dans le Monde. Par essence, nous ne savons tout à fait être. Nous sommes détourné de l'être en permanence par la quotidiennté.
Pourtant nous pouvons nous approcher de l'être, que nous entendons, indistinctement, en contemplant le Monde, en décidant de l'habiter, au lieu de le transformer, par la Technique. Ou dit autrement, poursuivre cet ailleurs toujours insatisfaisant.

Contempler le monde s'acquiert par exercice, par habitude, par goût. Contempler c'est un des fruits inestimable de l'éducation, elle, l'éducation, qui prépare notre cerveau à l'accueil du monde par l'accueil préalable des choses qui ne relèvent pas de l'expérience et du vécu. Plonger ses yeux dans les oeuvres, nous constitue un cerveau de réserve pour sentir et juger, pour mémoriser et exercer la réflexion. Le cerveau a un besoin urgent de distance par rapport à l'expérience immédiate, la sensation tyrannique, la dictature de la réaction. Contempler, c'est créer en soi une chambre de protection et une chambre de restitution créative du réel, où nait la vraie beauté du monde, une remontée de l'intime qui se fait à partir des mémoires délaissées de notre vie. De notre vraie vie.
Pas celle qui est absorbée, inquiétée, mobilisée pour "toutes fins utiles ". Pour ce que Heidegger appelait la quotidienneté.
L'invisible ainsi est l'écorce vive du réel.

Pocahontas montre finalement qu'elle est partout chez elle. Que partout il y a à contempler. Elle nous apprend à habiter le Monde.

Mais tout ça, silverwitch en parlera mieux que moi.

Hugues (qui n'en est pas pour autant absolument d'accord avec Shoemaker, sur tout ce qu'il a écrit, quelques passages prêtent à débat, mais dans l'ensemble c'est très juste)
Hugues
 

How have we lost the eternal?

Messagede Shoemaker le 03 Aoû 2011, 23:59

Cortese a écrit:Donc, oui je n'aime définitivement pas l'histoire de Pocahontas (d'ailleurs il y a honte dans son nom :lol: ), que ce soit par ce vieux facho de Disney ou par ce hippie de Malick, au sujet duquel je me permettrais de penser qu'il n'a vraiment aucune conscience politique.


Ok, je vois ce que tu veux dire, donc...
Mais je te trouve un peu dur avec ce pauvre Malick.

Juste quelques remarques...

Combien même j'ai écrit que Malick pense que l'amour transcende tout, même les clivages résultant de la colonisation, au final, dans son film, il y a une sorte de constat d'échec.

L'amour en soi, est capable de briser les frontières, de montrer ce qu'il peut y avoir au-delà. Mais le fait est là, dans ce film, dans son interprétation de cette historiette d'amour, c'est l'histoire d'un échec.

L'amour permet peut-être à Smith de voir le monde sans voile, mais cela ne dure qu'un temps, juste un instant de vie, et au final, sa culture et sa condition sociale (au service de la Monarchie Anglaise avant tout) finissent par le soustraire à cette vision, et il envoie balader l'indigène d'une chiquenaude ("dans deux mois, tu lui diras que je suis mort...") et il se casse vite fait sans dire au revoir. Quant à la pauvre Pocahontas, pareil : l'amour transcende les conditions sociales, culturelles, et c'est une vérité en soi. Mais avec ses limites. Il existe une autre vérité (toute aussi vraie et puissante), c'est le poids des clivages culturels et sociaux : pareillement que pour Smith, Pocahontas, au final est taraudée, mal à l'aise (même si elle semble émerveillée, on ne la sent pas heureuse), dans l'autre monde qui n'est pas le sien, qui n'est pas le vrai. Elle finit par voir Smith tel qu'il est. Elle finit par constater que son mariage avec le mec "sympa" est un leurre, une fuite en avant : absence d'amour... Puis, avant sa mort, elle revient à elle-même, vers ses origines, vers sa vérité, vers son vrai monde, monde d'où son père l'a chassé irrémédiablement, préservant de ce fait, "l'honneur des Indiens" de la "trahison" de sa fille. Donc Malick reste relativement conscient de ce problème du rapport colonialiste-indigène...

Tout cela est paradoxal, certes.

Mais une chose est sûre, l'histoire de Pocahontas, est une histoire triste. Malick nous montre la voie vers la beauté du monde, mais ils nous montre aussi combien cette voie est ardue, combien elle est parsemée d'embûches, combien compte le poids des murailles que l'homme construit autour de lui-même (les colons, à peine arrivés dans ce monde vierge, d'une beauté époustouflante, commencent par bâtir un MUR !).

Ceci dit, moi j'aime bien les hippies ! :lol: C'est ce que les Américains ont donné de plus sympa au monde, avec MacIntosh et le Blues ! Et n'oublie pas que le mouvement hippie a été bon an mal an, à l'origine du mouvement british Blues : t'as oublié la tronche de Clapton avec les Cream, ou de Mayall campant du côté de Laurel Canyon, en totale osmose avec la nature ? :lol:
Quant à la conscience politique, tu imagines une seule seconde que tout soit montré EN ART (parce qu'on est dans l'art, là), à travers le prisme de la lutte des classes ? Certes, ça serait inattaquable, du point de vue politique, de mon point de vue. Mais on s'emmerderait un peu, non ?
"c'est quoi le blues". Toujours les mêmes histoires, celles qui font vaciller les mondes et les empires.
John Lee Hooker
Shoemaker
 
Messages: 22441
Inscription: 24 Nov 2003, 12:11
Localisation: Out of Africa

How have we lost the eternal?

Messagede Hugues le 04 Aoû 2011, 00:00

Cortese a écrit:Ah mais j'avais expliqué je crois la raison principale pour laquelle je n'avais pas aimé "Le Nouveau monde", c'était que le sujet du film (la relation amoureuse entre un colonisateur et une colonisée) me renvoyait à ma propre condition de colonisé. Bon, dans ma vie d'adulte ça n'aurait pas eu de conséquence (heureusement), sauf que, en tant que dessinateur, je me suis retrouvé confronté à une situation concrète : un mec (Français de métropole) tenait absolument à me faire dessiner son scénario, qui était justement avec une sorte de Pocahontas arabe. J'avais donné mon accord un peu à la légère au début, et puis peu à peu, je me suis senti mal à l'aise et j'ai fini par refuser de faire le boulot (ce qui n'était pas malin vu que le mec est aujourd'hui un éditeur de BD). C'est en réfléchissant à la situation amoureuse qu'il me décrivait que je me suis braqué. Les Français nous avaient tout pris, mais ils ne nous ont jamais pris nos femmes. Voilà, je sais que ça reflète une condition inégalitaire entre hommes et femmes (mais ne rêvons pas, en situation de guerre, c'est une inégalité qui referait systématiquement surface dans n'importe quelle société, même en Suède), les femmes ont de tout temps été un enjeu dans les guerres, un trophée. Et en réfléchissant encore, je me suis rendu compte que c'était un schéma récurrent dans l'imaginaire colonial, je repensais à cette conférence que nous avait fait un cinéaste (très à gauche) à Alger en 1990, et où il nous présentait une série de cartes postales représentant des Algériennes dénudées (des prostituées présentées comme des dames de la vie quotidienne), et où il montrait comment la domination coloniale visait à humilier l'homme colonisé à travers ses femmes.
Donc, oui je n'aime définitivement pas l'histoire de Pocahontas (d'ailleurs il y a honte dans son nom :lol: ), que ce soit par ce vieux facho de Disney ou par ce hippie de Malick, au sujet duquel je me permettrais de penser qu'il n'a vraiment aucune conscience politique.


Je comprends ton sentiment Cortese.
Cependant il faut voir au delà de cette histoire. Comment en dépit de l'arrachement à sa patrie, à sa culture, Pocahontas prend, par deux fois, à JamesTown, puis en Angleterre, le monde tel qu'il est, l'habite, pour y trouver "de la joie en tout ce qu'[elle] voi[t]".

Quant à la conscience politique, elle n'est je crois pas absente.
J'ai retrouvé ces derniers jours, justement, quelques documents qui permettent de savoir, par des témoignages de seconde main, pourquoi Malick avait choisi de mettre ce récit à l'image, outre que le fait que ça lui facilita en 2003-2004, la réunion d'un budget.

L'un des directeur de New Line:
"Terrence m'a dit très tôt. "C'est notre mère originelle", ce qui signifie que son séjour terrestre, son périple est celui de l'Amérique en elle-même, puisqu'elle va voyager de l'Américaine native, à la femme qui embrasse la civilisation européenne quand elle est baptisée et se rend à Londres.."

Sarah Green, productrice de Malick depuis 2003, sur une journée de 2003 (se rappeler le contexte d'alors) :
"Un jour, il m'a tendu ce script, sur lequel il avait travaillé voilà environ 25 ans*, et m'a dit, 'Je pense qu'il est temps pour ça, maintenant.' J'ai approuvé. C'est un film sur la politique de notre pays, et sur notre identité alors qu'elle était sur le point d'être formée. C'est un grand rappel de deux cultures qui sont méfiantes, mais qui doivent se faire face."

*: en fait, il serait plus correct d'écrire "sur lequel il avait travaillé pour la première fois, voilà environ 25 ans", puisqu'il n'a cessé d'y revenir..

Hugues
Hugues
 

How have we lost the eternal?

Messagede Shoemaker le 04 Aoû 2011, 00:06

Hugues a écrit:Pocahontas montre finalement qu'elle est partout chez elle. Que partout il y a à contempler. Elle nous apprend à habiter le Monde.

Il m'a semblé voir Pocahontas vers la fin, faire marche arrière. Elle semble prendre conscience qu'elle s'est "menti" à elle-même, et qu'elle a désiré retrouver son "authenticité", avant de mourir. Je suis bien curieux de savoir ce que Malick lui-même en pensait.
"c'est quoi le blues". Toujours les mêmes histoires, celles qui font vaciller les mondes et les empires.
John Lee Hooker
Shoemaker
 
Messages: 22441
Inscription: 24 Nov 2003, 12:11
Localisation: Out of Africa

How have we lost the eternal?

Messagede Maverick le 04 Aoû 2011, 00:06

A chaque fois que je lis Malick, j'ai l'impression de lire mon pseudo. Bon voilà voilà. Sur ce, bonne nuit. :D
Hamilton, champion du monde de F1 moral 2021
Verstappen, champion du monde FIA/Masi 2021

Image
Avatar de l'utilisateur
Maverick
Bête de sexe
 
Messages: 41397
Inscription: 22 Fév 2003, 00:02
Localisation: Dans ton cul !!

How have we lost the eternal?

Messagede Shoemaker le 04 Aoû 2011, 00:14

Hugues a écrit:"Un jour, il m'a tendu ce script, sur lequel il avait travaillé voilà environ 25 ans*, et m'a dit, 'Je pense qu'il est temps pour ça, maintenant.' J'ai approuvé. C'est un film sur la politique de notre pays, et sur notre identité alors qu'elle était sur le point d'être formée. C'est un grand rappel de deux cultures qui sont méfiantes, mais qui doivent se faire face."


Sur ce point précis, je reste très dubitatif sur la démarche de Malick. Il ne faut pas oublier alors, que dans l'affaire, l'une des deux cultures a proprement génocidé l'autre, et qu'elle ne s'en est jamais excusée.

S'il continue comme ça, Malick, je vais lui appliquer la malheureuse remarque que Chevènement à collé à Eva Jolly, en prétendant qu'elle n'a pas bien intégré l'Histoire de la France. l'Histoire des USA, en ce qui concerne donc Malick ! :lol:

(Bonne nuit Mav !)
"c'est quoi le blues". Toujours les mêmes histoires, celles qui font vaciller les mondes et les empires.
John Lee Hooker
Shoemaker
 
Messages: 22441
Inscription: 24 Nov 2003, 12:11
Localisation: Out of Africa

How have we lost the eternal?

Messagede Hugues le 04 Aoû 2011, 00:28

Shoemaker a écrit:
Hugues a écrit:Pocahontas montre finalement qu'elle est partout chez elle. Que partout il y a à contempler. Elle nous apprend à habiter le Monde.

Il m'a semblé voir Pocahontas vers la fin, faire marche arrière. Elle semble prendre conscience qu'elle s'est "menti" à elle-même, et qu'elle a désiré retrouver son "authenticité", avant de mourir. Je suis bien curieux de savoir ce que Malick lui-même en pensait.


C'est justement à ce sujet que nous sommes en désaccord. Mais nous en reparlerons demain !

Hugues (comment nous t'éloignons du sommeil mon pauvre Shoemaker !)
Hugues
 

How have we lost the eternal?

Messagede Hugues le 04 Aoû 2011, 00:33

Shoemaker a écrit:
Hugues a écrit:"Un jour, il m'a tendu ce script, sur lequel il avait travaillé voilà environ 25 ans*, et m'a dit, 'Je pense qu'il est temps pour ça, maintenant.' J'ai approuvé. C'est un film sur la politique de notre pays, et sur notre identité alors qu'elle était sur le point d'être formée. C'est un grand rappel de deux cultures qui sont méfiantes, mais qui doivent se faire face."


Sur ce point précis, je reste très dubitatif sur la démarche de Malick. Il ne faut pas oublier alors, que dans l'affaire, l'une des deux cultures a proprement génocidé l'autre, et qu'elle ne s'en est jamais excusée.


Je crois qu'il ne voulait pas par là évoquer le reste de l'histoire, mais remémorer les premiers instants. Il faut les mots ci-dessus en rapport avec toute la politique post-11 septembre, et la "belle" invention de la guerre préventive pour masquer des guerres du pétrôle.

Hugues
Hugues
 

How have we lost the eternal?

Messagede Neoflo le 04 Aoû 2011, 00:54

Je n'ai pas le temps (et probablement pas votre prose) pour développer cela tu m'excuseras donc par avance d'avoir découpé ton message, mais le ton professoral (a l'opposé de l'avis de Shoemaker) et certains passages m'ont suffisament interpellé :

Hugues a écrit:Nous sommes arrachés à la contemplation du Monde, dans le sens où nous vivons toujours dans un ailleurs, toujours dans la poursuite d'une félicité (que nous nous fixons) à venir, sans même voir le Monde tel qu'il est dans l'instant présent. Au lieu de voir la Terre, nous cherchons l'Univers, au lieu de voir le Monde, nous cherchons le moi.

Tu m'indiques que nous vivons ailleurs, toujours à la recherche de quelque chose, sans contempler ce que nous avons en ce moment : "le monde". On retrouve bien là un principe religieux, de contemplation, béatification si on veut faire un parallèle avec la félicité, de ce monde, monde création d'un autre. Comtemple la beauté de ce que j'ai créé, et ne recherche point à t'en éloigner. C'est pourtant la nature même de l'homme de vouloir toujours voir plus loin, de toujours vouloir aller au délà.
Comptemplation est habituellement utilisé dans le cadre de l'art, art donc création, art "propriété" de l'espèce humaine, il m'apparait donc évident qu'ici le mot contemplation prend un autre sens, lui-même rattaché à la notion de Dieu ainsi il est très facile de comprendre la contemplation de l'art divin à travers les exemple que vous donnaient.

Avant, cette quête d'ailleurs, que nous assouvissions par les oeuvres, nous ramenait au Monde, nous réconciliait avec l'acceptation de notre finitude.
Mais dans une société où le travail n'est souvent plus qu'avilissant et ne permet plus de se réaliser, pour faire accepter cette vie misérable, les oeuvres sont détournées de leur usage. On contrôle l'ailleurs l'imaginaire, pour mieux faire accepter cette vie mutilée. D'où cette peinture de surhommes, d'où des êtres dénués de limites, d'où

d'ou ..?
Une critique du capitalisme intégré dans ce film, superbe, mais ce genre de propos/témoignages ... tel que semble l'être ce que vous décrivez est intemporel. L'homme qui essaye de dépasser ses limites, c'est l'homme tout simplement.

Tu peux ne pas partager le constat du dernier paragraphe.

C'est très gentil de m'accorder ce droit ...

Mais dire le reste, ça n'est pas transmettre un propos forcément religieux. C'est ce qu'écrivait, sous d'autres mots, Heidegger. C'est ce que dit Malick.
Nous sommes des Êtres jetés dans le Monde. Par essence, nous ne savons tout à fait être. Nous sommes détourné de l'être en permanence par la quotidiennté.
Pourtant nous pouvons nous approcher de l'être, que nous entendons, indistinctement, en contemplant le Monde, en décidant de l'habiter, au lieu de le transformer, par la Technique. Ou dit autrement, poursuivre cet ailleurs toujours insatisfaisant.

C'est incroyable, dans le sens surprenant, faux pour moi ... je trouve de dire que l'homme ne devrait pas transformer la nature qui l'entoure. Homo Sapiens, Homo Faber ou comme tu souhaites l'appeler, c'est justement cela qui fait l'homme, cette capacité à transformer, à modifier le monde qui l'entoure par la technique....
Neoflo
 
Messages: 2531
Inscription: 25 Fév 2003, 00:58
Localisation: Meudon, France

How have we lost the eternal?

Messagede Hugues le 04 Aoû 2011, 03:54

Neoflo a écrit:Je n'ai pas le temps (et probablement pas votre prose) pour développer cela tu m'excuseras donc par avance d'avoir découpé ton message, mais le ton professoral (a l'opposé de l'avis de Shoemaker) et certains passages m'ont suffisament interpellé.

Pas de souci... ;)
Et rassure toi le ton n'était pas professoral (mais bon je comprends bien en le lisant qu'on puisse le percevoir ainsi)

Je ne te réponds pour le moment qu'à tes derniers mots, entre deux périodes de sommeil :
Neoflo a écrit:
Mais dire le reste, ça n'est pas transmettre un propos forcément religieux. C'est ce qu'écrivait, sous d'autres mots, Heidegger. C'est ce que dit Malick.
Nous sommes des Êtres jetés dans le Monde. Par essence, nous ne savons tout à fait être. Nous sommes détourné de l'être en permanence par la quotidiennté.
Pourtant nous pouvons nous approcher de l'être, que nous entendons, indistinctement, en contemplant le Monde, en décidant de l'habiter, au lieu de le transformer, par la Technique. Ou dit autrement, poursuivre cet ailleurs toujours insatisfaisant.

C'est incroyable, dans le sens surprenant, faux pour moi ... je trouve de dire que l'homme ne devrait pas transformer la nature qui l'entoure. Homo Sapiens, Homo Faber ou comme tu souhaites l'appeler, c'est justement cela qui fait l'homme, cette capacité à transformer, à modifier le monde qui l'entoure par la technique....


Je comprends très bien ton regard, je comprends bien que, ainsi que ça nous est toujours dit, la technique est ce qui nous définit, dans le règne animal.
Mais justement, il s'agit de deux questions différentes: il ne s'agit pas là d'exprimer ce qui nous différencie de l'animal, il s'agit d'exprimer ce qui peut nous permettre de mieux vivre notre condition. De résoudre aussi la tension née de notre mortalité. De se rapprocher de l'Être, dont nous sommes à jamais séparé, parce que êtres jeté dans le monde. En somme, pour le dire différemment mieux vivre sa vie.

Hugues
Hugues
 

How have we lost the eternal?

Messagede Nuvo le 04 Aoû 2011, 08:21

J'ai vu la première partie du film, ou Smith est semi-prisonnier chez les amérindiens.
J'aime le style de Malick, les plans, la musique, ça porte !
Je l'idéalise certainement trop mais pour moi cette civilisation a été l'une de celle qui a vécu le plus en harmonie avec la nature et nous, gros cochons d'européens, nous avons tout salopé.
Bon dans le même temps 80% de mes ancêtres étaient des cultivateurs du Maine :D Des gens certainement proches de la nature aussi ! Et dans la survie permanente. Les 15% autres étaient des artisans et cultivateurs de la Manche. Reste 5% de bordelais, de savoyards, de négociants du Var et d'italiens. Alors ouf, j'espère qu'aucun n'a participé à ça :-P (même si j'ai des navigateurs et capitaine de vaisseau à Toulon au 18e)
Avatar de l'utilisateur
Nuvo
L'éternité et un jour
 
Messages: 16996
Inscription: 20 Fév 2003, 19:07

How have we lost the eternal?

Messagede Cortese le 04 Aoû 2011, 11:54

Hugues a écrit:
Cortese a écrit:Ah mais j'avais expliqué je crois la raison principale pour laquelle je n'avais pas aimé "Le Nouveau monde", c'était que le sujet du film (la relation amoureuse entre un colonisateur et une colonisée) me renvoyait à ma propre condition de colonisé. Bon, dans ma vie d'adulte ça n'aurait pas eu de conséquence (heureusement), sauf que, en tant que dessinateur, je me suis retrouvé confronté à une situation concrète : un mec (Français de métropole) tenait absolument à me faire dessiner son scénario, qui était justement avec une sorte de Pocahontas arabe. J'avais donné mon accord un peu à la légère au début, et puis peu à peu, je me suis senti mal à l'aise et j'ai fini par refuser de faire le boulot (ce qui n'était pas malin vu que le mec est aujourd'hui un éditeur de BD). C'est en réfléchissant à la situation amoureuse qu'il me décrivait que je me suis braqué. Les Français nous avaient tout pris, mais ils ne nous ont jamais pris nos femmes. Voilà, je sais que ça reflète une condition inégalitaire entre hommes et femmes (mais ne rêvons pas, en situation de guerre, c'est une inégalité qui referait systématiquement surface dans n'importe quelle société, même en Suède), les femmes ont de tout temps été un enjeu dans les guerres, un trophée. Et en réfléchissant encore, je me suis rendu compte que c'était un schéma récurrent dans l'imaginaire colonial, je repensais à cette conférence que nous avait fait un cinéaste (très à gauche) à Alger en 1990, et où il nous présentait une série de cartes postales représentant des Algériennes dénudées (des prostituées présentées comme des dames de la vie quotidienne), et où il montrait comment la domination coloniale visait à humilier l'homme colonisé à travers ses femmes.
Donc, oui je n'aime définitivement pas l'histoire de Pocahontas (d'ailleurs il y a honte dans son nom :lol: ), que ce soit par ce vieux facho de Disney ou par ce hippie de Malick, au sujet duquel je me permettrais de penser qu'il n'a vraiment aucune conscience politique.


Je comprends ton sentiment Cortese.
Cependant il faut voir au delà de cette histoire. Comment en dépit de l'arrachement à sa patrie, à sa culture, Pocahontas prend, par deux fois, à JamesTown, puis en Angleterre, le monde tel qu'il est, l'habite, pour y trouver "de la joie en tout ce qu'[elle] voi[t]".

Quant à la conscience politique, elle n'est je crois pas absente.
J'ai retrouvé ces derniers jours, justement, quelques documents qui permettent de savoir, par des témoignages de seconde main, pourquoi Malick avait choisi de mettre ce récit à l'image, outre que le fait que ça lui facilita en 2003-2004, la réunion d'un budget.

L'un des directeur de New Line:
"Terrence m'a dit très tôt. "C'est notre mère originelle", ce qui signifie que son séjour terrestre, son périple est celui de l'Amérique en elle-même, puisqu'elle va voyager de l'Américaine native, à la femme qui embrasse la civilisation européenne quand elle est baptisée et se rend à Londres.."

Sarah Green, productrice de Malick depuis 2003, sur une journée de 2003 (se rappeler le contexte d'alors) :
"Un jour, il m'a tendu ce script, sur lequel il avait travaillé voilà environ 25 ans*, et m'a dit, 'Je pense qu'il est temps pour ça, maintenant.' J'ai approuvé. C'est un film sur la politique de notre pays, et sur notre identité alors qu'elle était sur le point d'être formée. C'est un grand rappel de deux cultures qui sont méfiantes, mais qui doivent se faire face."

*: en fait, il serait plus correct d'écrire "sur lequel il avait travaillé pour la première fois, voilà environ 25 ans", puisqu'il n'a cessé d'y revenir..

Hugues


Oui, je comprends bien, mais le film date de 2005. Non seulement il évoque d'une façon que je trouve discutable une romance entre un militaire commandant une expédition coloniale qui va aboutir sur le génocide quasi complet des colonisés (oserait on raconter sur le même ton une romance entre une juive polonaise et un officier de la Wehrmacht ?), un génocide pas vraiment assumé encore aujourd'hui par les Etats-Unis (province coloniale dissidente de l'empire britannique, qui se permettent de donner aujourd'hui comme nom de code à leur "ennemi public n°1" le nom du dernier héros résistant des colonisés ("Géronimo")), mais en plus il apparait dans un contexte de politique impériale des Etats-Unis qui ressemble fortement à une reprise de la poussée vers une "nouvelle frontière" où l'indigène musulman remplace l'Amérindien, et le pétrole, la Prairie ou les Black Hills. J'ai eu l'impression désagréable que Malick n'était pas intéressé par la politique belliqueuse de son pays, ce qui revient un peu quand même à l'approuver.
Puisque Shoemaker évoquait "Little Big Man", on se souvient que dans ce film il y avait aussi l'histoire d'une union entre un envahisseur et une autochtone, mais dans un contexte où cet envahisseur se réfugiait dans la tribu indienne et dans le contexte de la plus grande victoire des résistants contre l'envahisseur, ce que je trouve plus convenable.
Cortese
dieu
 
Messages: 33533
Inscription: 23 Fév 2003, 20:32

How have we lost the eternal?

Messagede Rainier le 04 Aoû 2011, 14:50

Nuvolari a écrit:Je l'idéalise certainement trop mais pour moi cette civilisation a été l'une de celle qui a vécu le plus en harmonie avec la nature et nous, gros cochons d'européens, nous avons tout salopé.


Oui je crois qu'on idealise vraiment trop une civilisation et sa soi disante harmonie avec la nature !

Quand j'etais adolescent, Zuma était l'un de mes albums préférés et surtout "Cortez the killer" :

Hate was just a legend
And war was never known
The people worked together
And they lifted many stones.
They carried them
To the flatlands
And they died along the way
But they built up
With their bare hands
What we still can't do today.


Malick, avec 30 ans de retard sur Neil Young, nous refait le coup d'une civilisation qui ne connaissait pas la haine, ni la cupidité, ni la jalousie, ni la propriété (j'en passe et des bien pires).
Pourtant, les guerres entre tribus existaient comme partout pour avoir plus de bisons, de terres à chasser ou à cultiver ...
Les ennemis étaient aussi massacrés, scalpés, violés ou réduits en esclavage.

Faudra que je retrouve mes sources(Arte avait passé un documentaire intèressant récemment sur ce sujet), mais la Nature a été asservie également : une région a été désertifiée dans les actuels USA suite à la déforestation et la construction de barrages pour permettre les cultures.
Ils n'avaient sans doute pas les mêmes moyens techniques que les Russes du XX° siècle avec la Mer d'Aral mais le principe de base était le même.

Moi je ne crois pas aux théses racistes défendues par Shoemaker, Malick ou Young et maintenant Nuvolari avec "ses gros cochons d'européens" :roll: .
l'Homme, avec ses défauts et ses qualités, est partout le même.
la démocratie et la souveraineté nationale sont comme l’avers et le revers d’une même médaille.
Avatar de l'utilisateur
Rainier
 
Messages: 16919
Inscription: 26 Mar 2003, 22:46
Localisation: Guyancourt for ever

How have we lost the eternal?

Messagede Hugues le 04 Aoû 2011, 14:57

Rainier a écrit:Moi je ne crois pas aux théses racistes défendues par Shoemaker, Malick ou Young et maintenant Nuvolari avec "ses gros cochons d'européens" :roll: .
l'Homme, avec ses défauts et ses qualités, est partout le même.


Mais justement, il y a totale méprise sur le message : Malick ne prend pas parti. Ce débat n'est pas le sien. silverwitch l'a déjà dit il y a 4 ou 5 ans.
Smith embrasse un temps la civilisation powhatan qui sera son Eden perdu.
Pocahontas embrasse à son tour la civilisation européenne, pour trouver de la joie en tout ce qu'elle voit.
Chacun fait connaissance d'un Nouveau Monde, le film ne distille pas de morale sur telle ou telle, mais fait dialoguer des subjectivité, des perceptions. Malick, lui même ne prend pas parti.

Tant toi que Cortese (ou Nuvolari) vous efforcez d'y voir un message civilisationnel, une lecture historique, là où Malick parle de vivre plus pleinement son existence.

Edit: silverwitch l'écrit (évidemment) mieux que moi:
Oui et non. Malick nous parle de mondes qui se rencontrent et de ce qui peut en découler: la guerre. La force du film c'est qu'il montre à la fois les ouvertures et les fermetures. Chaque sujet (et donc chaque peuple) porte en lui sa conception du monde et sa manière d'y vivre. Il suffit de repenser à la confrontation qui précède l'attaque du fort: chacun a de bonnes raisons et l'incompréhension des occidentaux qui fuient une tyrannie est défendue. Un personnage dit: "La Terre est à ceux qui la cultivent". Cette phrase est vraie pour lui mais ne l'est pas pour la tribu indienne. Chez Malick la morale est indécidable. D'où une ambiguité qui rejoint finalement celle de Kubrick (et une vision que l'on qualifie généralement de pessimiste, parce que la violence est toujours présente ainsi que la destruction et la mort).

Hugues (qui n'a pas fini sa réponse à Cortese)
Hugues
 

How have we lost the eternal?

Messagede Cortese le 04 Aoû 2011, 15:06

Enfin, moi, ce que j'en dis... C'est mon prof de philo, un intellectuel parisien connu, Mr Maschino qui m'a appris que tout était politique.
Cortese
dieu
 
Messages: 33533
Inscription: 23 Fév 2003, 20:32

How have we lost the eternal?

Messagede Silverwitch le 04 Aoû 2011, 15:09

Hugues a écrit:Mais justement, il y a totale méprise sur le message : Malick ne prend pas parti. Ce débat n'est pas le sien. silverwitch l'a déjà dit il y a 4 ou 5 ans.

Tant toi que Cortese vous efforcez d'y voir un message civilisationnel, une lecture historique, là où Malick parle de vivre plus pleinement son existence.

Hugues (qui n'a pas fini sa réponse à Cortese)


"Ce qui est terrible sur cette terre, c'est que tout le monde a ses raisons".
Image
Ça ne se fait pas de jouer de la lyre tandis que Rome brûle , mais on a tout à fait le droit d'étudier les lois de l’hydraulique.
Avatar de l'utilisateur
Silverwitch
Seven of Nine
 
Messages: 27893
Inscription: 28 Mar 2003, 19:39
Localisation: Filmskigrad

How have we lost the eternal?

Messagede Silverwitch le 04 Aoû 2011, 15:13

Cortese a écrit:Enfin, moi, ce que j'en dis... C'est mon prof de philo, un intellectuel parisien connu, Mr Maschino qui m'a appris que tout était politique.


Et c'est justement pourquoi, non seulement le film de Malick tient un discours politique, un discours historique, un discours moral, un discours existentiel et enfin et surtout, un discours esthétique. C'est ce qui fait la différence entre un discours et une représentation . À cet égard, ce que je tiens pour essentiel dans le cinéma de Malick, c'est qu'il nous fait voir le monde autrement, et faire apparaître un autre monde, un nouveau monde, c'est la fonction première d'une oeuvre de l'esprit. Et c'est sans doute vital.
Image
Ça ne se fait pas de jouer de la lyre tandis que Rome brûle , mais on a tout à fait le droit d'étudier les lois de l’hydraulique.
Avatar de l'utilisateur
Silverwitch
Seven of Nine
 
Messages: 27893
Inscription: 28 Mar 2003, 19:39
Localisation: Filmskigrad

How have we lost the eternal?

Messagede Cortese le 04 Aoû 2011, 15:22

silverwitch a écrit:
Cortese a écrit:Enfin, moi, ce que j'en dis... C'est mon prof de philo, un intellectuel parisien connu, Mr Maschino qui m'a appris que tout était politique.


Et c'est justement pourquoi, non seulement le film de Malick tient un discours politique, un discours historique, un discours moral, un discours existentiel et enfin et surtout, un discours esthétique. C'est ce qui fait la différence entre un discours et une représentation . À cet égard, ce que je tiens pour essentiel dans le cinéma de Malick, c'est qu'il nous fait voir le monde autrement, et faire apparaître un autre monde, un nouveau monde, c'est la fonction première d'une oeuvre de l'esprit. Et c'est sans doute vital.


Ah mais je suis entièrement d'accord avec ça. Ce qui me gène c'est le choix d'un sujet pareil qui était déjà usé jusqu'à la corde, pas franchement subversif (au contraire, je crois que la légende de Pocahontas renforçait les préjugés anti-indien des WASP), et qui n'est pas vraiment renversé par le film.
C'est marrant, je viens juste de me rappeler que ma cousine avait un album illustré sur l'histoire de Pocahontas (ça devait être en 1962) et je me souviens que je n'avais pas du tout aimé l'histoire, alors que je raffole des histoires (et des films) d'indiens. Mais c'est vrai que les histoires d'amour en général ça me tombe des mains si je puis dire. A part ce film anglais avec des ados en fuite à bord d'une MG "TC" dont je n'ai toujours pas retrouvé le titre.
Cortese
dieu
 
Messages: 33533
Inscription: 23 Fév 2003, 20:32

How have we lost the eternal?

Messagede Hugues le 04 Aoû 2011, 15:30

C'est la haine de soi. Je lisais tout à l'heure des critiques de l'excellent (que dis-je du génial) film de Terrence Malick "Le Nouveau Monde". Et toutes les critiques sans exception se vautrent dans le contre-sens en croyant voir dans le film une dénonciation de la barbarie de la civilisation occidentale, alors que le film suspend notre jugement en nous faisant partager les rêves et les espoirs des uns et des autres.

Il est très troublant de constater à quel point tout se délite de manière accélérée.


Hugues (silverwitch elle casse Rainier, Nuvolari et Cortese 5 ans à l'avance, mais pourquoi est-elle aussi méchante !)
Hugues
 

How have we lost the eternal?

Messagede Rainier le 04 Aoû 2011, 15:39

Hugues a écrit:C'est la haine de soi. Je lisais tout à l'heure des critiques de l'excellent (que dis-je du génial) film de Terrence Malick "Le Nouveau Monde". Et toutes les critiques sans exception se vautrent dans le contre-sens en croyant voir dans le film une dénonciation de la barbarie de la civilisation occidentale, alors que le film suspend notre jugement en nous faisant partager les rêves et les espoirs des uns et des autres.

Il est très troublant de constater à quel point tout se délite de manière accélérée.


Hugues (silverwitch elle casse Rainier, Nuvolari et Cortese 5 ans à l'avance, mais pourquoi est-elle aussi méchante !)


Oui Silverwitch casse tout sur son passage, c'est l'Attila ou la Genséric de ce forum :D

De mon côté, je me contente d'émettre des réserves sur les pseudo qualités exceptionnelles des peuples amerindiens, reprises par Shoemaker et Nuvolari, plus que sur le film lui même.

Encore que dans le film la voix off nous parle clairement de l'absence de cupidité, de jalousie, de sens de la propriété etc. des indiens lorsque Smith commence à vivre au milieu de la tribu. (ou alors, le sous titrage raconte n'importe quoi ? :wink: )
la démocratie et la souveraineté nationale sont comme l’avers et le revers d’une même médaille.
Avatar de l'utilisateur
Rainier
 
Messages: 16919
Inscription: 26 Mar 2003, 22:46
Localisation: Guyancourt for ever

How have we lost the eternal?

Messagede Cortese le 04 Aoû 2011, 15:46

Hugues a écrit:C'est la haine de soi. Je lisais tout à l'heure des critiques de l'excellent (que dis-je du génial) film de Terrence Malick "Le Nouveau Monde". Et toutes les critiques sans exception se vautrent dans le contre-sens en croyant voir dans le film une dénonciation de la barbarie de la civilisation occidentale, alors que le film suspend notre jugement en nous faisant partager les rêves et les espoirs des uns et des autres.

Il est très troublant de constater à quel point tout se délite de manière accélérée.


Hugues (silverwitch elle casse Rainier, Nuvolari et Cortese 5 ans à l'avance, mais pourquoi est-elle aussi méchante !)


Enfin, moi je disais le contraire des critiques sans exceptions.
Cortese
dieu
 
Messages: 33533
Inscription: 23 Fév 2003, 20:32

How have we lost the eternal?

Messagede Neoflo le 04 Aoû 2011, 15:50

Une question à nouveau sur The Tree of Life.

Quelqu'un peut-il m'expliquer quel est le sens que Malick souhaite donner à la scène ou le Tyranossaure croise un autre dinosaure qui est couché sur le sol, visiblement blessé ?
Neoflo
 
Messages: 2531
Inscription: 25 Fév 2003, 00:58
Localisation: Meudon, France

How have we lost the eternal?

Messagede Hugues le 04 Aoû 2011, 16:07

Neoflo a écrit:Une question à nouveau sur The Tree of Life.

Quelqu'un peut-il m'expliquer quel est le sens que Malick souhaite donner à la scène ou le Tyranossaure croise un autre dinosaure qui est couché sur le sol, visiblement blessé ?


Neoflo, réfère-toi à ces messages ici qui seront plus enrichissants que toute paraphrase ;)
viewtopic.php?p=1375077#p1375077
viewtopic.php?p=1376118#p1376118

Hugues
Hugues
 

How have we lost the eternal?

Messagede Neoflo le 04 Aoû 2011, 16:20

Hugues a écrit:
Neoflo a écrit:Une question à nouveau sur The Tree of Life.

Quelqu'un peut-il m'expliquer quel est le sens que Malick souhaite donner à la scène ou le Tyranossaure croise un autre dinosaure qui est couché sur le sol, visiblement blessé ?


Neoflo, réfère-toi à ces messages ici qui seront plus enrichissants que toute paraphrase ;)
viewtopic.php?p=1375077#p1375077
viewtopic.php?p=1376118#p1376118

Hugues


J'avais bien lu ces messages, mais j'osé espérer qu'il n'étais pas explication.
Je comprends bien le principe dans 2001, un appel extérieur qui emmene "l'homme" vers l'outil, donc la technique ... déjà je ne me suis pas assez penché sur Kubrick pour vérifier si il considère que c'est une évolution de l'homme via cet appel extérieur, ce qui me génerait fortement, ou si c'est la naissance de l'homme qu'il décrit là.

Mais avec les dinosaures de Malick si je comprends bien, la rupture se fait, via ce dinosaure qui se met à penser, donc à regarder vers l'extérieur, le monde et donc cet autre dinosaure devant lui et donc finalement à aimer, et qui devant cette beauté laisse l'autre dinosaure en vie alors qu'il semblait "naturel" qu'il le tue. Si je comprends donc, Malick dit que grâce à l'amour, ce dinosaure va au délà vers cet autre monde. Est-ce bien cela ?
Neoflo
 
Messages: 2531
Inscription: 25 Fév 2003, 00:58
Localisation: Meudon, France

How have we lost the eternal?

Messagede Shoemaker le 04 Aoû 2011, 21:55

silverwitch a écrit:
Hugues a écrit:Mais justement, il y a totale méprise sur le message : Malick ne prend pas parti. Ce débat n'est pas le sien. silverwitch l'a déjà dit il y a 4 ou 5 ans.

Tant toi que Cortese vous efforcez d'y voir un message civilisationnel, une lecture historique, là où Malick parle de vivre plus pleinement son existence.

Hugues (qui n'a pas fini sa réponse à Cortese)


"Ce qui est terrible sur cette terre, c'est que tout le monde a ses raisons".

Et celle du plus fort est toujours la meilleure, paraît-il. Ce monde est parfois désespérant...
"c'est quoi le blues". Toujours les mêmes histoires, celles qui font vaciller les mondes et les empires.
John Lee Hooker
Shoemaker
 
Messages: 22441
Inscription: 24 Nov 2003, 12:11
Localisation: Out of Africa

How have we lost the eternal?

Messagede Waddle le 08 Aoû 2011, 11:12

silverwitch a écrit:
Cortese a écrit:Enfin, moi, ce que j'en dis... C'est mon prof de philo, un intellectuel parisien connu, Mr Maschino qui m'a appris que tout était politique.


Et c'est justement pourquoi, non seulement le film de Malick tient un discours politique, un discours historique, un discours moral, un discours existentiel et enfin et surtout, un discours esthétique. C'est ce qui fait la différence entre un discours et une représentation . À cet égard, ce que je tiens pour essentiel dans le cinéma de Malick, c'est qu'il nous fait voir le monde autrement, et faire apparaître un autre monde, un nouveau monde, c'est la fonction première d'une oeuvre de l'esprit. Et c'est sans doute vital.


Finalement, tu as aimé le film ou pas? :?

EDIT: Ah, j'avais mal lu, en fait c'est L'Assassinat de Jesse James par le Lâche Robert Ford qui n'est pas Silverwitch approved.
"La citoyenneté réduite au droit du sang consiste à dire que la République est génétique et non pas spirituelle", Waddle, 2013.

Mon blog
Avatar de l'utilisateur
Waddle
Enculeur de moucheS
 
Messages: 24045
Inscription: 10 Mai 2003, 18:05

How have we lost the eternal?

Messagede Cortese le 25 Aoû 2011, 09:29

Pourquoi ce sujet bugge ? Le sujet s'affiche en blanc et le dernier message est signé "invité", en date du 1er janvier 1970 !
Cortese
dieu
 
Messages: 33533
Inscription: 23 Fév 2003, 20:32

How have we lost the eternal?

Messagede Shoemaker le 25 Aoû 2011, 19:55

Cortese a écrit:Pourquoi ce sujet bugge ? Le sujet s'affiche en blanc et le dernier message est signé "invité", en date du 1er janvier 1970 !

A mon avis, à force de le triturer à coup de php machin truc, Hugues a fini par donner une conscience propre à ce sujet, déjà passablement ésotérique. C'est ainsi que peu à peu, l'Infosphère va se transformer en une entité indépendante de l'Homme.
Hugues ? Un apprenti sorcier !
"c'est quoi le blues". Toujours les mêmes histoires, celles qui font vaciller les mondes et les empires.
John Lee Hooker
Shoemaker
 
Messages: 22441
Inscription: 24 Nov 2003, 12:11
Localisation: Out of Africa

How have we lost the eternal?

Messagede Hugues le 18 Sep 2011, 14:49

Ils l'ont attendu longtemps*, alors ils lui ont fait un bon accueil.
Surprise tout à fait inattendue, vendredi soir, au box-office espagnol, alors que les oracles compétents annonçaient un honorable mais lointain 7e rang, en phase avec l'accueil du film jusque là dans la plupart des pays (seule la France avait fait exception)
Malgré seulement 167 écrans, El Árbol de la Vida a pris la tête des entrées, niveau qui s'est confirmé encore ce samedi, devant Cómo acabar con tu jefe (Comment tuer son boss) et ses 269 écrans, tandis que la médiocre production Besson (pléonasme?), Canada Dry d'Hollywood, distribuée là bas par Disney, Colombiana à qui était promise des beaux jours réalise un four.

Hugues

*: Enfin pas aussi longtemps que Madcad.
Hugues
 

How have we lost the eternal?

Messagede Hugues le 19 Sep 2011, 00:09

Juste pour la route (en attendant de lire un jour Madcad!)

Texte caché : cliquez sur le cadre pour l'afficher


Hugues
Hugues
 

How have we lost the eternal?

Messagede sheon le 19 Sep 2011, 11:52

Hugues a écrit:Ils l'ont attendu longtemps*, alors ils lui ont fait un bon accueil.
Surprise tout à fait inattendue, vendredi soir, au box-office espagnol, alors que les oracles compétents annonçaient un honorable mais lointain 7e rang, en phase avec l'accueil du film jusque là dans la plupart des pays (seule la France avait fait exception)
Malgré seulement 167 écrans, El Árbol de la Vida a pris la tête des entrées, niveau qui s'est confirmé encore ce samedi, devant Cómo acabar con tu jefe (Comment tuer son boss) et ses 269 écrans, tandis que la médiocre production Besson (pléonasme?), Canada Dry d'Hollywood, distribuée là bas par Disney, Colombiana à qui était promise des beaux jours réalise un four.

Hugues

*: Enfin pas aussi longtemps que Madcad.

C'est le dernier Almodovar ?
Si j'avais souvent répété que je désirais mourir dans mon lit, ce que je voulais vraiment dire par là, c'est que je voulais me faire marcher dessus par un éléphant pendant que je ferais l'amour. Les Fusils d'Avalon, Roger Zelazny.
Avatar de l'utilisateur
sheon
Léon Raoul
 
Messages: 23761
Inscription: 03 Juin 2010, 16:55

How have we lost the eternal?

Messagede sccc le 19 Sep 2011, 19:34

Mrde.

Je croyais que c'était Twitter en roue libre qui activait ce topic...




















:D
scc
THE ITALIAN GUY...
"...elles donnent beaucoup de lait vos chèvres mon brave? Les blanches donnent beaucoup de lait...et les noirrres aussi..."
Avatar de l'utilisateur
sccc
 
Messages: 20255
Inscription: 22 Fév 2003, 19:32
Localisation: Belgique

How have we lost the eternal?

Messagede sheon le 20 Sep 2011, 00:17

sheon a écrit:
Hugues a écrit:Ils l'ont attendu longtemps*, alors ils lui ont fait un bon accueil.
Surprise tout à fait inattendue, vendredi soir, au box-office espagnol, alors que les oracles compétents annonçaient un honorable mais lointain 7e rang, en phase avec l'accueil du film jusque là dans la plupart des pays (seule la France avait fait exception)
Malgré seulement 167 écrans, El Árbol de la Vida a pris la tête des entrées, niveau qui s'est confirmé encore ce samedi, devant Cómo acabar con tu jefe (Comment tuer son boss) et ses 269 écrans, tandis que la médiocre production Besson (pléonasme?), Canada Dry d'Hollywood, distribuée là bas par Disney, Colombiana à qui était promise des beaux jours réalise un four.

Hugues

*: Enfin pas aussi longtemps que Madcad.

C'est le dernier Almodovar ?

Ah ouais, en fait je suis un blaireau, j'avais pas traduit "El Arbol de la Vida" = "The Tree of life". Faut dire, 3-4 mois après sa sortie en France, bizarre qu'il soit sorti aussi tard en Espagne.
Si j'avais souvent répété que je désirais mourir dans mon lit, ce que je voulais vraiment dire par là, c'est que je voulais me faire marcher dessus par un éléphant pendant que je ferais l'amour. Les Fusils d'Avalon, Roger Zelazny.
Avatar de l'utilisateur
sheon
Léon Raoul
 
Messages: 23761
Inscription: 03 Juin 2010, 16:55

How have we lost the eternal?

Messagede Hugues le 21 Sep 2011, 01:42

sheon a écrit:
sheon a écrit:
Hugues a écrit:Ils l'ont attendu longtemps*, alors ils lui ont fait un bon accueil.
Surprise tout à fait inattendue, vendredi soir, au box-office espagnol, alors que les oracles compétents annonçaient un honorable mais lointain 7e rang, en phase avec l'accueil du film jusque là dans la plupart des pays (seule la France avait fait exception)
Malgré seulement 167 écrans, El Árbol de la Vida a pris la tête des entrées, niveau qui s'est confirmé encore ce samedi, devant Cómo acabar con tu jefe (Comment tuer son boss) et ses 269 écrans, tandis que la médiocre production Besson (pléonasme?), Canada Dry d'Hollywood, distribuée là bas par Disney, Colombiana à qui était promise des beaux jours réalise un four.

Hugues

*: Enfin pas aussi longtemps que Madcad.

C'est le dernier Almodovar ?

Ah ouais, en fait je suis un blaireau, j'avais pas traduit "El Arbol de la Vida" = "The Tree of life". Faut dire, 3-4 mois après sa sortie en France, bizarre qu'il soit sorti aussi tard en Espagne.


C'est vrai*. Je ne sais pas.
Enfin, c'est sans doute pour le lancer en même temps que sa projection au festival de San Sebastian, le plus important festival espagnol et hispano-américain.
Où d'ailleurs le film a été récompensé (c'était annoncé depuis un mois) du Grand Prix FIPRESCI, c'est à dire le meilleur film de 2010-2011 selon la critique internationale (les 300 membres de la FIPRESCI) (contrairement aux Prix FIPRESCI qui sont plusieurs dizaines par an, un pour chaque sélection de chaque festival, il n'y a qu'un Grand Prix FIPRESCI, remis annuellement, où tous les films sortis dans l'année sont éligibles, et pas seulement ceux sélectionnés dans les festivals)

Pour en finir avec cette anecdote sur l'Espagne, même tendance le dimanche (les jours suivants sont du même tonneau d'ailleurs) si bien que sur les 3 jours de week-end, le film a accumulé 930.000 euros (très loin évidemment des 2,5 à 7 millions récoltés par les blockbusters de l'année sur la même durée, mais incroyablement élevé pour un tel film [j'ai failli écrire "incroyablement élevé pour un bon film", état de fait un peu triste] )

http://www.lavanguardia.com/cine/201109 ... anola.html
http://www.20minutos.es/noticia/1163135 ... /taquilla/
http://www.blogtripictures.com/2011/09/ ... -espanola/

Il faut dire que TriPictures a promu à la télévision (ce n'est pas régulé en Espagne) le film sur les noms de Brad Pitt et Sean Penn (un peu à la manière de la bande-annonce VF charcutée pour en faire disparaître le macroscopique, l'univers)



Hugues

*: Pas que t'es un blaireau hein :P
Hugues
 

How have we lost the eternal?

Messagede Madcad le 02 Oct 2011, 08:30

Voilà, je l'ai enfin vu, grâce à qui ? Grâce à Hugues bien sûr. :good
Le film a été très mal distribué au Québec, particulièrement en région et ce n'est que par le biais du ciné-club local que je j'aurai pu le voir. Sauf que j'ai réussi, because contrainte professionnelle, à rater ce rendez-vous.
Mais c'était sans compter sur Hugues, qui m'a permit de le mettre la main dessus. :good
Quelques remarques à chaud:
- aucun film, du moins selon mon expérience personnel, n'a su présenter autant de belles images au mètre carré.
- le visage de Jessica Chastain est une oeuvre d'art.
- le jeu du jeune Hunter McCracken est tout simplement sublime.
- habituellement question cinéma Ambrose et moi on est pas mal sur la même longueur d'onde. Vraisemblablement pour "The tree of life" ce n'est pas le cas. Question de maturité probablement et d'âge.
- sinon aucune scène ne m'a paru déplacée, que ce soit la séquence de la création ou la finale sur la plage.
Image
Avatar de l'utilisateur
Madcad
 
Messages: 9062
Inscription: 28 Fév 2003, 05:25

How have we lost the eternal?

Messagede Hugues le 04 Oct 2011, 13:12

C'est tout :roll: :P (déjà que tu savais pas faire la différence entre chaud et froid ..)

Hugues
Hugues
 

How have we lost the eternal?

Messagede Hugues le 04 Oct 2011, 18:51

Promis plusieurs fois, voici le sermon prononcé par le Père Kelly Koonce, prêtre épiscopal à Austin, dans le rôle du Père Haynes.

Job imagined he might build his nest on high,
that the integrity of his behavior
would protect him against misfortune.

And his friends thought, mistakenly, that the Lord could only have punished him...
because secretly he'd done something wrong.

But no.

Misfortune befalls the good as well.
We can't protect ourselves against it.
We can't protect our children.
We can't say to ourselves, "Even if I'm not happy, I'm going to make sure they are."
We run before the wind.
We think that it will carry us forever.
It will not. We vanish as a cloud.
We wither as the autumn grass... and, like a tree, are rooted up.

Is there some fraud in the scheme of the universe?
Is there nothing which is deathless, nothing which does not pass away?

We cannot stay where we are.
We must journey forth.
We must find that which is greater than fortune or fate.
Nothing can bring us peace but that.
Is the body of the wise man or the just exempt from any pain,
from any disquietude, from the deformity that might blight its beauty,
from the weakness that might destroy its health?

Do you trust in God?
Job, too, was close to the Lord.

Are your friends and children your security?
There is no hiding place in all the world where trouble may not find you.
No one knows when sorrow might visit his house...any more than Job did.

The very moment everything was taken away from Job, he knew it was the Lord who'd taken it away.
Ηe turned from the passing shows of time. Ηe sought that which is eternal.

Does he alone see God's hand who sees that he gives?
Or does not, also, the one see God's hand who sees that he takes away?
Or does he alone see God, who sees God turn his face towards him?
Does not, also, he see God who sees God turn his back?



Cela semble un simple sermon biblique, habilement en rapport avec les thèmes du film (la perte, le malheur, la fatalité). Pourtant, Malick tient, alors que nous quittons l'église puis nous en éloignons, à ce que nous continuions à l'entendre. Ca n'est évidemment pas fortuit. C'est lui qui s'exprime à travers ce sermon. Ces mots sont de lui.
Et en effet, il arrive un instant où ce discours atteint l'universel, des mots qui même si l'on dénie toute justesse à la Bible, toute existence à Dieu, concernent tout à chacun.

Ce passage en particulier:
Misfortune befalls the good as well.
We can't protect ourselves against it.
We can't protect our children.
We can't say to ourselves, "Even if I'm not happy, I'm going to make sure they are."
We run before the wind.
We think that it will carry us forever.
It will not. We vanish as a cloud.
We wither as the autumn grass... and, like a tree, are rooted up.

Is there some fraud in the scheme of the universe?
Is there nothing which is deathless, nothing which does not pass away?

We cannot stay where we are.
We must journey forth.
We must find that which is greater than fortune or fate.
Nothing can bring us peace but that.


Ce qui est à trouver, "greater than fortune of fate". C'est ce que vers quoi, plus loin, Job se tourne.
"Ηe turned from the passing shows of time. Ηe sought that which is eternal."

Se détourner de l'éphémère. Rechercher ce qui est éternel*
L'amour que Malick voit naître et se perpétuer depuis le fond des âges. La beauté du monde devant nos yeux. Le miracle infini de l'instant vécu, de l'instant présent, aussi grand que le miracle qui préside à l'Univers puisqu'il en découle.
Ce qui peut se prolonger chez le croyant en la foi. Mais qui n'en est pas moins universel et salvateur chez celui qui ne l'est pas.

Le dernier paragraphe n'est pas anodin non plus.
Comme c'est un anglais aux tournures un peu elliptiques, voilà en substance ce qu'elles signifient.
"Est-il le seul à voir la main de Dieu celui qui voit qu'Il donne?
Ou ne voit-il pas, aussi, la main de Dieu celui qui voit qu'Il reprend?
Ou est-il seul à voir Dieu, celui qui voit Dieu tourner Son visage vers lui?
Ne voit-il pas, aussi, Dieu, celui qui voit Dieu lui tourner le dos?"


Ce dernier paragraphe provient tout droit à quelques mots près de l'édition anglaise du premier des Quatre discours édifiants (aussi paru sous le nom "Hâte-toi d'écouter. Quatre discours édifiants") de Søren Kierkegaard . En fait quelques phrases plus tôt, "The very moment everything was taken away from Job, he knew it was the Lord who'd taken it away." provient aussi du même texte.. C'est intéressant à double titre. D'abord parce que, au delà du vernis biblique, Malick puise encore dans le même courant de pensée, convoque le philosophe qui inspirera Dostoïevski ou Heidegger.
Mais aussi parce que l'idée principale qu'y défend Kierkegaard dans ce discours, est qu'en s'écriant ""Dieu a donné, Dieu a repris" (mots cités d'ailleurs dans les premières minutes par la grand mère, sous les traits de Fiona Shaw), la première pensée qui est venue à Job ne fut ni la vengeance envers les Sabéens et les Chaldéens, ni la peine ou le ressentiment envers Dieu ou le sort pour la mort de ses enfants. Ses mots ne sont pas "Dieu a repris".
Qu'au contraire ce fut la gratitude, le remerciement (à Dieu ou à l'Univers, finalement peu importe) d'avoir eu.

But Job! The moment the Lord took everything away, he did not say, “The Lord took away,” but first of all he said “The Lord gave. […] Job’s soul was not squeezed into silent subjection to the sorrow, but his heart first expanded in thankfulness, the first thing the loss of everything did was to make him thankful to the Lord that he had given him all the blessings that he now took away from him. … His thankfulness no doubt was not the same as in those days that already seemed so far away, when he received every good and every perfect gift from God’s hand with thankfulness. But his thankfulness was nevertheless honest, just as honest as the idea of God’s goodness that was now so vivid in his soul. Now he recalled everything the Lord had given, some particular thing with perhaps even more thankfulness than when he had received it; it had not become less beautiful because it had been taken away, nor more beautiful, but was just as beautiful as before, beautiful because the Lord had given it, and what might seem more beautiful to him now was not the gift but the Lord’s goodness.


C'est en fait le chemin que choisira des années plus tard Mrs O'Brien dans son deuil. "Je te le donne. Je te donne mon fils". Et probablement, parce qu'on nous le laisse l'interpréter, celui que plus tard encore choisira Jack.
C'est aussi en fait ce à quoi nous incite Malick comme je l'écrivais un peu plus haut et tout au long de ce sujet, voir le miracle de l'instant vécu, de ce monde toujours recommencé devant nos yeux , le "voir comme pour la première fois" comme l'écrivait si bien Silverwitch.

Hugues

*: écho aux premiers mots de ce sujet, et à son intitulé
Hugues
 

Re: <span id=

Messagede Hugues le 14 Oct 2011, 00:25

Puisque que je l'ai montrée en d'autres lieux:

That's Where God Lives !


Hugues
Hugues
 

Re: <span id=

Messagede Hugues le 14 Oct 2011, 00:26

Et puis, une scène qui me démange partager et que j'ai gardé de côté depuis le début du mois au moins. Sans doute, avec les quelques minutes qui la précèdent, et en lesquelles débute déjà l'épiphanie (ou une première épiphanie avant cette seconde et la suivante), c'est l'un des moments les plus émouvants du film. A condition peut-être c'est vrai d'avoir vécu le film jusque là pour comprendre ce que représente ce pas, ces aveux de chacun des personnages et en particulier cet éveil tardif au Monde de l'un d'entre eux.

Son statut de spoiler n'est pas arbitraire, si vous comptez découvrir le film un jour, vous vous enlevez beaucoup de plaisir. Si en revanche vous ne pensez jamais le voir, vous n'avez rien à perdre et qui sait cela influera peut-être l'envie en vous de le voir et vous parjurer.

Texte caché : cliquez sur le cadre pour l'afficher


Comme souvent chez Malick, il est difficile de trouver où couper, chaque seconde supplémentaire étant un autre moment de bravoure, et ce même si on envisageait un court extrait initialement.

Hugues
Hugues
 

Re: <span id=

Messagede Hugues le 15 Oct 2011, 16:57

Juste quelques mots pour préciser que j'ai réduit hier la taille des deux fragments précédents. Tout cela devrait être plus facilement lisible pour certains.

Hugues (désolé du dérangement)
Hugues
 

Re: La séquence du spectateur - TOPIC CINEMA

Messagede Maverick le 19 Nov 2011, 23:48

J'ai vu The tree of life. Déjà, Malick a pensé à insérer des entractes (quand il filme les fleurs, le soleil, l'espace, tout ça) pour aller faire pipi. c'est un bon point. :D

Sérieusement et pour faire court, ce film a confirmé que je suis peut-être un piètre spectateur. Les images et les musiques sont belles mais je me suis fait chier. J'ai trouvé la durée du film bien trop longue pour l'histoire qu'on pourrait résumer en 30mn. Je n'ai pas réussi à voir plus loin que l'histoire d'une famille moyenne Américaine dont le père est psychorigide. Quel est le message du film ? J'ai pas trouvé.
Hamilton, champion du monde de F1 moral 2021
Verstappen, champion du monde FIA/Masi 2021

Image
Avatar de l'utilisateur
Maverick
Bête de sexe
 
Messages: 41397
Inscription: 22 Fév 2003, 00:02
Localisation: Dans ton cul !!

PrécédenteSuivante

Retourner vers Salon, saloon, bistrot du coin

Qui est en ligne

Utilisateurs parcourant ce forum: Majestic-12 [Bot] et 7 invités

cron