
Modérateurs: Garion, Silverwitch
sheon a écrit:Moi, je lis les 3 Mousquetaires (pour la première fois), et j'adore vraiment. Pas étonnant que ce livre soit un classique
sheon a écrit:Merci du conseil, je comptais lire aussi les deux suivants. Le Vicomte de Bragelonne, c'est l'histoire du Masque de Fer, c'est ça ?
LES MASSACRES DE MASSE EN ALGERIE AU TEMPS DES COLONIES FRANÇAISES
Cette sorte de chef-d’œuvre littéraire d’un ancien militaire français converti après dix ans de coloniale à la littérature s’ouvre sur le bonheur d’écrire, au plus près d’une vision sensuellement reconstruite d’un ventre de femme délicatement rebondi, à la langueur toute charnelle, fascinant de blancheur et offert autant à la vue du narrateur qu’à celle du lecteur. Le ventre nu d’une femme. Algérienne. Et le couteau qui l’ouvre. Un coup, l’autre, dans cet assassinat exécuté comme l’un des beaux arts de l’armée coloniale, tandis que notre narrateur songe aux grandes tueries humaines pleines de cette grandeur sombre qui sied tellement aux récits de guerre, quand il n’a, lui, rien de plus grand à offrir que ce ventre pénétré, dépecé, perforé. Tuez les arabes ! Les hommes, les femmes. Ses chefs le lui en ont donné l’ordre. Il s’exécute. Il tue. Rien de plus normal, puisque tout le monde tue autour de lui. Les arabes. Un sport. Une activité de loisir presque. Nous offrant au passage la vision d’une Algérie étouffée, d’un peuple soudain enfermé dans nos vices, bafoué, exécuté. Nous sommes en 1886. Le narrateur vit en Algérie depuis dix ans. Il parle l’arabe, aime s’habiller en arabe, aime ce pays et ses femmes voluptueuses, ne nous épargnant aucun des clichés de l’orientalisme falot qui anime la grande épopée coloniale française pour mieux les travailler au corps si l’on peut dire, en jouer avec habileté pour construire la seule chose qui lui importe : son œuvre, son écriture, ces phrases belles, intelligentes et fortes, admirablement travaillées, admirablement rythmées. Il raconte. Une histoire, un conte, une fable qui lui vaudra enfin la renommée dans les salons littéraires. Il raconte les arabes, par "fournées", envoyés au bagne (Cayenne), ou au "Bureau arabe", vrai centre de torture. Il raconte les marches forcées dans le désert des villageois raflés, les cadavres jalonnant leur chemin, les exécutions sommaires. Il raconte le mépris des troupes françaises à l’égard des populations autochtones, l’indifférence quant à leur traitement, inhumain cela va de soi, ils sont si peu des hommes. Il raconte encore l’ennui dans les régions pacifiées, moins du fait d’une quelconque réussite de la politique coloniale française, que de la volonté des indigènes à vivre en bonne intelligence avec l’envahisseur pour tenter de préserver leurs familles. Autant qu’ils le peuvent. C’est-à-dire jamais bien longtemps, car rien ne peut venir à bout de la volonté de guerre des militaires français : ils savent, eux, que leur avancement se fait au sabre, qu’on ne gagne du galon qu’en tranchant les têtes, qu’en brûlant les villages. Alors ils s’emploient à provoquer continuellement les populations. Ou bien à inventer n’importe quel prétexte pour fomenter un désordre. Ici une poule volée à un colon, dont un capitaine en mal de promotion exige réparation. Qu’on lui livre un coupable. N’importe quel homme fera l’affaire, pourvu qu’il puisse l’exécuter sommairement devant tout le village rassemblé, avec l’espoir que ce meurtre poussera les villageois à l’indignation, à quelque remous de foule qui légitimera que l’on charge et rédige ensuite un rapport à l’Administration pour dénoncer une rébellion plus ample. Alors débute la chasse à l’homme. On traque l’arabe comme une bête, avec pour seule consigne "pas de quartier". On brûle les villages, on sabre les femmes, les enfants, on cerne les survivants, ici 200 à 300, poussés dans les montagnes, au creux des rochers, exténués de fatigue, mourant de faim et de soif, tandis que deux milles hommes en armes les encerclent et les mitraillent… Les Einsatzgruppen avant l’heure. On songe aux premières expérimentations de la Solution Finale conçues par Hitler, au 101ème bataillon de réserve de la gendarmerie allemande, parcourant les campagnes polonaises pour exécuter systématiquement les populations juives raflées. Des méthodes directement importées des colonies semble-t-il.
Il faut lire ce récit enfin réédité, qui ouvre grand les yeux sur ce que fut la colonisation de l’Algérie racontée de l’intérieur par un militaire français. Un témoignage ahurissant sur le peu de moralité de cette armée et sa prétendue mission civilisatrice. Un témoignage ahurissant sur le lyrisme du viol, de la razzia, du meurtre de masse qui traversait alors ses rangs. Un témoignage… S’il n’était plutôt un récit tout entier traversé par ce curieux bonheur de la chose racontée, tournant autour de son objet avec ravissement, animant ce goût commun aux hommes de lettres, un delectare insupportable en fin de compte, faisant un conte de ces atrocités. Le meurtre de masse en Algérie, dont on aurait tort de n’en faire qu’un genre littéraire virtuose. --joël jégouzo--.
Sous le burnous, de hector France, préface d’Eric Dussert, éd. Anacharsis, avril 2011, 202 pages, 17 euros, ean : 978-2-914777-759.
Neoflo a écrit:Un livre sur la Guerre d'Algérie, vous me conseillerez quoi ?
J'ai entendu parler des 4 bouquins de Yves Courrière, cela vaut quoi ?
Cortese a écrit:Tiens, puisque NQP est dans les parages, ça va lui faire plaisir :
http://tintinaucongoapoil.tumblr.com/page/3
Cortese a écrit:Neoflo a écrit:Un livre sur la Guerre d'Algérie, vous me conseillerez quoi ?
J'ai entendu parler des 4 bouquins de Yves Courrière, cela vaut quoi ?
Ils datent des années 60. Ils sont très bien, c'est une une référence sur le sujet, et d'écriture agréable.
Cortese a écrit:Ça mène vraiment à rien d'être sympa avec les sionistes.
Ouais_supère a écrit:Connaissez-vous des romans de SF du même genre, qui se passent dans l'espace et qui sont 'achement bien?
J'avais posé la même question pour les films, et n'avait obtenu presque que de bonnes réponses, donc mon attente est grande, ne me décevez pas.
Ouais_supère a écrit:Stef, t'es chiant
Aym a écrit:Sheon, au rapport !
Mon préféré est plutôt "Marche ou crève"[/quote]sheon a écrit:De Stephen King, j'ai dû lire que Running Man, je crois.
sheon a écrit:Cela étant, j'avais offert le premier tome de la Tour Sombre à mon frangin, il me semblait qu'il avait trouvé ça sympa, mais je crois pas qu'il a lu les autres bouquins.
Aym a écrit:pas lu Blast. Tu pourras me l'apporter le jour où tu viendras voir un gp chez moi
En revanche, pour la fête des pères, j'ai eu droit aux "super héros injustement méconnus", de Larcenet toujours, et c'est fendard
Aym a écrit:Ouais, c'est dans la même veine que "le combat ordinaire", non ? Voire plus sombre ?
Mais m'en fous, je suis preneur, j'aime bien l'oeuvre de Larcenet.
Aym a écrit:Bon, ben tu l'apportes quand même épicétou.
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