Marlaga a écrit:Puisque tu n'en as pas regardé grand chose, comment oses-tu parler de l'ambition de la série ? Tu devrais méditer sur la réponse d'Ambrose qui te parle d'une critique d'un film qui serait faite par quelqu'un qui débarque dans la salle après une demi-heure en bouffant du pop-corn et repars 10 minutes plus tard. Ce genre de critique ne vaudrait pas grand chose, admet-le.
J'en ai vu assez. C'est la différence entre un bon film et un produit de consommation: quelques minutes suffisent pour voir que l'on se trouve devant un navet, alors que plusieurs visions sont nécessaires et indispensables pour comprendre un chef d'oeuvre.
silverwitch a écrit:Et justement, Lost est bien joué, bien écrit et a tout une esthétique très travaillée ainsi qu'une ambiance sonore très forte et personnelle. Tu es passée à côté, soit. Mais n'en parle pas alors.
Réponse courte, parce que je crains que tu ne fasses pas la différence entre un bon film et un film qui te plaît. D'abord, et particulièrement devant une série télévisée, il est impératif de se désenchaîner des effets de l'oeuvre, de dissocier le caractère concret, les propriétés de l'oeuvre étudiée et les sentiments ou résultats qu'elle produit en toi, entre le sens et la signification. Le caractéristique première d'une série télévisée est de produire un mécanisme d'identification et de familiarité factice renforcé par le procédé du feuilleton (la relation avec les images, les intrigues et les personnages dure sur des mois voire des années).
"Lost" n'a aucune esthétique singulière, c'est une série télévisée qui ressemble plan pour plan à n'importe quelle autre télévisée, sans aucune mise en scène (c'est à dire une articulation d'un dispositif en trois dimensions dans l'espace et le temps à partir d'un point de vue, c'est à dire l'organisation de rapports de savoir) et une direction d'acteurs limitée (jeu psychologisant où des acteurs-mannequins tentent de nous faire partager les conflits intérieurs des personnages, comme s'ils étaient transparents), une écriture qui confond densité et délayage, et une "ambiance sonore" particulièrement banale (il n'y a absolument aucun travail sur le son, toujours capté de la même manière traditionnelle à toute série télévisée) puisque constituée de simples effets de bande-son (bruitages, musique).
Enfin je maintiens mon analogie avec le "soap": multiples intrigues parallèles ayant pour objectif de toujours différer la résolution du double prétexte à l'origine de la série (l'élément fantastique; le huit-clos suite au crash), personnages manichéens: ancien dealer qui a trouvé la foi, ancienne rock-star has-been et droguée, chirurgien fils à papa traumatisé par la mort du papa alcoolique et lui aussi chirurgien (sic), gigolo-arnaqueur, jolie fugitive, obèse fils à maman vainqueur à la loterie et j'en passe; intrigues compliquées tournant autour de secrets, du sexe, des révélations, des changements soudains, etc... La simple énumération de l'intrigue d'une dizaine d'épisodes suffit aux yeux d'un public non-averti à signifier de manière aussi évidente que banale qu'il s'agit bien d'un "soap".
Le troisième âge a "Les Feux de l'amour", les plus jeunes avaient "Melrose Place", maintenant les plus branchés ont eu "Lost". Mais c'est en fait la même chose, le même produit: seul l'emballage a changé.
Silverwitch