Hugues a écrit:Shoemaker a écrit:Sérieusement, introduire l'idée de compétition dans la sphère artistique me semble être une aberration.
Autant en sport, typiquement, cela a un sens, autant dans l'art, c'est carrément un contre sens.
Attention, tout le monde a le droit de se réunir dans son salon privé, et de voter pour tel film, tel tableau ou telle chanson. Mais faire de ces événements un truc officiel, prépondérant, institutionnel, etc, c'est absurde. Ca ne se mesure pas, l'art.
Il ne s'agit pas de compétition, il s'agit d'exprimer une vérité, qui s'oppose au relativisme: tout ne se vaut pas.
Et qu'il y a un absolu quelque part, qui se dégagera avec l'aide du temps: une hiérarchie en art.
Non, pour la centième fois, ça ne tient pas de son gout, de sa préférence, de ses penchants, cette hiérarchie, puisque c'est un absolu, pas un subjectif.
Elle tient à quelque chose de bien plus simple... une oeuvre inspirera-t-elle... aura-t-elle des suiveurs, des imitateurs.. c'est à dire ce qu'on appelle une postérité (oui c'est ça la postérité, avoir des imitateurs, de élèves indirects, des inspirés.. inspirer autrui)
C'est ça le seul absolu, qui ne tient d'aucune relativité (ni d'ailleurs d'aucune popularité )
Une oeuvre, si elle inspire de façon innée, c'est pour ses résonances avec des implicites, des non-dits culturels qui ont infusé tout notre être depuis notre naissance..
Comment juger cette oeuvre, sa capacité à inspirer si on ignore même cette culture, qu'elle référence parfois volontairement mais encore plus souvent involontairement
Une oeuvre donc pour la juger au mieux, il faut se mettre à son niveau ... essayer de se construire une culture aussi riche que peut l'être l'oeuvre... (ce qui est parfois un impossible, ce qui est chose heureuse, ça dit la grandeur de certaines oeuvres)
Et en particulier esssayer de connaître autant que possible l'art dans lequel s'exprime cet oeuvre...
Cela pour dire qu'une oeuvre se juge dans son dialogue avec le reste des oeuvres passées et à venir et non en isolement.
Un barbare, au sens d'un être dénué de toute culture, (mais bon les "Barbares" étaient cultivés en réalité), ne peut juger une oeuvre.
Tout comme un extraterrestre ne le pourrait.
Après tout, un extraterrestre est sans doute incapable de comprendre la flèche (symbole culturel si il en est) sur les plaques des Voyager. Même les dessins, tels que les dessins du couple humain (représenter la limite des formes, c'est un choix culturel, lié à notre vision) il n'est pas certain qu'ils soient compréhensibles.
Après qu'un jury soit en mesure d'avoir le regard visionnaire pour apprécier si une oeuvre est en mesure d'inspirer et si elle peut le faire à long terme... on peut en douter, ça dépend des jury (et plus souvent non que oui..)
Sur cela, c'est en ça que je conviens que c'est une absurdité.
Mais sur l'idée de marteler, plusieurs fois dans l'année, dans toute une variété d'art, que tout ne se vaut pas, non ce n'est pas une aberration.
Hugues
PS: Ce discours que je tiens depuis quelques années, défendant mes propres conclusions (celle de l'importance de l'inspiration) nées d'un cheminement commencé en m'inspirant, m'appuyant sur les épaules d'une insigne forumiste, j'ai été agréablement surpris de découvrir que elles avaient été écrites bien avant nous il y 250 ans par un admirable esprit. Sans doute que ce que nous avons dit ici n'était pas si absurde.
Désolé, je n'avais pas repéré ce texte.
je ne possède pas une expertise quelconque en philosophie, pour manier avec assurance les concepts d'absolu (il n'y a que Dieu qui est absolu pour moi, au passage, et c'est un concept en soi qui me dépasse complètement, en même temps !), de vérité, de relativisme... Donc, je ne saurais te répondre correctement à ce niveau d'intellectualité. Je suis donc condamné à en rester humblement au niveau "discussion de Bistrot", comme l'indique l'intitulé de ce lieu sympathique
Cela précisé, je retiens juste que tu rappelles que les jurys ne valent que ce qu'ils valent, si j'ose dire. Et j'en reste là pour ma part, en ce qui concerne la mise en compétition d'œuvres d'art. En athlétisme, le jury s'appelle "Chronomètre". Il ne se goure jamais et émet une vérité physique, une "mesure" précise et indiscutable, sauf à remettre en cause les lois de l'Univers. En patinage artistique, déjà, on est à la limite du possible, mais le principe des "figures imposées" qui sont très codifiées, permet à un jury nombreux et expert en la matière de hiérarchiser (ce qui est très loin d'être le cas dans les jury cinématographiques : quand il m'est arrivé d'entendre interviewées certaines personnes qui ont été juré à Cannes, j'en tombe sur les fesses de consternation quant à leur nullité intellectuelle...).
Puis, quand on passe à l'art pur (le cinéma en est un, si je ne m'abuse), là, moi je bloque. C'est niet, quels que soient les arguments. Cela pour tous les arts, musique, littérature, théâtre, etc.
J'entends bien, ton argument que tout ne se vaut pas, je le comprends parfaitement, et j'en suis d'accord. Mais même cet argument ultime ne peut permettre de dire qu'une œuvre d'art dépasse une autre, à un niveau de réalisation ... disons ... équivalent. Je m'explique : un Gendarme à St Tropez n'égale pas en terme artistique un Einsenstein ou un John Ford, mais entre un Eisenstein et un Ford, la raison interdit de hiérarchiser : on atteint à ce niveau, une impossibilité, sauf à la contourner à coup d'arguties philosophiques (et la philo a ça de bien, elle permet tout et son contraire
). Le cinéma est un art, oui, mais peut on dire que le Gendarme à St Tropez est une œuvre d'art ? Je ne le pense pas, bien sûr. C'est un objet cinématographique, mais aussi un objet purement artisanal, dont la mission n'est pas d'élever l'âme ou un truc du même genre, mais de faire rigoler le pékin moyen. Donc, oui, tout ne se vaut pas, mais à un certain niveau, au sommet de l'art, du côté de l'Olympe, il devient impossible de dire ce qui vaut mieux que le voisin. C'est ... une singularité quantique !
Donc, on doit s'abstenir d'établir une hiérarchie, qui plus est souvent établie par des personnes inaptes à prétendre à un grande connaissance du sujet.
Mais, encore une fois, je me répète, rien n'empêche de procéder à des "promotions", donc des débats, des projections, de la publicité (saine), etc, pour que les œuvres les moins favorisées financièrement, puisse accéder à la visibilité publique, etc. Mais si possible, en évitant de passer par les abrutis de Canal Plus ou je ne sais quelle officine pourrie (je sais que c'est impossible, et que donc je cause dans le vide, je ne l'oublie pas !
).
C'est là en gros mon avis, certes limité, le le concède volontiers.
Je ne sais pas manier les absolus en ce monde, mais je sais une chose : beaucoup de personnes prétendront par exemple que les tableaux de l'affreux jojo Miro sont de l'art, donc appartiennent à la même sphère "cognitive" que les œuvres de Rembrandt ou de Raphaël. Pourtant, pour moi, ce sont des croûtes infâmes que même des gribouillages d'enfants peuvent surpasser en valeur intrinsèque, ne serait-ce que parce que l'enfant n'est pas mu par du cynisme (ou une démence, au choix). L'enfant a pour lui qu'il est vraiment innocent et sincèrement convaincu, quand il destroye ses feutres sur une pauvre page blanche.
Donc oui, tout ne se vaut pas, mais chacun place les curseurs où il veut, en un acte de liberté ... absolue !
Il y a un moment, où, aussi, dans l'art, dans l'exécution, en plus des états d'âme de l'artisse, de ses convictions, de l'impérieux sentiment qu'il éprouve d'exprimer quelque chose en lui, sa part divine de création... il faut aussi du savoir faire, de la technique, de la virtuosité, de la sueur, de l'honnêteté... celle de l'artisan, celle du travailleur. L'art n'est pas QU'une forme de sainteté, là baaaaas, au-delà des contingences humaines. Il doit AUSSI être un labeur, de la sueur, de la douleur, une sorte d'inflammation de l'âme !
etc etc etc.............
Bref, bref, je n'ai rien de plus à dire, là s'arrêtent mes arguments.
Tu me dis que discuter de nos rêves et de nos cauchemars est d'une utilité limitée. J'en suis absolument d'accord. Je l'ai dit souvent ici même.
Mais malheureusement (pour moi), je n'ai pas d'autres capacités intellectuelles que celles-là : justement limitées (j'en ai conscience, et je n'en souffre pas !
). Sinon, je serais un homme de pouvoir, capable de changer le monde. Je ne le suis ni n'ai envie de l'être.
Tu me cites une liste de films qui ne seraient pas les produits d'une démarche "capitaliste". Ok. No problèmo. Je te suis sans problème. Je comprends parfaitement aussi qu'on est dans le monde tel qu'il est, qu'il faut faire avec Hollywood, la politique, avec les magouilles des subventions d'Etat, des cercles d'influences, etc. On le sait. C'est comme ça. En attendant la révolution mondiale socialiste !
Le problème, c'est que des festivals tels que Cannes, les Oscars, etc, se placent sous la férule des forces d'argent, qui n'interviennent jamais sans, quelque part, réclamer un du en retour. Et elle veulent aussi du spectacle, nous pas tant celui proposé par Malick, mais celui de la compète, des montées d'escalier, pour les millions et les millions de sans dents qu'il faut abrutir, encore et encore !...
Mais bon, revenons au sujet premier de cette discussion :
Pour pas se casser les neurones à se demander s'il faut caser ou pas dans le même sac les h et les f en ce qui concerne les prix, je dis juste : y a qu'a abandonner les prix, et insister sur la promotion intelligente. Et ce problème inconsistant cessera d'exister.