von Rauffenstein a écrit:Tes 100 films indispensables ?

Pfiou. Ça demanderait réflexion et méthode. S'il est relativement aisé de citer ses films préférés, établir une filmographie idéale raisonnée sur des critères à visée objective est une autre affaire. Je peux déjà dire que la popularité des films, publique ou critique (dans une certaine mesure pour ce second critère) n'entrerait pas, sinon marginalement, en ligne de compte. Il en irait de même pour le "genre" ou l'origine du film (langue, lieu de production).
Après, c'est relativement simple, on y retrouverait fatalement des oeuvres des plus grands cinéastes: Ford, Murnau, Lang, Fellini, Renoir, Dreyer, Bresson, Kurosawa, Satyajit Ray, Andreï Tarkovski, Kubrick, Jacques Tati, Bergman, Orson Welles ou Eisenstein... Et quelques oeuvres isolées, des films Terrence Malick et de Polanski, des films de Ozu ou un film de Duvivier ou de Pietro Germi.
Après, il y a les cas, comme Alfred Hitchcock, dont l'importance esthétique me paraît assez mineure mais qui a suivi un chemin étrange qui a une influence considérable (parfois pour le pire dans le cinéma contemporain). Difficile de ne pas citer au moins deux films du cinéaste britannique, mais alors comment oublier les grandes oeuvres de cinéastes britanniques plus intéressants, comme Carol Reed, David Lean ou Alexander Mackendrick ? Privilégions-nous les films qui font école ou ceux qui ouvrirent des chemins encore (et sans doute pour longtemps) inexplorés ?
Chaque grand film contient une possibilité humaine, esthétique et métaphysique de toute l'humanité, un monde alternatif possible, rêvé. Un film de guerre comme une comédie peuvent nous dire tout sur l'humanité, et pourtant nous avons besoin de croiser, de multiplier ces mondes parallèles pour voir ce que nous ne pourrions voir autrement. La pluralité de l'expérience esthétique est indispensable et se traduit par la diversité (l'originalité, la pertinence, la cohérence) des propositions esthétiques. On pourrait donc faire autrement, et imaginer l'histoire du cinéma sous la forme d'un arbre: les films qui composent le tronc (Griffith, Ford, Chaplin et Keaton, Murnau, Lang et l'expressionnisme allemand, incontournable), puis les branches (Fellini, Welles, Lubitsch, Renoir, Dreyer) et enfin les fruits (Kubrick, Polanski, Malick, Germi, Billy Wilder, Mankiewicz, etc...). Le cinéma crée des formes qui sont autant de mondes parce qu'ils renvoient au monde en même temps que les différentes formes se répondent et s'évaluent.
J'ai pris soin de ne citer aucun film. Peut-être que chacun pourrait en citer une dizaine de films absolument indispensables pour différentes raisons. On verrait alors si on arrive à une forme de consensus ou si ça part dans tous les sens.