Waddle a écrit:Une question qui me tracasse en ce moment.
L'evolution est un fait.
Sans aucun doute.
Des spécialistes de disciplines aussi différentes que la paléontologie, la biologie du développement, la génétique, les statistiques, la biochimie, l'éthologie, plus ceux qui étudient spécifiquement l'évolution, et j'en oublie certainement, sont d'accord sur ce point.
Mais est-ce que la théorie de l'évolution, comme explication de la formation du monde et des espèces, est juste une théorie ou un fait démontré?
"La" théorie de l'évolution n'existe pas, il y en a plusieurs, qui s'attachent à expliquer les phénomènes qui conduisent à l'évolution.
J'apporte là une parenthèse importante, qui est que les théories de l'évolution
n'expliquent pas et ne tentent pas d'expliquer la formation du monde.
L’évolution n’est pas une évidence puisqu’au cours d’une vie, et même sur plusieurs générations, on ne peut pas l’observer directement : un chat reste un chat, et, comme on dit, les chats ne font pas des chiens.
Le
fixisme, c’est à dire que les êtres vivants restent semblables à leurs premiers ancêtres, était donc une idée plus simple et plus évidente. Un peu comme l’idée que le Soleil tournait autour de la Terre. Vu de cette dernière, c’est effectivement ce qui semble être le cas.
Pourtant, dès Aristote (-384 ; -322) l’idée de transformisme existe, dans un texte préfigurant la pensée de Darwin :
« Nous pouvons bien supposer que toutes choses se sont formées par hasard exactement comme elle l’eussent fait si elles avaient été produites pour quelque fin : certaines choses se seraient conservées parce qu’elles auraient acquis spontanément une structure appropriée, tandis que celles qui n’étaient pas constituées de la sorte eussent péri ou périraient encore. »
Mais Aristote, même s’il en émet l’hypothèse, rejète cette idée.
Au cours du temps, diverses observations vont peu à peu mettre à mal le fixisme. Liebniz (1646-1716) observe que les êtres vivants « ne forment qu’une seule chaîne dans laquelle les différentes classes, comme autant d’anneaux, se tiennent si étroitement les unes aux autres qu’il est impossible aux sens et à l’imagination de fixer précisément le point où quelqu’une commence ou finit ».
Linné (1707-1778) , pourtant fixiste convaincu, admet la possibilité de création de nouvelles espèce en observant l’apparition d’une nouvelle forme de linaire.
Maupertuis (1698-1759), observant le grand nombre de variétés dans la nature, propose que « les variétés se trouvent dans les liqueurs séminales », que les organismes inaptes sont éliminés et que de nouvelles espèces peuvent apparaître par la répétition de la production fortuite d’erreurs dans la formation des individus.
Cuvier (1769-1832) découvre des faunes entièrement éteintes, début de la future paléontologie.
D’autres « évolutionnistes » viendront (Monet, Lamarck), avant que Darwin (en 1859) soit le 1er a élaborer réellement une théorie scientifique de l’évolution, basée sur des faits, observations et expérimentation. Il met en évidence la sélection naturelle, mais ne connaissait pas la génétique et donc ce qu’on pourrait appeler le « moteur » de l’évolution qu’est la variabilité génétique.
La (re)découverte des lois de la génétique, et la découverte du support des gènes que sont les chromosomes dans le début du 20ème siècle ont permis de « boucher les trous » que présentait la théorie de Darwin, créant ce qu’on a appelé le
néo darwinisme. Ce fut aussi une période fructueuse pour l’expérimentation, grâce à une petite mouche notamment, la drosophile, et la mise en place de modèles mathématiques et la mise en équation de la théorie.
Pour finir, dans la 2ème partie du 20ème siècle, les scientifiques se sont rendu compte que la variabilité génétique (le polymorphisme) était bien plus important que ce que l’on en attendait suite aux travaux théoriques des mathématiciens. C’est sur cette variabilité que peut s’appuyer la sélection naturelle. Ceci a conduit à une controverse entre les « sélectionnistes » qui pensaient pouvoir expliquer cette observation à partir de la sélection naturelle elle-même, et les « neutraliste » (voir Kimura), pour qui la plupart de la variabilité
au niveau moléculaire (de l’ADN) provenait de mutations sélectivement neutres. Ceci ne remettant pas, bien entendu, en cause le rôle de la sélection naturelle au niveau des individus. Aujourd’hui cette controverse s’est tue car chacun a pu montrer le rôle partiel de la sélection et du neutralisme.
Voila un rapide historique de la pensée évolutionniste au cours du temps.