Xave a écrit:silverwitch a écrit:Après cette question un peu hors-sujet, je remarque encore une fois simplement une inaptitude à penser l'avenir en dehors du chemin balisé. Tout ce qui n'est pas dans le sens du "Progrès" est une route vers le déluge orchestrée par des casseurs.
Explique nous donc, toi qui en sais tant, ce que vont proposer les partisans du non.
Effectivement, comme le dit Nuvolari, chaque fois que la question est posée "bon ok, le non gagne, et après, qu'est-ce qu'on fait ?" la réponse est la même quel que soit le camp : "je sais pas, on verra bien..."
Sans compter que Le Pen, Villiers, Fabius, Chevènement, Besancenot, et autres ont tout sauf un même canevas de pensée qui pourrait permettre d'élaborer un projet alternatif retenant l'adhésion d'une majorité de français. A part la contestation de ce traité bien sûr.
Et, mine de rien, c'est à ce moment-là que l'épouvantail Le Pen a du sens, parce qu'au sein du non, celui qui mène largement au vu des derniers scrutins, c'est bien le Front National.
Xave, le problème de cette convention pour l'avenir de l'Europe qui s'est voulu assemblée constituante, c'est que ses préoccupations et ses choix de pensées ne sont en rien en phase avec la société..
Pourquoi? Attardons nous sur la France. En France, le gouvernement n'est pas représentatif du peuple français, le gouvernement est "élu" par les choix communs de deux hommes, ceux du Président de la République et celui du Premier Ministre (une preuve: si nous devions voter pour chaque poste gouvernemental, le gouvernement serait bien différent). Ce n'est pas important qu'il ne soit pas représentatif du peuple français, car il n'est que l'exécutif et après tout au sein de l'exécutif, les fonctionnaires non plus ne sont pas représentatifs. En somme la non représentativité du gouvernement est chose normale. Ce qui importe est avant tout que le législatif soit représentatif, et à travers en particulier, 577 députés élu au suffrage direct et l'on peut imaginer que c'est bien le cas. Le suffrage indirect, au contraire, plus il est réalisé par un nombre restreint de grands électeurs, moins il est représentatif, et à ce titre l'exemple du gouvernement français élu par deux hommes avec le seul critère de correspondre à la famille politique dominante à l'assemblée nationale, démontre la perte de représentativité du suffrage indirect.
Or, tant à la Commission Européenne, détentrice d'un pouvoir législatif avec son droit d'effacer les amendements du parlement, où les commissaires sont le résultat d'un compromis de 25 chefs d'Etats ou de gouvernement, qu'à la Convention pour l'Avenir de l'Europe, où les conventionnaires étaient choisis là aussi par ces mêmes gouvernements et chefs d'Etats, ces gens par leur mode de désignation, n'ont aucune représentativité des peuples qu'ils sont censés représenter. Pourtant il existait une assemblée qui aurait pu être constituante et représentative : le parlement européen. Le texte qui en résulte n'est pas un texte sur lequel s'entendent les Européens comme on nous l'affirme, mais sur lequel s'entendent les réprésentants arbitrairement désignés de tous les pays, ce qui est chose différente.
Alors la quasi-totalité des tenants du oui, nous informe qu'il est impossible de renégocier. Qu'il soit impossible de renégocier avec la Convention sur l'Avenir de l'Europe, je veux bien le croire, la Convention sur l'Avenir de l'Europe en plus de son manque de représentativité, est assez orgueilleuse pour penser que c'est la meilleure constitution possible et que le non des peuples serait une idiotie, qu'elle sait mieux que les peuples ce qui est bien pour eux. La démocratie c'est pourtant agir en phase avec les doléances des peuples, et en tenir compte dans un projet de loi ou dans une constitution. En revanche, remettre le projet sur la table au sein du parlement européen ou d'une assemblée constituante représentative, qui saura entendre et tenir compte du cri des peuples (les oui et les non des référendums) ne me semble pas impossible.
Xave, tout comme certains hommes politiques du non, tu affirmes que les leaders politiques du non ne sauront jamais se mettre d'accord. Je te l'accorde.
Mais est-ce à eux d'être d'accord, et en quoi devraient-il se mettre d'accord? Encore une fois, une Constitution ne se fait pas par démocratie indirecte...
Au lendemain d'une victoire du non, le non devient le choix du peuple français, et tous les hommes politiques devront porter ce non comme le leur (y compris donc les dirigeants du PS, de l'UMP, de l'UDF), si ils ont le sens de démocratie... L'ensemble de la classe politique devra chercher les raisons de ce non. (Et non uniquement les tenants du non, qui eux l'ont dans l'ensemble déjà compris... C'est pourquoi je continue de penser que l'argument qui souligne que le non est hétéroclyte est tout à fait absurde, ce n'est pas uniquement à ceux là de comprendre le non et de construire un nouveau projet à partir de celui ci -- à moins que ce soit un aveu d'autisme de ceux qui utilisent cet argument)
Quelques indices pour aider la classe politique à tirer une conclusion du non. Le non de gauche, (actuellement) majoritaire dans le pays, s'entend au delà de quelques mineures divergences sur le souhait d'une autre constitution construite autour d'un contrôle démocratique de la politique économique afin d'en faire un levier pour le social, sur le souhait d'une réelle démocratie à l'échelle européenne. Qu'il en revienne aux représentants des peuples de décider des politiques à suivre et non à un traité, à des représentants non élus, où à une banque européenne indépendante. Aux hommes politiques de ce pays et plus largement aux hommes politiques européens d'entendre ce message (car si ils sont aussi européistes qu'ils s'en réclament, notre non n'est pas le non d'étrangers, mais le non d'électeurs de l'Europe qu'il faut aussi entendre)
Le non de droite refusant dans son ensemble un autre projet constitutionnel, si la classe politique européenne souhaite réellement la naissance d'une constitution, les souhaits émis au delà des clivages largement par le non de gauche sont les seules doléances à prendre en compte avec sérieux, par toute la classe politique française et européenne. Les partisans du oui nous affirment que certains pays ne voudront pas d'un autre projet car ils sont allés vers celui-ci à reculons. Peut-être... Mais c'est encore une fois le problème de la non représentativité.. Je doute que leurs peuples soient opposés à une constitution qui serait enfin fidèle au mot "démocratie", et ne les incitent pas à de nouveau y aller à reculons.
Pour résumer, en somme au lendemain du 29 mai, la classe politique française sera bien contrainte de faire sien, le message majoritaire du non de gauche.. c'est à dire de plus d'exigence démocratique, le vrai chemin vers un peu plus de souci des hommes et moins des marchandises..
Aussi vrai que l'électeur du non n'est pas anti-européen, l'électeur du oui n'est pas opposé à plus de démocratie. Autrement dit, le sentiment favorable à l'Europe est plus large que le oui et le sentiment favorable à plus d'exigence démocratique (base d'un éventuel nouveau projet), est plus large que le non.
Vous mêmes, Nuvolari, Xave, vous y retrouvez sans doute..
Enfin, simplement une réflexion sans rapport : la constitution actuelle n'est modifiable que par une procédé anti-démocratique, à l'unanimité des pays (plutôt qu'à une majorité des électeurs européens par exemple). Rassurez-vous, adoptez-la, ce sera toujours possible nous affirme-t-on? Mais comment?
C'est qu'à travers la procédure de ratification, l'unanimité connait un test avant même d'entrer en application. Quand on voit avec quelle difficulté on a du mal à le ratifier à l'unanimité ce traité, comment pourrait-il en être autrement lors d'une modification?
Hugues