Je ne vois pas tellement le rapport, Dervi.
Dervi a écrit:Je vais préciser. Le système de retraite actuel avec les lois "votées" va subir un déficit structurel si l'on en croit le dernier rapport du COR et, depuis ce nouveau rapport, un retour à l'équilibre avant 2070 n'est plus prévu avec certitude. Les réserves actuelles donnent un peu de temps pour tout réorganiser, mais elles peuvent être purgées en une dizaine d'année si les prévisions se matérialisent.
Disons un
besoin de financement plutôt qu’un déficit, même si ça déplaît à la logique comptable libérale qui prévaut désormais, c’est plus conforme à l’esprit de notre protection sociale, la fin justifiant les moyens.
Ce besoin de financement n’est pas un problème sérieux, non seulement grâce aux réserves mais également à la simple possibilité d’augmenter les cotisations vieillesse (+0,1 par exemple). Cette solution permet de ne pas toucher aux principes républicains à l’oeuvre. Charge ensuite à l’État de mettre en place une politique sociale ambitieuse afin d’accroître l’emploi et la natalité et trouver un nouvel équilibre toujours plus favorable aux travailleurs (c’est bien l’objectif que nous partageons, Dervi, travailleurs actifs ou inactifs, ensemble).
Dervi a écrit:Si je m'en tiens à la définition stricte de la retraite par répartition rappelée par le COR (Normalement, un système de retraite en répartition est financé par les cotisations des actifs en emploi prélevées sur leurs salaires bruts selon un taux de cotisation déterminé.), seules les cotisations des actifs peuvent équilibrer un tel système. Hors, il y a un problème de pouvoir d'achat chez les actifs et retraités, donc accroître les cotisations pour absorber le déficit ne m'apparaît pas être une solution et ce serait d'ailleurs transférer une partie de la richesse des actifs vers les retraités, bien qu'il soit possible de juger que ces cotisations représentent un revenu différé, mais nous en avons déjà parlé.
Ce n’est pas seulement une possibilité, mais bien une réalité difficilement contestable. La pension de retraite est techniquement un
salaire différé pour deux raisons: financée par des cotisations sociales, et proportionnée au salaire antérieur (logique assurantielle). Mais en réalité, la pension de retraite n’est pas tant un salaire différé qu’un
salaire socialisé, puisqu’on va au-delà de logique d’assurance et de neutralité. C’est cette logique qui réduit les inégalités et justifie les efforts demandés aux actifs.
Dervi a écrit: De plus, l'analyse de la moyenne de l'épargne et du patrimoine des plus de 60 ans montrent que certains retraités ont un niveau de vie très élevé par rapport au reste de la population avec des capacités d'épargne et un patrimoine en moyenne supérieur au reste des Français (assez logique pour le patrimoine, mais pas forcément intuitif de premier abord pour les capacités d'épargne).
Les inégalités de revenus et de patrimoine, qui sont plus élevées et se creusent essentiellement durant la vie active et par l’héritage. La retraite par répartition contribue à réduire les inégalités, le taux de remplacement est déjà plus élevé pour les bas salaires que pour les plus hauts revenus, sans même parler des pensions de réversion.
Dervi a écrit:Donc, ce que je voulais dire, c'était qu'il était possible de réduire le déficit en cours en abaissant les plus hautes retraites (critères à étudier) ou d'en profiter pour augmenter les plus petites retraites. En l'état, cela ne reverse pas de la richesse aux actifs, cela limite la richesse d'une partie des retraités pour réduire l'impact du déficit du système en place et son besoin de financement par les actifs ou le capital.
Je ne conteste pas la faisabilité de cette proposition, j’en conteste la pertinence. J’ai essayé d’expliquer pourquoi sans y parvenir par manque de temps et de clarté idéologique (c’est moi qui ne suis pas assez claire). Il me semble en tout cas, pour faire court, que
pour protéger, garantir et promouvoir notre république sociale, il convient d’inclure les plus aisés dans cette logique socialisante.
Ce n’est toujours pas très clair, essayons autrement: les plus riches se plaignent de payer trop d’impôts sans recevoir en retour, la logique libérale consiste à défendre la charité (le riche paye des impôts et les pauvres reçoivent une assistance), ce qui entraîne un double problème, les riches font sécession car ils estiment toujours payer beaucoup sans recevoir en retour et seuls les plus pauvres sont soutenus (sans pour autant sortir de la pauvreté), ce qui entraîne un ressentiment général vis à vis de l’État providence.
Les prestations réservées aux plus pauvres font de pauvres prestations.Comment faire autrement ? Il convient d’universaliser les prestations et de conserver le plus possible la logique d’assurance, afin donc que chacun contribue selon ses moyens. Il faut donc conserver la logique assurantielle des retraites, l’universalité des prestations familiales…
Si ce n’est toujours pas assez clair, il reste l’exemple du
quotient familial qui permettra à nouveau d’élargir la nature idéologique de notre désaccord. Le quotient familial (et conjugal) comme une retraite élevée bénéficie bien aux plus hauts revenus, c’est incontestable et cela entretient une certaine forme d’inégalité. Mais quel est l’objectif du quotient familial ? Maintenir une forme de parité de niveau de vie entre les contribuables qui ont des enfants et ceux qui n’en ont pas. Quel est l’objectif de la retraite ? Maintenir une continuité du niveau de vie entre le vie active et la retraite (le retraité est un salarié inactif). Le quotient familial n’est pas un privilège et la retraite élevée non plus. Sans le quotient familial, les parents payeraient plus d’impôts (par unité de consommation) que les adultes aux revenus similaires sans enfants. Sans la continuité du niveau de vie à la retraite, les retraités seront appauvris. Face aux inégalités, il convient d’agir sur l’échelle des revenus et les impôts (sur les impôts nous sommes déjà largement en accord).
Tout se tient dans la politique sociale, tout fait système, j’espère que tu ne renonceras pas à penser ce
tout condition impérative d’une vision politique complète. Ce qui me sépare enfin de ton analyse, c’est la confiance. Je crois à l’optimisme de la volonté, au principe espérance plutôt qu’au principe de précaution si je puis dire. Pas de politique autrement, mais un rétrécissement du monde, particulièrement critique aujourd’hui.