(Ca faisait quelques mois que je pensais à faire ce post... Qui peut expliquer pourquoi les Ukrainiens mettent une telle énergie à défendre leur terre... et un peu du lien entre l'individu et la nation...
Et aujourd'hui, finalement c'est peut-être le moment approprié)
Chtche ne vmerla Ukraïni - hymne officiel ukrainien ici interprété par Oleksandr Ponomaryov Ni la renommée* ni la liberté** de l'Ukraine ne sont encore mortes,
Le destin nous sourira, jeunes frères.
Nos mauvais anges*** mourrons comme la rosée au soleil.
Nous aussi, mes frères, nous gouvernerons sur notre terre.
Âmes et corps, nous sacrifierons pour notre liberté,
Et nous montrerons, mes frères, que nous sommes de la lignée des Cosaques.
Âmes et corps, nous sacrifierons pour notre liberté,
Et nous montrerons, mes frères, que nous sommes de la lignée des Cosaques. Cette version est en vigueur depuis 2003.
Auparavant, la Constitution de 1996 indiquait que la composition de Mikhaïlo Verbytski, écrite pour mettre en musique le poème de Pavlo Tchoubinski, était l'hymne officiel de l'Etat Ukrainien.
Mais cette disposition de la Constituion était incomplète. Quelle était la version du poème? C'est que Tchoubinski a tatonné et en a écrit plusieurs variantes.
Et que, en réalité, le poème que les gens des années 1990 n'était plus vraiment de Tchoubinski.
Le décret de 2003 simplifie les choses ne reprend que la première strophe et un refrain du poème original.
Et grave dans le marbre une toute petite altération du texte orignal qui existait déjà auparavant, que j'expliquerai un peu plus tard dans ce post.
Chtche ne vmerla Ukraïni - hymne semi-officiel et semi-officieux de l'Ukraine entre 1992 et 2003Ces paroles n'ont été codifiées nulle part. Cependant c'était celles qui étaient jouée durant toutes les cérémonies officielles comme moins officielles.
Et cette version est encore énormément jouée lorsque l'évènement ne revêt pas un caractère officiel, tout simplement parce que c'est vu comme la version longue de l'hymne (et une partie des Ukrainiens regrettent que tant de mots aient été retirés).
Ni la renommée*, ni la liberté** de l'Ukraine ne sont encore mortes.
Le destin nous sourira, jeunes frères.
Nos mauvais anges*** mourrons comme la rosée au soleil.
Nous aussi, mes frères, nous gouvernerons sur notre terre.
Âmes et corps, nous sacrifierons pour notre liberté,
Et nous montrerons, mes frères, que nous sommes de la lignée des Cosaques.
Âmes et corps, nous sacrifierons pour notre liberté,
Et nous montrerons, mes frères, que nous sommes de la lignée des Cosaques.
Tenons, mes frères, dans ce combat sanglant, du Sian au Don
Nous ne permettrons à nul autre de gouverner sur notre terre.
La Mer Noire sourira et grand-père Dniepr se réjouira,
Car dans notre propre Ukraine, refleurira la bonne fortune.
Âmes et corps, nous sacrifierons pour notre liberté,
Et nous montrerons, mes frères, que nous sommes de la lignée des Cosaques.
Âmes et corps, nous sacrifierons pour notre liberté,
Et nous montrerons, mes frères, que nous sommes de la lignée des Cosaques.
Notre persévérance et nos labeurs sincères seront récompensés,
Et le chant de la liberté retentira dans toute l'Ukraine.
Faisant écho aux Carpates , et grondant à travers les steppes,
La renommée, la gloire de l'Ukraine seront connues de toutes les nations.
Âmes et corps, nous sacrifierons pour notre liberté,
Et nous montrerons, mes frères, que nous sommes de la lignée des Cosaques.
Âmes et corps, nous sacrifierons pour notre liberté,
Et nous montrerons, mes frères, que nous sommes de la lignée des Cosaques.En réalité, l'auteur de la plupart de ces paroles est inconnu.
Cette version a pour la première fois été chantée publiquement chantée le 24 septembre 1989 sur la scène d'un festival de musique, puis une seconde fois en 1990 à l'Opéra de Leopol à l'occasion de la réunion du Conseil régional des députés du peuple de Leopol pour sa 21e convocation.
Jusqu'à ces deux représentations publiques, c'était un chant qu'on se transmettait et partageait en privé.
Chtche ne vmerla Ukraïna (1863, poème et 1864, musique) - Hymne de la République populaire ukrainienne (1917-1921) et de la République populaire d'Ukraine occidentale (1918-1919)Cet enregistrement est tout premier enregistrement de l'hymne, toute version confondue.
Cela eu lieu à Cologne, dans une des succursalles de Gramophone " en octobre 1910.
Il est interprété par le grand ténor ukrainien Modest Mentsinski.
À une époque où l'Ukraine est encore quelque chose à conquérir.
L'Ukraine n'a pas encore péri, ni sa renommée*, ni sa liberté** !
Le destin nous sourira, jeunes frères.
Nos mauvais anges*** mourrons comme la rosée au soleil.
Nous aussi, mes frères, nous gouvernerons sur notre terre.
Âmes et corps, nous sacrifierons pour notre liberté,
Et nous montrerons, mes frères, que nous sommes de la lignée des Cosaques.
Hé, hé chers frères , en avant, partez au combat
Hé, hé, il est temps de se relever, il est temps de gagner en liberté !
Nalyvaiko , Zalizniak et Taras Triasilo
Nous appellent au delà du tombeau à la bataille sainte****.
Rappelons-nous la mort glorieuse de la chevalerie cosaque,
Afin que nous ne sacrifions pas en vain notre jeunesse.
Âmes et corps, nous sacrifierons pour notre liberté,
Et nous montrerons, mes frères, que nous sommes de la lignée des Cosaques.
Hé, hé chers frères , en avant, partez au combat
Hé, hé, il est temps de se relever, il est temps de gagner en liberté !
Oh Bohdan , Bohdan, notre grand hetman
Pourquoi avez-vous offert l'Ukraine aux misérables Moskals***** ?!
Pour lui rendre son honneur, nous déposons nos têtes
Nous nous appellerons les fils fidèles de l'Ukraine !
Âmes et corps, nous sacrifierons pour notre liberté,
Et nous montrerons, mes frères, que nous sommes de la lignée des Cosaques.
Hé, hé chers frères , en avant, partez au combat
Hé, hé, il est temps de se relever, il est temps de gagner en liberté !
Nos frères slaves ont déjà pris les armes
Aucun d'entre nous ne désire que nous restions en retrait.
Unissez-vous tous, frères Slaves
Afin que nos ennemis périssent et que survienne la liberté !
Âmes et corps, nous sacrifierons pour notre liberté,
Et nous montrerons, mes frères, que nous sommes de la lignée des Cosaques.
Hé, hé chers frères , en avant, partez au combat
Hé, hé, il est temps de se relever, il est temps de gagner en liberté !Le premier vers semble différent.
En réalité, en Ukrainien, c'est seulement un changement de cas grammatical (vous savez, comme dans les déclinaisons latines ou allemande.. ou russe d'ailleurs), et donc le changement d'une seule lettre.
Quand l'Ukraine atteignit son indépendance en 1991, il semblait absurde d'écrire que l'Ukraine n'était pas encore morte, alors que justement elle était tout juste née. Dans le texte original, ce qui n'est pas encore mort, c'est l'Ukraine en tant qu'idée. Alors pour respecter le poème, en changeant seulement une sonorité et donc une lettre, on en changea le sens sans vraiment en changer la première strophe.
La première représentation publique de la version originale eut lieu en 1865 à Przemyśl, alors en Autriche-Hongrie. Une représentation sur le territoire de l'Empire russe courait le risque de répression (et déjà cette représentation à Przemyśl aura des conséquences...)
Przemyśl était vue comme une part de l'Ukraine historique, puisque cela avait été un territoire de la Gallicie , donc le jouer là bas, c'était un peu le jouer en Ukraine.
Pour autant Przemyśl ne deviendra jamais ukrainien, même si l'Ukraine s'est étendue vers l'ouest dans les années 1920-30 et 40, et Przemyśl est de nos jours une ville polonaise à quelques kilomètres de la frontière polo-ukrainienne.
Cela vous est sans doute clair désormais, comme la Marseillaise, c'est en réalité un chant de libération.
Mais à la différence de cette dernière, quand la Marseillaise célébrait d'une libération déjà conquise et à défendre, ici c'est un chant qui longtemps annonçait une prophétie, une libération à venir, à conquérir une longue marche vers un instant qui mit cinquante années à survenir à l'occasion de la chute de l'Empire russe.
Avant d'être tuée dans l'oeuf ou de se muer en une République socialiste soviétique pour 70 années, selon les points de vue.
C'est donc l'ode d'un désir d'indépendence et à un combat clandestin d'au moins cinquante ou cent vingt années.
120 années, même si l'Ukraine existe sur la scène internationale depuis 1922, satisfaisant, dans la forme, à défaut que ce soit en esprit, ce combat pour l'autodétermination, même si l'Ukraine a un siège à l'ONU dès 1948.
L'Ukraine n'a pas 31 années, ni 100 ans.
Ni même 105 ans.
Elle est au moins aussi vieille que ce chant.
Je tiens à dire que l'hymne national de l'Ukraine est incroyable. Au début, il ne semble pas faire bonne impression, mais ce n'est qu'à première vue. En fait, il a été créé par Mikhailo Verbitski, un compositeur d'église du milieu du XIXe siècle. Il a vécu dans la monarchie autrichienne, aimait probablement beaucoup Schubert, il avait un don mélodique - cela ressort de ses liturgies. C'était un compositeur d'église. Et il a également créé cette chanson patriotique en tant que compositeur d'église. C'est un alléluia, ce chant. Mais il n'y a rien de tel dans les cantiques ! C'est une œuvre unique : c'est l'hymne de l'Ukraine, mais elle porte les signes d'un début liturgique. Une sorte de souvenir de la liturgie, de la liturgie de toute la journée, s'est enfoncé dans cet hymne. Dans ce chant simple, c'est comme si le vent soufflait, comme si les branches des arbres chantaient. ---- Valentyn Sylvestrov, grand compositeur néoclassique et pianiste ukrainien
Ce matin à Kiev, par la Chapelle nationale des banduristes d'Ukraine:
Hugues
*: Ou
la gloire. Le mot dans le texte se traduit littéralement par
gloire, mais a pour sens dans le contexte de
renommée.
**: Ou
la volonté. Le mot ukrainien porte les deux sens
***: Je reprends le mot que j'avais utilisé le 27 juillet dans la traduction d'une chanson: l'expression utilisée veut dire "ennemis" en ukrainien courant MAIS... cet idiome est une allégorie inventés par des poètes qui a fini par entrer dans le langage courant, qui signifie littéralement "filles folles", ou "sorcières"... D'où pour garder ce double sens, à la fois d'ennemis et de surnaturel, en français, l'expressoin "mauvais anges"
****: Une des versions alternatives du poème remplace ces deux vers par
Rappelons-nous les moments difficiles, les heures terribles
Et ceux qui ont su mourir pour notre Ukraine.*****: Une des versions alternatives du poème remplace
aux misérables Moskals par
à de mauvais ennemis.
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Rappelons comme je l'ai déjà fait plusieurs fois ici que si Russes et Ukraines ont une histoire commune, se revendiquant tout deux de la Rous' de Kiev, ce qui les sépare, au delà de la divergence progressive de leurs langues d'abord communes, c'est ce qui va suivre la Rous kiévienne.. Les Ukrainiens se revendiquent de la Gallicie au contraire des Russes. Et si les deux peuples (qui n'en formaient plus ou moins qu'un seul alors) vont subir les invasions mongols, les Russes se revendiquent de certains des descendants des seigneurs de la Rous kiévienne devenus des vassaux mongols et exerçant leur pouvoir sur le tout jeune duché de Moscou, et qui ont prétendu réinstaurer cinq à six siècle après sa disparition, la Rous' à Moscou (d'où le mot de Russie / Rossiya mais qui nait non pas directement de Rous' mais du grec)
Et j'en viens au pourquoi de toute cette digression: si les Moscovites (à l'époque c'est le nom des Russes) se libèrent des Mongols d'eux même profitant de l'affaiblissement de l'empire mongol, les Galliciens/Ukrainiens sont eux sous domination polo-lithuanienne, la fameuse république des Deux Nations (le h supplémentaire n'est pas une erreur), qui fut un acteur justement de l'affaiblissement des Mongols (les Russes peuvent lui dire merci). Le mouvement cosaque, d'abord tampon au service de la protection du sud de la République des Deux Nations, pour le protéger des invasions asiatiques (les mongols sont encore valillants) se mue peu à peu en mouvement nationaliste... Plutôt que de protéger la République des Deux Nations, l'idée devient bientôt d'acquérir son indépendance. Il est difficile de dire si c'est un calcul ou si c'est un mouvement sincère, car cette idée est populaire dans la population paysane et renforce les Cosaques, et va leur permettre d'arriver à leur fin. Mais pourtant, comme déjà évoqué en décembre et c'est ce à quoi fait référence cette ligne, à peine libéré des la République des Deux Nations que le Hetman des Cosaques ira se mettre au service du Tsar (le tout nouveau titre depuis quelques générations du prince moscovite). Mais on peut écrire sans doute que le sentiment national ukrainien est aussi vieux que cette indépendance manquée. D'où l'évocation des misérables Moskals dans cette version du poème.