von Rauffenstein a écrit:D'abord tu baisses d'un ton. Je ne crois pas avoir été incorrect avec toi.
Le "fantasme bolchévique" te salue bien.
von Rauffenstein a écrit: Ensuite je ne vois pas où est l'incompatibilité entre les règles de l'impot et celles du mérite que l'on veut promouvoir.
C'est peut-être une partie du problème. Le principe de l'héritage s'oppose directement à celui du mérite. L'héritage est donné à qui se donne la peine de naître au bon endroit au bon moment. La contingence pure.
von Rauffenstein a écrit: Tu fais apparemment un rappel sur les lois qui prévalent sur la transmission des assurances vies entre parents de la même famille en lien indirect.
Je parle notamment de l'assurance-vie. Le souscripteur choisit son bénéficiaire qui sera exonéré de droits à hauteur de 150 000 euros.
von Rauffenstein a écrit:L'argent épargné n'a pas été volé. Il a été gagné, et il a été d'abord été "net d'impot".
Il a été gagné potentiellement par celui qui veut le donner, pas celui qui en hérite. D'ailleurs, je t'arrête: il n'a pas nécessairement été gagné. Celui qui transmet peut aussi bien être héritier et transmettre des biens dont il avait également hérité.
von Rauffenstein a écrit:Tu pousses ensuite la théorie jusqu'au million d'euro net d'impot. Ou tu t'égares d'ailleurs, en parlant d'un individu qui pourrait engranger un million net d'impot. C'ets 150.000 euros par individu. Selon certaines conditions très strictes (avoir contracté avant un certain âge). Et sinon, c'est 30.000 exonérés au global non pas par héritier mais pour l'ensemble des héritiers. Il y a très peu de personnes en France qui peuvent se permettre de placer un million d'euros en assurances vie, nettes d'impot à la transmission. Et ceux qui épargnent en assurances vie le font en général pour permettre la transmission d'un bien immobilier que les héritiers seraient sinon obligés de vendre pour s'acquitter des droits de succession. Certainement pas pour s'acheter des rolex.
Tu devrais relire ce que j'ai écrit: jusqu'en 2012, chaque parent peut transmettre tous les dix ans 150 000 euros sans droits de succession. Cela signifie donc potentiellement qu'en 10 ans tu peux transmettre 600 000 euros, dix ans de plus et c'était le double. L'assurance-vie vient
en plus.
von Rauffenstein a écrit:Ensuite, tu parles des successions entre époux, nettes d'impots. Je vais te parler de choses concrètes, bien "dans le dur" et pas théoriques dans lesquelles tu t'emmêles les pinceaux. Mon père avait acheté un appartement en province grâce en partie à l'argent d'un héritage sur lequel il avait précédemment payé 55% d'impots. Il est mort en 1995. Ma mère y vit toujours. Et touche la moitié de sa pension de Colonel en retraite. Elle n'a bien sûr aucun mérite sauf d'avoir contracté maritalement avec son époux. Et accessoirement de lui avoir fait 4 enfants et les avoir élevé après avoir abandonné sa profession d'institutrice. C'est du concret. Mais je conçois que dans ton esprit, il eut mieux valu qu'elle aille à la rue mendier plutôt que jouir d'un bien sur lequel elle n'a aucun mérite particulier puisqu'elle n'a rien fait pour le "mériter".
Tu n'ignores pas, j'imagine, que les successions entre époux en France étaient taxées encore il y a quelques années ? C'est donc à toi de faire la leçon à la France d'hier qui avait l'outrecuidance d'imposer les successions entre époux pendant tout le siècle dernier.
von Rauffenstein a écrit:Pour ce qui est du niveau d'étude, tu t'égares complètement et tu "déqualifies complètement le débat" sur le sujet de l'héritage. Et ta réflexion en dit long d'ailleurs sur ta façon de voir le monde (faire des études et avoir droit à un salaire médian X dans un métier Y. Très français. Très "énarque". Félicitations Silverwitch !). Je ne vois pas ce que cela a à voir avec l'héritage et l'impot auquel il est soumis. Les biens ont une valeur. Ils sont taxés et sous certaines conditions, une partie de ces biens peuvent être jusque dans une certaine mesure, non imposable parce que l'argent épargné a profité aussi comme emprunt, sans être dépensé par la personne qui l'y a placé. Et les impots ensuite, encaissent.
C'était simplement un moyen clair et concret de montrer la différence entre celui qui hérite et celui qui n'hérite pas. Je n'ai pas fait de relation entre le niveau d'études et le droit à un revenu ou à un statut, tu écris des choses que je ne pense pas et que j'écris encore moins. Cela en dit sans doute plus long sur toi que sur moi. Je te rappelle encore une fois le problème philosophique. Que vaut le mérite (puisque si tu reconnais une valeur aux biens, il n'est pas certain que tu en fasses de même pour l'effort, le travail et toutes les valeurs que tu mets en avant dans tes précédents messages) s'il ne se traduit par aucune
distinction sociale ? Dans ton précédent paragraphe, tu fais un très beau plaidoyer pour une mère de famille, auquel je suis sensible, et en creux tu justifies une distinction sociale par l'utilité commune: élever des enfants, sacrifier sa carrière professionnelle, etc...
Refaisons donc une simulation: un individu reçoit en 1995, quand il a 18 ans 50 000 euros*2 (soit 100 000 euros sans droits de succession), puis en 2007 150 000*2 (soit 300 000 euros sans droits de succession), en 2017 il recevra encore 100 000 euros*2 (soit 200 000 euros). En 2032 ses parents décèdent, mais prévoyants ils laissent chacun à leur enfant une assurance-vie d'un montant de 150 000 euros*2 (soit 300 000 euros). Sur le montant de la succession, car il en reste, notre héritier plus tout jeune pourra retrancher encore 200 000 euros. Faisons les comptes: 50 000*2 + 150 000*2 + 100 000*2 + 150 000*2 + 200 000 = 1 100 000 euros. Sur une période favorable d'une grosse trentaine d'années, notre héritier pourra recevoir plus d'un million d'euros sans avoir à acquitter de droits de succession. Si ses parents ont été bien inspirés, ils auront transmis bien plus encore avec le mécanisme de l'assurance-vie et notre bienheureux héritier pourra éventuellement toucher plusieurs millions d'euros qui seront imposés à hauteur de 20%, soit un montant plutôt faible au regard de l'importance de cette succession virtuelle. Cet avantage fiscal dont bénéficient surtout les plus favorisés est payé par toute la collectivité, et en proportion surtout par les plus pauvres.
Revenons enfin à la distinction sociale, si on admet que les successions entre conjoints devraient être exonérées au moins partiellement à concurrence d'un certain montant, comment justifier l'héritage pour les enfants, comment justifier de telles exemptions dans une société où les inégalités de revenus sont très importantes, et où le budget du logement notamment est désormais considérable ? Comment accepter un tel privilège, sans contrepartie, sans utilité commune ? Ni mérite, ni effort, ni sacrifice, ni utilité commune. En ce qui me concerne ma position est assurée, de même que je suis opposée au "mariage" homosexuel qui ne présente pas d'utilité publique et ne devrait donc pas donner lieu à une distinction notamment fiscale, seuls les héritages qui permettent aux héritiers d'échapper à l'état de nécessité devraient être acceptés, tant qu'ils participent à réduire l'inégalité de naissance. Tout ce qui entretient et accentue l'inégalité s'oppose au mérite individuel et aux efforts collectifs.
Pour le dire autrement, nous finançons collectivement la transmission de privilèges. Les pauvres payent pour que les riches héritent à peu de frais.