de Cortese le 24 Aoû 2016, 13:42
C'est pas moi qui irais justifier les atteintes aux libertés individuelles, vu que parmi les participants au forum je dois être un de ceux qui en ont été le plus privé dans sa vie. Mais voilà, on se débat avec cette question théorique qui agite les milieux intellectuels algériens depuis 25 ans et qui pourrait se résumer à commenter la phrase célèbre "pas de liberté pour les ennemis de la liberté". Il y a les multiples atteintes aux libertés (pas qu'individuelles) commises par les démocraties occidentales et leurs imitateurs du Tiers-Monde, et de l'autre des mouvements politiques de masse, qui jouissent d'un soutien populaire certain selon les pays à cause justement des atteintes aux libertés (au centre desquelles l'immense question palestinienne), mais dont la doctrine est foncièrement liberticide. Les partis islamistes qui participent à des élections démocratiques crient aux atteintes à la démocratie et aux Droits de l'Homme alors qu'ils n'ont jamais caché (du moins lorsqu'ils se sentent hors d'atteinte) leur volonté de détruire démocratie et Droits de l'Homme qualifiés de "kofr" (blasphème). Un des principaux soutien du FIS en Algérie était Maître Ali Yahia Abdennour, un monsieur instruit, de culture française, marié à une française (leur fille est une bonne copine, on travaillait dans la même structure, les conversations cessaient avec mes autres collègues médecins femmes dès qu'elle entrait dans notre petit réfectoire, vous imaginez l'ambiance). J'avoue n'avoir pas su trouver les mots dans ces incessantes, épuisantes, polémiques (à l'époque je quittais en fin de journée l'institut de médecine où on travaillait pour rejoindre la salle de rédaction des journaux qui m'employaient). C'était un peu comme une guerre entre Les Défenseurs Acharnés de la Lettre des Lois contre les Défenseurs Acharnés de l'Esprit des Lois.
Je n'ai jamais compris comment on pouvait croire que mécaniquement, la Lettre pouvait l'emporter sur l'Esprit. Pour moi il s'agissait d'un sorte de fétichisme doublé du complexe du colonisé. La situation est sans doute différente dans les démocraties occidentales, puisque l'agitation islamiste n'y menace en rien la démocratie (la menace y vient d'ailleurs). Le problème c'est que ces démocraties servent de modèles et que ces forces obscures qui menacent la démocratie occidentale (l'argent pour faire court) soutiennent également l'islamisme, directement ou indirectement (en Afghanistan, en Syrie, partout, sauf là où il est dans la résistance à l'Occident c'est à dire dans le monde chiite). Et personne n'est là pour nous dire quoi faire. Je me dis que nous pourrions nous "convertir" au chiisme (le mot ne convient pas c'est bien la même religion), mais il ne sont pas cons les islamistes sunnites (du moins leurs maîtres qui tiennent la laisse) : la proposition islamiste centrale c'est "retour au califat", c'est très intelligent, ça ne laisse aucune chance d'union des deux mondes musulmans. Au début je ne voyais pas l'intérêt de cette revendication, de cette invocation (j'ai même été un jour sommé de déclarer mon soutien au califat au Salon du Livre par un énergumène). Pour les uns les califes sont quasiment des prophètes et pour les autres ce sont des brigands coupables d'avoir exterminé la famille du Prophète (chiisme vient de "chiaat' ah'l el beyt'", le "parti de la famille du Prophète", ce qui laisse un boulevard aux impérialo-sionistes pour monter à leur guise des guerres incessantes inter-musulmanes.