de RGS le 06 Juil 2009, 22:36
LE MONDE
06.07.09 | 15h39 • Mis à jour le 06.07.09 | 17h10
La justice entérine la nationalisation de General Motors
"General Motors est désespérément insolvable et il n'y a plus rien à faire pour les actionnaires". C'est par ces mots que le juge Robert Gerber du tribunal des faillites new-yorkais chargé du dossier de la restructuration du constructeur automobile a approuvé, dans la nuit de dimanche 5 juillet à lundi 6, la vente des actifs sains de l'ancien numéro un mondial à une nouvelle société contrôlée par l'Etat américain. Les actifs non repris par la nouvelle société seront liquidés par la justice. La Cour suprême doit entériner cette décision d'ici le début de la semaine prochaine.
La décision de M. Gerber tient en 95 pages. Les débats avaient duré trois jours et s'étaient terminés jeudi 2 juillet. Après le sauvetage de Chrysler, c'est une nouvelle victoire pour Barack Obama. Ces derniers jours, le président des Etats-Unis avait mis la pression pour qu'un règlement rapide du dossier intervienne. Il aura pris un peu plus d'un mois après le dépôt de bilan de GM, le 1er juin.
Le juge Gerber a révélé avoir examiné près de 850 objections au plan de restructuration, soulevées par des actionnaires et des créanciers. Mais aucune n'était valable, selon lui. "Il fallait à tout prix éviter la mort du patient sur la table d'opération", a-t-il ironisé rejetant les arguments selon lesquels les créanciers privés auraient été injustement traités.
Certains estimaient encore que GM avait les moyens de se restructurer seul et n'avait pas besoin du versement de 60 milliards de dollars (43 milliards d'euros) de fonds publics. "Le tribunal est sensible à leurs inquiétudes mais ne peut pas les aider, a souligné M. Gerber (...) Si GM est liquidé, il n'y aura non seulement plus rien pour les actionnaires, il n'y aura plus rien pour les créanciers." Ces derniers détiendront 10 % du capital en échange de l'annulation de 27 milliards de dollars de dette.
Toute autre solution en dehors de celle-ci était donc impossible. "Il n'y a pas de partenaire prêt à une fusion, d'acquéreur ou d'investisseurs désireux et capable de reprendre l'activité de GM. A part le Trésor américain et l'Etat canadien, il n'y a pas de créanciers désireux et capable de financer la poursuite des opérations de GM", a insisté le juge. D'autant que le géant américain est dans une situation financière catastrophique. Sur le seul premier trimestre 2009, il a perdu 10 milliards de dollars. Entre 2005 et le premier trimestre 2009, GM a brûlé 40 milliards de dollars ! Et, sans une première aide de 19,4 milliards de dollars de l'Etat fédéral américain, il aurait dû être purement et simplement liquidé.
Pour appuyer ses arguments, le juge Gerber a aussi rappelé qu'au 31 mars, GM avait 82 milliards de dollars d'actifs mais 172 milliards de dettes !
En échange, le nouveau GM va devoir faire la preuve de sa viabilité sur un marché américain très sinistré. En juin, la production d'automobile a chuté de 74 % et les ventes ont plongé de 28 % par rapport au mois de juin 2008 (de 7 % par rapport au mois de mai), selon le cabinet Autodata.
Malgré de nombreuses restructurations et suppressions d'emplois ces dernières années, le nouveau GM fermera d'ici 2012, 11 usines sur les 47 qu'il comptait en 2008. Trois autres seront mises en chômage technique. Il supprimera 21 000 postes de travail syndiqués sur 54 000. Enfin, il ne gardera que quatre marques sur treize : Cadillac, Chevrolet et GMC, et Buick pour le marché chinois. La marque Pontiac sera supprimée. Saturn et Hummer doivent être cédés. Opel doit logiquement être vendu à Magna. Enfin, Saab a été repris par son compatriote suédois Koenigsegg, spécialisé dans la fabrication de voitures sportives de luxe.
Pour la première fois en 2009, sa part de marché est passée sous la barre des 20 % (19,3 % exactement). Selon la nouvelle direction de GM, le constructeur devrait pouvoir maintenir à l'avenir une part de marché comprise entre 15 % et 17 %. Ce qui mettrait le constructeur américain à égalité avec le japonais Toyota aux Etats-Unis. En juin, les ventes de GM ont plongé de 33,6 %.
On est bien loin de la gloire d'antan où General Motors incarnait le rêve américain. En 1962, General Motors employait 600 000 salariés et détenait plus de 50 % de part de marché. En 2008, le groupe avait été détrôné par Toyota de la place de numéro un mondial de l'automobile qu'il détenait depuis... 1931.
Le juge Gerber a aussi rejeté les arguments des concessionnaires dont les contrats ont été cassés. General Motors veut se séparer de 2 400 concessionnaires d'ici la fin 2010. "A terme, nous voulons réduire de 40 % notre réseau pour le faire passer de 5 969 points de ventes à environ 3 600 d'ici à la fin 2010", a annoncé Mark LaNeve, vice-président de GM chargé des ventes. Il faut dire que certains concessionnaires - entre 400 et 500 - ne vendent que 35 voitures par an. A raison d'une cinquantaine de salariés par concessionnaires, près de 110 000 personnes pourraient perdre leur emploi d'ici 2010.
Si tout se passe comme le prévoit la direction du constructeur, le nouveau GM pourrait être de nouveau introduit en Bourse dès 2010. Il compte sur de nouveaux modèles pour reconquérir les clients. Et notamment, la Volt, un véhicule électrique doté d'un petit moteur thermique. Mais à 40 000 dollars, la Volt ne suffira pas à elle seule à offrir à GM une seconde vie.
Nathalie Brafman
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Le sort d'Opel demeure en suspens
Qui va racheter Opel ? La question restait ouverte, lundi 6 juillet, au lendemain de la décision du tribunal des faillites de New York d'approuver la restructuration de General Motors (GM). Malgré la signature, il y a un mois, d'un accord pour céder la marque allemande, filiale de GM, à l'équipementier automobile canadien Magna, le bal des prétendants à un rachat continue.
Ainsi, le chinois BAIC a proposé, dans une lettre à plusieurs membres du gouvernement allemand, de reprendre 51 % d'Opel, avec une garantie publique de 2,64 milliards d'euros. Cette agitation autour du dossier fait le jeu de GM, qui pourrait ainsi obtenir de meilleures conditions de reprise. Le patron de GM Europe, Carl-Peter Forster, a toutefois souligné que le canadien Magna dispose d'une "avance considérable" sur d'autres prétendants. "Il ne reste que des détails à régler", a-t-il précisé, le 5 juillet, à la Frankfurter Allgemeine Zeitung. La question du remplacement à long terme du partenaire de Magna, le financier russe Sberbank, resterait en suspens.